Jusqu'à récemment, c'est un tunnel de 42 kilomètres de long sous la Méditerranée qui devrait relier le Maroc à l'Espagne. Mais, le projet connait un rebondissement de taille. Les autorités des deux pays ont finalement opté pour la construction d'un pont entre la ville de Malabata, dans la baie de Tanger et celle de Punta Paloma, près de Tarifa. C'estla ministre espagnole des Transports Raquel Sanchez qui a révélé vendredi 31 mars cette décision. « Le pont représente un investissement colossal, mais moins important que le projet de tunnel. Après mûres réflexions, il nous paraît plus raisonnable mais aussi plus spectaculaire de construire Eurafrica. Il suffit de s'imaginer l'emprunter au coucher de soleil pour comprendre notre enthousiasme. », a-t-elle déclaré. Le pont permettra à moyen terme le transit de 15 millions de tonnes de marchandises et 17 millions de passagers par an, ce qui pourrait contribuer grandement au développement économique de l'ouest de la Méditerranée. L'Espagne est en effet le premier partenaire commercial du Maroc qui exporte une grande partie de sa production, notamment agricole, vers l'Union européenne. Mais le détroit de Gibraltar, où passent 100 000 navires par an, est déjà engorgé, ce qui limite le transport de marchandises entre les deux pays. Lire aussi | El Azami : « Les déclarations de Lahlimi confirment la confusion et la faiblesse du gouvernement » Pour rappel, lancé initialement en 1979 par Feu S.M. le Roi Hassan II et son homologue espagnol Juan Carlos Ier, le projet de tunnel sous la Méditerranée vise à relier l'Afrique et l'Europe par le train, en passant sous le détroit de Gibraltar. Deux sociétés d'Etat, l'une marocaine (Sned) et l'autre espagnole (Secegsa), coiffées par un comité mixte, ont été mises sur pied pour étudier sa faisabilité, ce qui a donné lieu à de nombreux forages, études et essais depuis 40 ans. Avec une première question à régler : un pont ou un tunnel ? Quinze ans plus tard, à la fin des années 1990, l'idée d'un pont suspendu est jetée aux oubliettes, en raison de son coût astronomique. L'inauguration du tunnel sous la Manche, long de 50 kilomètres, en 1994, a également pesé dans la balance. D'autant que la distance qui sépare les deux continents au niveau du détroit n'est que de 14 kilomètres. Seulement, les eaux sont trop profondes à cet endroit-là et le terrain bien trop argileux. Le projet de construction est décalé plus à l'ouest, entre le Cap Malabata à Tanger et la plage de Punta Paloma en Espagne, pour une distance de 38,7 kilomètres, le tout à une profondeur maximale de 300 mètres. Cet ouvrage, considéré comme l'un des plus ambitieux au monde, serait composé de deux tunnels ferroviaires et d'une galerie de services et de secours. Son coût est évalué entre 6 milliards d'euros et 18 milliards d'euros. Lire aussi | Baisse non unifiée du prix du gasoil Le projet s'était enlisé ces dernières années, en raison de coupes budgétaires en Espagne après la crise financière de 2008, et d'une succession de brouilles diplomatiques entre Madrid et Rabat. Mais les relations se sont normalisées suite au soutien espagnol au plan d'autonomie proposé en 2007 par le Maroc pour le Sahara. Les deux pays ont ainsi relancé plusieurs sujets bilatéraux. Une enveloppe a été débloquée dans le budget espagnol en 2023 pour financer une nouvelle étude « nécessaire » au « lancement du processus de construction de l'infrastructure ». Et la remise en route du projet a été abordée lors du sommet bilatéral du 2 février à Rabat.