Les produits vendus dans le magasin qui vient d'ouvrir à Casablanca seront en partie «made in Morocco». Il existe des enseignes qui se sont faites à la contrefaçon. Elles composent avec. Certaines ont même décidé de s'implanter officieusement dans le fief de la contrefaçon, à Derb Ghallef à Casablanca, alors qu'elles ont casqué de l'argent pour s'installer en bonne et due forme dans les quartiers les plus huppés. Aujourd'hui, les grandes marques font fi du phénomène, quoique quelques-unes engagent -de temps à autre- des actions pour se protéger. Qu'en est-il de Levi's, qui a finalement décidé d'entrer par la grande porte du marché marocain en ouvrant son premier magasin de franchisé? Nul n'ignore que ses articles sont commercialisés depuis très longtemps dans le circuit parallèle à des prix bon marché. Les produits du franchisé, en partie made in Morocco, dont les prix seront très proches des prix européens (à partir de 850 DH pour les jeans et 200 DH pour les tee-shirts), pourront-ils rivaliser alors leurs semblables vendus hors de ce magasin ? Dans la mesure où l'activité ne démarre qu'à peine, il est difficile de répondre à ces questions. Levi's, qui vient de débarquer au Maroc, a une stratégie de défense de la marque. Ses outils sont ajustés en fonction de la situation du marché et de l'importance du préjudice subi. Il restera à le jauger sur le marché marocain pour réagir ensuite. Mais pour l'instant, les responsables sont sereins. «Le phénomène est important au Maroc, mais il ne nous inquiète pas outre mesure. Nous partons du principe que seuls les meilleurs sont copiés et que le consommateur finit toujours par opter pour le produit original, s'il peut y accéder dans les conditions normales du marché. Cela dit, la défense de la marque est un droit légitime qui, s'il est exercé de manière intelligente, peut réduire la part de la contrefaçon et la copie à sa simple expression», explique Mohammed Tamer, président de Bogart S.A., la société qui a obtenu la franchise de la marque de jean. C'est en 1998 que le staff de cette société a commencé à «démarcher» Levi's pour s'implanter au Maroc. Cela n'a pas été facile, car Levi's ne fait rien au hasard. La firme prend toujours le temps nécessaire pour étudier tous les aspects d'un projet avant de le valider et de le lancer. Il en va de la réputation de son image de marque. A l'époque, les négociations n'avaient pas abouti, compte tenu des spécificités du marché marocain, qui n'était pas encore «mûr pour le type de produits à commercialiser», d'autant plus que la réglementation du commerce extérieur «ne s'adaptait pas à ce modèle de business». Les spécificités du marché local La société Bogart n'a pourtant pas baissé les bras. Elle récidive en 2006 et tente sa chance une nouvelle fois. Ce n'est qu'en septembre 2007 qu'un accord est finalement conclu avec la filiale Espagne Portugal. Le choix de Bogart n'est pas fortuit puisque l'entreprise est fournisseur de pantalons jeans et de sportswear de la marque. Au départ, en 1989, le business était indirect entre les deux parties. Il est devenu direct en 1996. «Nous faisons plus d'articles en denim et plus d'articles féminins que par le passé. Nous fabriquons des pièces à haute valeur ajoutée», souligne Tamer. Cette longue relation a donc fait pencher dans une certaine mesure la balance. Et si Levi's a accepté de venir sur le marché marocain, c'est aussi parce qu'il doit croire en ce business. Au bout du compte, nous rassure-t-on, les engagements de part et d'autre sont équilibrés. Soit. Bogart continuera pour sa part d'assurer deux fonctions. Elle restera toujours le fournisseur de Levi's. Un accord étant conclu avec le siège européen de la firme à Bruxelles.