L'année prochaine, Wana fera son entrée sur le marché du mobile. Les trois opérateurs se préparent, chacun aiguise ses armes. On parle déjà de méga promotions. Le jeu ne fait que commencer. Qui fera quoi? A chaque fois qu'un nouvel opérateur fait son entrée sur un marché, celui-ci est chamboulé. C'est ce qui s'est passé lorsque Wana a lancé sa marque Bayn sur le segment du fixe. Le même chamboulement devrait avoir lieu en 2008 quand l'opérateur se lancera dans le mobile. «2008 sera une grande année pour le marché», lance d'emblée Moncef Belkhayate, vice-président de Méditel. Et d'ajouter: «avec la mobilité totale de Wana, il y a aura une concurrence réelle et vive qui va générer beaucoup de trafic d'interconnexion». Désormais, tout le monde est sur le qui-vive. Chacun appréhende ce que l'autre fera. Chacun se prépare à pallier à toutes les éventualités. Car, il faut le dire, l'entrée de Wana sur le marché du grand public n'a laissé personne indifférent, que ce soit ses compétiteurs ou les clients dont le nombre vient de franchir le cap du million. L'offre promotionnelle que l'opérateur a lancée dès le démarrage de l'activité (6 mois de gratuité de Bayn à Bayn) a poussé les autres opérateurs à recadrer une partie de leur politique pour s'aligner. Maroc Telecom a lancé Mobisud. Méditelecom a lancé «Forsa». Une nouvelle tendance a donc commencé à voir le jour. Un changement tarifaire s'est opéré, dans le sens où les opérateurs ont commencé à commercialiser leurs services en les facturant selon des forfaits. Pour «Tilifoun Dial Dar» de Méditel, un service «Fabor» a été lancé en illimité au profit des personnes en bénéficiant, et ce, les soirs et les week-ends, pour la modique somme de 19 DH TTC. «Forsa», un autre exemple, a offert aux clients la possibilité de parler pendant 12 minutes à 99 centimes. Selon des initiés, les nouveaux services des deux opérateurs n'ont pas réalisé les performances escomptées. Faux, rétorque Moncef Belkhayate, pour qui «Forsa» a permis de dégager plusieurs dizaines de millions de DH. «Nous avons créé un outil de défense avec un investissement de départ quasiment nul. Nous avons pu réduire les coûts d'acquisition des clients. Nous avons juste eu à lancer une campagne publicitaire…», soutient le vice-président de Méditel. Avec l'arrivée de Wana en 2008 sur le segment du mobile, comment les opérateurs se comporteront-ils alors? Et quels seront leurs leviers de croissance? A priori, sur la partie «produits», l'enjeu portera sur le segment mobile avec la 3G qui devra être lancée par les trois opérateurs. L'Internet, et notamment l'Internet mobile, devra également figurer sur la liste de chacun des professionnels. L'opérateur historique devrait maintenir le cap sur l'activité mobile et le développement à l'international, deux leviers de croissance. Maroc Telecom commence à récolter les fruits de ses investissements dans les pays africains où il a pris d'importantes participations dans les opérateurs historiques locaux. D'ailleurs, il ne compte pas s'arrêter là puisqu'il projette d'initier une nouvelle expérience dans un quatrième pays africain. On n'en saura pas plus sur la politique que compte mener l'opérateur l'an prochain. En ce qui concerne Méditelecom, sa stratégie ne semble pas, aux yeux des observateurs, bien claire. Quel est son positionnement ? Pourquoi l'opérateur ne s'est-il pas lancé sur le segment de la téléphonie fixe jusqu'à présent alors qu'il en détient la licence? Méditel est-il un opérateur global ou un acteur mobile ? s'interrogent-ils. Pour Moncef Belkhayate, il ne fait aucun doute que Méditelecom est aujourd'hui un opérateur à vocation mobile. S'il ne s'est pas lancé dans le segment du fixe à proprement parlé, c'est parce «qu'aujourd'hui, les conditions en termes de tarifs de dégroupage partiel ou total présentées par Maroc Telecom ne sont pas optimales». Le gâteau devrait encore grossir ! Méditel compte se positionner sur les offres où la technologie est non-filaire (Wimax notamment). Et grâce au réseau de la fibre optique et des technologies hertziennes, le deuxième opérateur devra en 2008 se focaliser sur le segment du fixe mais dédié uniquement aux entreprises. En ce qui concerne l'Internet, la priorité sera donnée à la 3G mobile. Quant à la téléphonie mobile, Méditel consacre sa priorité au changement de la perception liée à la qualité de son réseau. «Il est primordial que nous y travaillions. Nous allons aussi nous focaliser sur les activités du pré-payé et du postpayé pour dynamiser notre réseau de distribution qui a souffert en 2007», déclare Moncef Belkhayate. Il s'agira, entre autres, d'augmenter le montant des subventions, de lancer davantage de campagnes publicitaires… Qu'en sera-t-il de Wana ? Le nouvel opérateur devra consolider en 2008 ses avancées sur le segment des entreprises, où il vient de lancer la première offre convergente voix/internet. Les marchés publics remportés tels que celui de Casanearshore ou de Technopolis devraient également le conforter dans ses ambitions comme partenaire des grands comptes. Sur le marché grand public, Wana devra aussi consolider sa position d'autant que, dès l'année prochaine, il se lancera dans le mobile, complétant ainsi son positionnement d'opérateur global. Ainsi, la boucle sera bouclée. Il ne fait aucun doute que les trois opérateurs vont se disputer davantage les parts de marchés. Mais il se pourrait qu'il n'y ait pas vraiment de perdant puisque le gâteau devrait grossir ! 3questions à Mohamed Benchaaboun, DG de l'ANRT. «Les options du forfait et de l'illimité doperont le mobile» Challenge Hebdo : comment les segments du marché devront-ils évoluer en 2008? Mohamed Benchaâboune : le marché du mobile continuera sa croissance en 2008. Cette évolution va être soutenue, notamment avec l'introduction du service voix mobile 3G et l'offre de nouveaux services innovants GSM, et en particulier ceux basés sur les options du forfait et de l'illimité. Concernant l'Internet, il faut s'attendre à une évolution positive avec l'entrée sur le marché des nouveaux opérateurs «Fixe» et le lancement de l'Internet mobile, ce qui contribuera à une diversification des offres Internet. Ainsi, on assistera d'une part pour le résidentiel à la multiplication des offres prépayées Internet et d'autre part pour les professionnels à des offres à très haut débit ainsi que des offres couplées (voix + données) avec des formules tarifaires adaptées et sur mesure. Le marché du fixe sera soutenu grâce à la concurrence. S'agissant de l'international, on assistera en 2008 à une concurrence plus accentuée au niveau des appels sortants et entrants. C. H. : le marché du mobile n'est-il pas saturé? M. B. : le marché du mobile enregistre une croissance stable. Les statistiques transmises à l'Agence par les opérateurs montrent que le parc Mobile est en évolution continue, d'autant que l'introduction des licences 3G va soutenir ladite croissance. Comme en Europe, les opérateurs innovent en permanence pour satisfaire les abonnés et pour augmenter leurs revenus. C. H. : devrait-on s'attendre à des baisses tarifaires? M. B. : les services relatifs aux marchés concurrentiels (Internet, offres entreprises...) connaîtront certainement une concurrence par les prix et par l'innovation, s'adaptant aux besoins spécifiques. Par ailleurs, il est à préciser que les mécanismes d'encadrement tarifaire au niveau des offres de gros «price cap» pour l'interconnexion mobile et fixe auront un impact significatif sur le niveau des prix de détail des services des télécommunications (prix final payé par le consommateur). En effet, le «price cap» permet de fixer à l'avance les baisses des offres de gros d'interconnexion en concertation avec les opérateurs puissants. Toute baisse des offres de gros aura une incidence sur les tarifs de détails. Compte tenu de l'état du marché des mobiles, l'ANRT a décidé de mettre en place en 2007 un encadrement tarifaire pluriannuel (price cap) pour les mobiles GSM, qui permet de proposer les conditions de décroissance des tarifs d'interconnexion mobile. Actuellement, l'offre de gros «price cap» pour l'Interconnexion fixe est à l'étude.