Le député tunisien Tarek Ftiti prend le contre-pied de tout ce qui a été dit sur Anis Amri, le suspect de l'attentat de Berlin : Et s'il y avait erreur sur l'identité du coupable? Invité de l'émission ‘‘7/24'' sur la chaîne privée tunisienne El-Hiwar Ettounsi, jeudi 22 décembre 2016, le député de l'Union patriotique libre (UPL) a tout simplement démoli l'image de démon que les médias nationaux et internationaux donnent du «véritable» Anis Amri. «Gardez-vous de tirer des conclusions hâtives, Anis Amri n'est pas celui que tout le monde croit», avertit-il. Hormis l'origine modeste du milieu où le présumé coupable a vécu, la cécité de sa mère et l'incapacité physique frappant son père, pour le député de la circonscription de Kairouan «qui connait bien» la famille Amri, le jeune homme a tout fait pour s'en sortir et ne serait pas le coupable. Il explique que «comme tant d'autres jeunes, au lendemain de la révolution, avec l'ouverture des frontières, il a tenté sa chance en optant pour la harga [l'émigration clandestine, ndlr], en mars 2011, et s'est retrouvé dans un camp de rétention en Italie qui a pris feu. Etant donné qu'il était la seule personne majeure dans ce camp pour jeunes, il a écopé d'une peine de prison de 4 ans, alors que les autres pensionnaires de ce même camp n'ont eu que des peines de 4 mois.» «D'ailleurs, ajoute Tarek Ftiti, je vais vous surprendre: pendant son internement, Anis Amri a pu obtenir un certificat en cuisine et un autre en théâtre. Et c'est pour cela, pour sa bonne conduite durant sa période d'emprisonnement que sa peine a été réduite à 2 ans et neuf mois seulement. Cessons de le diaboliser: Anis Amri n'est pas un criminel.» Pour plus de précision, Tarek Ftiti avance la preuve qu'«Anis Amri, la veille de l'attentat [de Berlin], a appelé sa famille, il a appelé sa mère… Il le fait régulièrement, d'ailleurs. Et quand il peut, quand il obtient un petit boulot, il envoie un petit mandat, quelque chose comme 200 dinars, c'est-à-dire 70 euros, c'est-à-dire une modique somme qu'une personne opérant dans les circuits de la contrebande ou un autre trafic obtiendrait en quelques secondes… Non, ce que je vous décris là n'a aucune espèce de correspondance avec l'image que l'on veut donner d'Anis Amri. Et j'ai vraiment bon espoir qu'il y a confusion, qu'il y a erreur sur la personne, que l'homme recherché dans cet attentat de Berlin n'a rien à voir avec l'Anis Amri que je connais.» Et c'est là que le député de l'UPL interpelle l'Etat tunisien: «Il est du devoir de notre gouvernement de poser ces interrogations, de tenter de dissiper ces doutes et d'exiger des explications. Comment se fait-il, par exemple, que les soupçons sur la personne d'Anis Amri n'aient été évoqués que 3 jours après l'attentat, qu'on ait trouvé ses documents d'identité dans le camion, 3 jours après l'attentat?… C'est là le rôle du ministère des Affaires étrangères. Il faut qu'il fasse quelque chose. Qu'il n'abandonne pas nos enfants ainsi, à un moment où ils ont besoin du soutien de leur pays!…» Le député UPL se garde cependant de se poser la seule question qui vaille et qui détruit tout son argumentaire, du reste trop léger: s'il est vraiment innocent et qu'il possède un alibi solide, pourquoi Anis Amri se cache-t-il toujours? Côté enquête, la police allemande semble détenir des preuves solides sur l'identité de l'auteur de l'attentat, qui a tué 12 personnes et blessé 48 autres – dont 12 dans un état grave : papiers d'identité et empreintes digitales d'Anis Amri retrouvés dans le camion, et épisodes récents de radicalisation et de contacts avec les milieux djihadistes en Allemagne…