Cinq fois candidat malheureux à l'organisation d'une Coupe du monde, Rabat voit un événement sportif submergé par l'actualité immédiate, très politique. Plutôt que de parler d'un enjeu général clairement identifié, Madrid et Rabat se servent de la Coupe du monde comme vitrine pour faire étalage d'inclinations altruistes mais mal venues. Paraphrasons le décret d'André Gide : on ne fait pas de bon sport avec de bons sentiments. Le 5 octobre, l'Espagne et le Portugal ont intégré mercredi l'Ukraine à leur candidature commune pour accueillir la Coupe du monde 2030 de football, alors que Kiev est en pleine guerre, un choix incompréhensible et dénué de toute prospection solide. Pour justifier ce choix, le président de la fédération espagnole (RFEF), Luis Rubiales, a déclaré lors d'une conférence avec ses homologues du Portugal et de l'Ukraine que «la candidature ibérique est désormais européenne.» Et le Maroc ? Pourtant, fin 2018, le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, a proposé au Maroc une candidature commune Maroc/Espagne/Portugal pour organiser la Coupe du monde de football en 2030. «J'ai fait la proposition, d'abord au gouvernement puis au roi Mohammed VI, de lancer une candidature commune pour organiser en 2030 le Mondial entre le Maroc, l'Espagne et le Portugal», a dit Pedro Sánchez, à l'issue d'une audience avec le roi Mohammed «Ce sera la première fois qu'il y aura une candidature entre deux continents, entre l'Europe et l'Afrique. Le roi Mohammed VI a très bien accueilli cette proposition», a ajouté le chef de l'exécutif espagnol. «Nous allons travailler avec le Portugal à la présentation de cette candidature hypothétique qui, je pense, sera très compétitive et nous réjouit beaucoup», a insisté M. Sanchez. Cinq fois candidat malheureux à l'organisation de la compétition (en 1994, 1998, 2006, 2010 et 2026), le Maroc espère devenir le second pays du continent, après l'Afrique du Sud en 2010, à accueillir une Coupe du monde. Pour rappel, le Maroc avait déjà annoncé concourir pour l'édition 2030, qui sera le «Mondial du centenaire», un siècle après la première Coupe du monde. Un mondial Espagne-Portugal-Ukraine plus chimérique que pratique Cette possible co-organisation par trois pays non limitrophes est un défi presque impossible, eu égard la préparation des infrastructures, aux déplacements des supporters et des délégations sportives, sachant que l'Ukraine est plongée dans la guerre depuis l'invasion russe en février. Si les intentions initiales sont louables, choisir un pays ravagé par la guerre pour l'organisation de la plus prestigieuse des compétitions de football n'a aucun sens. L'environnement géographique, politique, sécuritaire et financier a toujours été déterminant et doit l'être dans ce cas aussi. Du point de vue de l'investissement et de la logistique : Kiev est séparé de Madrid de 3 700 km et de Lisbonne de 4 100 km). En attendant le rapport de faisabilité d'une candidature Ukraine-Espagne-Portugal à l'organisation de la Coupe du monde 2030, le football ne doit pas être politisé. Le Maroc a lancé un programme ambitieux de modernisation de ses stades et a mis en œuvre un réaménagement urbain pour préparer des enceintes modernisées et plus confortables pour suivre les joutes internationales. Le royaume a réalisé des investissements structurels c'est l'argument conjoncturel qui doit surtout être brandi pour départager les différents dossiers en lice.