Au Maroc, le nombre de nouveaux cas positifs au coronavirus a enregistré son repli usuel du week-end pour cause de fermeture de laboratoires. Toutefois, le taux de positivité ainsi que le nombre de cas critiques ou sévères continuent d'augmenter (1 048 au lundi 16 novembre). Selon Pr Tarik Sqalli Houssaini, vice-doyen de la faculté de médecine de Fès et professeur au CHU Hassan II, le nombre de cas en réanimation devait augmenter puisque le nombre de cas actifs suit toujours une tendance haussière au Maroc. Le pourcentage des cas graves quasiment stable « C'est le résultat naturel de la progression du nombre de cas enregistrés étant donné que le pourcentage des formes graves reste parfaitement stable et occasionne une létalité de 1,7-1,8% et un taux d'hospitalisation en réanimation de 2,15-2,2% parmi les cas actifs », précise le président de la Société marocaine de néphrologie et chef de service de néphrologie au sein du CHU de Fès. Par ailleurs, le professeur et vice-doyen de la faculté de médecine et de pharmacie de Fès rappelle que le Maroc compte actuellement 1 048 cas critiques, dont 94 cas sous intubation. Ainsi, le taux d'occupation des lits de réanimation dédiés à la Covid-19 est de 38%. Il souligne, dans ce cadre, que les cas sévères s'élevaient à 1 051, dimanche dernier, avec un taux d'occupation de 39,28% des lits de réanimation. « Le Maroc augmente sa capacité de lits de réanimation à chaque fois que le système sanitaire en a besoin. Il s'agit d'une tendance qui a été observée au cours des trois dernières semaines puisque ce taux s'est stabilisé, tout au long de cette période, autour de 36%-38%, alors que le nombre de cas nécessitant une prise en charge en réanimation a progressé de 850 à presque 1 050 », explique-t-il dans une déclaration à Barlamane.com/fr. Toutefois, l'augmentation de la capacité de lits de réanimation fait monter la tension chez le personnel des unités des soins intensifs. S'agissant de l'évolution du taux de létalité au Maroc, Pr Tarik Sqalli Houssaini fait observer qu'il tourne autour de 1,7%-1,8% et tient à souligner qu'il « n'est pas un taux définitif ». « La mortalité de 1,7% représente un taux provisoire, loin d'illustrer la situation, à terme, des patients atteints de la Covid-19 », précise-t-il. Elle ne représente ainsi que la mortalité « à un instant T ». Des disparités régionales en termes d'activité de dépistage En ce qui concerne la capacité de dépistage au Maroc, qui oscille entre 22k-24k en moyenne par jour, le professeur au CHU Hassan II rappelle qu'à l'échelle continentale et planétaire, le Maroc se classe 32e dans le monde et 2e en Afrique, du point de vue du nombre de contaminations, 36e mondialement et 3e en Afrique pour ce qui est du nombre des décès. Il est aussi 34e au niveau international et 2e au plan continental en termes de nombre de tests. Une situation qui paraît assez cohérente par rapport au nombre de la population, mais qui reflète également des disparités régionales concernant le dépistage de la COVID-19 par PCR étant donné que certaines régions manquent de laboratoires de dépistages (qu'ils soient privés ou publics). Les essais cliniques du vaccin vont bon train au Maroc Alors que certains adeptes de la théorie du complot soulignent qu'aucune donnée scientifique relative au vaccin chinois choisi par le Maroc n'a été publiée, Pr Tarik Sqalli Houssaini indique sur sa chronique « En toute objectivité » que les données relatives aux phases 1 et 2 des essais cliniques menés avec le vaccin inactivé de Sinopharm ont été publiées dans le JAMA – Journal of the American Medical Association. « L'éditorial du 13 août 2020 signé Mark J. Mulligan (New York University Langone Vaccine Center) conclut que « ce rapport préliminaire de Xia et coll. fournit d'importants résultats provisoires d'innocuité, de tolérance et de réponse immunitaire pour un vaccin β-propiolactone-inactivé contre la COVID-19. L'article de Xia et al. publié dans le même numéro rapporte les titres des anticorps neutralisants chez les patients ayant reçu le vaccin inactivé et affirme aussi que les effets indésirables les plus courants étaient une douleur au site d'injection, suivie de la fièvre, qui étaient légères et spontanément résolutives. Aucun effet indésirable grave n'a été noté », précise le vice-doyen de la faculté de médecine de Fès. Interrogé sur les principaux résultats de ces publications, le professeur au CHU Hassan II rappelle que « les phases I et II permettent de vérifier l'innocuité du candidat-vaccin chez l'homme et définir la stratégie vaccinale (A quel moment, quelle dose, quelle fréquence adopter ?) qui est mieux susceptible de fonctionner pour réduire le risque de transmission du pathogène ». Dans ce cadre, il note que le vaccin chinois est fabriqué de manière classique, qui a été déjà utilisée, ce qui le rend plus « sûr » puisqu'il utilise le virus inactivé (deux injections). De plus, sa conservation facilitera mieux la logistique en matière de chaîne de froid étant donné que les conditions de conservation ne sont pas astreignantes par rapport aux autres vaccins. En outre, aucun événement grave n'a été signalé depuis son utilisation. A quand le retour à nos anciens modes de vie ? Selon Pr Tarik Sqalli Houssaini, il faudra un mois à partir de la deuxième injection du vaccin pour développer une immunité contre le virus. Il rappelle, d'ailleurs, que le Maroc ne recevra que 10 millions de doses en premier lieu (soit 5 millions de personnes adultes qui seront vaccinées sur une population estimée à 23 millions). « Afin de pouvoir arrêter la transmission du virus responsable du nouveau coronavirus, il faut vacciner 60%-70% de la population pour arriver à une immunité collective. Un retour à la normale en hiver n'est ainsi pas envisageable », conclut-il.