L'élaboration du PLF 2021 est un exercice budgétaire difficile compte tenu du fort dérapage du déficit en 2020 et des objectifs économiques et sociaux ambitieux fixés pour 2021, selon Ahmed Zhani, économiste en recherche macro-économique et taux à CDG Capital. La difficulté dans l'élaboration de la Loi réside dans trois principaux points. Il s'agit du maintien de l'équilibre entre les charges et les recettes courantes comme stipulé dans le cadre de la Loi organique des finances (LOF) de 2015, qui interdit l'endettement pour financer de la partie ordinaire des dépenses et le financement des chantiers sociaux aussi bien l'élargissement de la couverture médicale que la hausse des dépenses en termes de santé et d'éducation. Il est aussi question de consolider le rythme d'accroissement des investissements en vue de relancer l'économie à travers une politique budgétaire contracyclique et restaurer l'équilibre budgétaire via une réduction graduelle du déficit et de l'endettement publics après les niveaux historiquement hauts estimés pour fin 2020. S'agissant des hypothèses d'élaboration du PLF, elles sont, selon le chercheur, optimistes avec une reprise de la croissance en V et une hausse modérée des prix de l'énergie. Et ce, malgré les incertitudes qui entourent le redressement économique et bien que le marché de l'emploi devrait connaitre une légère détérioration à cause de la crise sanitaire. En effet, la reprise aussi bien de l'investissement que de la demande est fortement tributaire du plan de relance économique et son succès. Dans le cadre de cette nouvelle loi, l'économiste souligne que plusieurs réformes fiscales sont proposées visant principalement à protéger l'industrie locale, particulièrement pour certains articles à faible apport technologique, améliorer les recettes de l'Etat compte tenu des circonstances particulières ayant induit une réduction du potentiel d'encaissement sous l'égide du régime actuel. Et ce à travers aussi bien la hausse des taxes sur certains produits de luxe, y compris le Tabac et les boissons alcoolisées, que la suppression de certaines exonérations et l'instauration d'une taxe de solidarité. Il s'agit aussi de l'exonération du cadre fiscale pour les entreprises et établissements publics en vue de faciliter la restructuration du secteur public et l'amélioration de la gouvernance et l'encouragement du recrutement, particulièrement des jeunes diplômés, précise-t-il. Par ailleurs, A. Zhani fait savoir que les répercussions de la pandémie ont fortement déstabilisé la structure des comptes de l'Etat, particulièrement les recettes fiscales ayant connu une baisse drastique comparativement aux niveaux d'avant la pandémie. En effet, face à une poursuite de la hausse tendancielle des dépenses aussi bien ordinaires que d'investissements, les recettes fiscales ont baissé, générant ainsi un déséquilibre entre les ressources et les dépenses ordinaires et la création d'un besoin de financement pour couvrir les investissements. Ainsi, et contrairement au principe instauré par la Loi de Finances organique de 2015, en l'occurrence d'interdire l'endettement pour la couverture de l'accroissement des charges courantes, le recul important des recettes ordinaires à pousser vers le dépassement de cette règle. Parallèlement, les besoins importants en investissement aussi bien de certains secteurs prioritaires en cette période difficile, particulièrement la santé et l'éducation, que pour relancer l'économie à travers une politique budgétaire contracyclique, devrait pousser l'Etat à recourir de plus en plus vers l'endettement. Du côté des recettes, bien que les ressources fiscales soient prévues en légère amélioration pour l'année 2021 de 5,3% comparativement des chiffres de la LFR 2020, principalement les impôts directs avec +21,6% pour la TVA et +5,1% pour la TIC, contre un recul des impôts indirects de -11% pour l'IS et -0,7% pour l'IR, les chiffres sont en forte baisse, comparativement aux Lois de finances d'avant la pandémie, démontrant ainsi, le début d'un cycle de faibles recettes pour le Trésor public. Dans ce cadre, et en vue de combler partiellement ce décalage, l'Etat a intensifié le recours aux recettes non fiscales, qui sont prévues en augmentation de respectivement 12,8% et 90% par rapport à la LFR 2020 et la LF 2020. Cependant, la maîtrise des dépenses reste difficile dans ces circonstances particulières avec un accroissement des charges globales de 2,2% par rapport à la LFR 2020 et 13,9% comparativement à la LF 2020. Cette hausse découle particulièrement de l'augmentation des charges courantes, notamment de fonctionnement de 5,3% et la masse salariale de 2,9%. Pour ce qui est de l'investissement du budget général, les prévisions d'émission au titre de l'exercice 2021 sont en faible recul de -3,8%, en glissement annuel, comparativement à la LFR 2020 et -3,3% par rapport à la LF 2020, pour s'établir à 68,1 MMDH. Toutefois, il est à rappeler que cette légère baisse sera largement compensée par le Fonds Mohammed IV pour l'investissement dont le budget s'élève à 45 MMDH.