Les transferts des MRE font une nouvelle fois preuve de leur résilience. En pleine crise liée à la pandémie de la Covid-19, ils ont pu limiter leur baisse à 3%. Et au-delà des prévisions les plus optimistes, les envois MRE corrigés des variations saisonnières affichent dès le mois de juillet, loin de toute attente, des hausses très surprenantes. Cette évolution pour le moins imprévisible, défie la logique et les calculs de probabilité, car les transferts des MRE dépendent de deux principaux facteurs structurels à savoir la croissance économique mondiale et l'évolution de la population des MRE. Dans ce cas de figure, ces deux facteurs ne peuvent expliquer les dernières évolutions des transferts des MRE, ce qui laisse place à plusieurs hypothèses. Ainsi, les baisses enregistrées par les envois de la diaspora marocaine durant la période allant de mars à mai, pourraient être dues à des comportements spéculatifs des banques étrangères contre le dirham. Pour l'économiste et spécialiste de politique de change, Omar Bakkou, ces banques, qui disposent de comptes en dirhams convertibles, peuvent en effet ne pas transférer les devises collectées auprès des MRE en utilisant les dirhams à leur disposition, cela en anticipant une dépréciation du dirham contre l'euro ou un autre élargissement de la bande de fluctuation. Elles auraient ainsi procédé à la cession de ces devises au mois de juin, confie-t-il. D'autre part, Bakkou explique la reprise des transferts des MRE à partir du mois de juillet par la solidarité sans faille que les MRE ont toujours manifestée à l'égard de leurs familles au Maroc, surtout dans le monde rural et par temps de sécheresse. Ce qui laisse entendre que les filets sociaux en Europe auraient permis, malgré la crise, aux MRE de maintenir leurs revenus. L'évolution observée par les transferts des MRE en pleine crise de Covid-19 rassure Bank Al-Maghrib. Celui-ci s'attend en effet à une baisse des envois des MRE limitée à 5% en 2020 avant une reprise de 2,4% à 63 milliards de dirhams en 2021. Sur ce point, Bakkou note que l'optimisme de la banque centrale du Maroc se fonde sur deux principaux facteurs, en l'occurrence la résilience constatée dans le passé des transferts des MRE, et les perspectives d'évolution de l'économie mondiale qui laisse entrevoir une croissance importante après la disparition ou l'atténuation de la gravité de la crise sanitaire. Abordant les déterminants macroéconomiques et microéconomiques des transferts des MRE, Bakkou a cité l'évolution de l'effectif de la communauté marocaine établie à l'étranger, la conjoncture économique mondiale, particulièrement en Europe, continent où se concentre une grande partie de la diaspora marocaine, la bancarisation des MRE, et le coût des transferts (commissions bancaires) qui peut être un levier important pour drainer les transferts de fonds notamment en période de crise. Le Maroc compte parmi les pays qui bénéficient le plus des transferts de la diaspora. Bon nombre de raisons sous-tendent cela, notamment l'importance de la communauté marocaine établie à l'étranger, la proximité géographique entre le Maroc et les principaux pays d'accueil, ainsi que les politiques mises en place par les autorités et qui participent au renforcement de l'attachement des Marocains du monde à leur pays d'origine.