L'ensemble des actions urbaines publiques ces dernières années renvoie d'abord au rôle de l'État bâtisseur et à la mise en œuvre des mécanismes technico-financiers, conjuguée à l'activité des acteurs privés. Dans un contexte de renouveau imprégnant l'action urbaine, une nouvelle culture marque la façonnement des villes marocaines, qui est un tournant majeur dans la façon de concevoir, produire et gérer les espaces urbains dans le pays. Les décideurs locaux encouragent l'arrivée des capitaux, vecteurs de métropolisation et pourvoyeurs du tourisme. «Si le Maroc a franchi des étapes importantes dans la dématérialisation de certains services publics (impôts, cadastre, marchés publics, etc.), en revanche, d'autres secteurs peinent à suivre la même voie au moment où l'actuelle crise sanitaire de la Covid-19 vient rappeler l'urgence de la structuration de l'écosystème digital et la promotion de l'administration numérique. Ce sont les missions premières de l'Agence de développement du digital, créée en 2017, dans l'objectif de mettre en œuvre la stratégie de l'Etat en matière de développement de l'administration en ligne et de promouvoir la diffusion des outils numériques» a affirmé l'urbaniste-chercheur Mostafa Kheireddine. Processus incontournable de l'urbanisme numérique, ajoute M. Kheireddine, la dématérialisation en urbanisme porte essentiellement sur les autorisations de construire, la numérisation des documents et la mise en place de géoportails et plates-formes participatives (enquêtes publiques, élaboration des documents d'urbanisme, co-construction des projets urbains, etc.). «Au Maroc, les premières expériences de l'urbanisme numérique remontent au milieu des années 1990, avec la numérisation de la deuxième génération des schémas directeurs d'aménagement urbain, la mise en place d'un Système d'information géographique (SIG) interactif des documents d'urbanisme de villes pilotes et d'un observatoire des indicateurs urbains. Cependant, les ambitions de mise en œuvre ont été ponctuées par des phases de réalisation creuses, et ce faute d'une gouvernance unifiée et d'un portage stratégique et opérationnel et, surtout, en raison des choix du contexte social et politique de l'époque» explique M. Kheireddine. L'urbanisme numérique consacré par la réglementation Avec l'adoption du règlement général de construction en 2013 (Décret n° 2-13-424), fixant la forme et les conditions de délivrance des autorisations en urbanisme, «la dématérialisation acquiert sa portée juridique (art.47) par une injonction aux acteurs concernés de mettre en place des bases de données numériques interactives communes (art. 48). Toutefois, sans compter sur la faible adhésion des acteurs locaux. Il a fallu, donc, un portage au niveau de la Direction générale des collectivités locales (DGCL) pour embarquer les acteurs qui évoluent dans les clusters de l'urbanisme sur la voie du numérique. Conforté par le décret n°2-18-475 du 12 juin 2019, instituant la dématérialisation des autorisations d'urbanisme (art.53) et les modalités de sa mise en œuvre (art.54), le déploiement de la plate-forme rokhas.ma est synonyme d'un aggiornamento de l'heure de l'urbanisme numérique après plusieurs tentatives non entreprenantes» a-t-il ajouté. Le Géoportail national de l'urbanisme : la pièce manquante à l'écosystème Le développement de l'économie numérique et l'essor des technologies de l'information et de la communication (TIC) sont élémentaires pour déclencher la dynamique des territoires. L'aménagement numérique urbain doit se transformer en une réalité concrète. «Le nouveau dispositif juridique rend désormais incontournable l'accès en ligne aux documents d'urbanisme» écrit M. Kheireddine. Des pistes à baliser Parmi les visées poursuivies par les collectivités territoriales, le développement économique est devenu un objectif central. Les TIC, renforcent les stratégies territoriales spécifiques dans les politiques d'aménagement ou de développement local. Trois dimensions sont ainsi aujourd'hui prises en considération dans l'analyse des territoires numériques et de la nature de l'impact des TIC sur le développement : les infrastructures, les services et les usages. Ces trois volets, interdépendants, doivent être appréhendés pour aborder le territoire numérique et la nature du développement local qu'il propose. Les services, en particulier les services d'e-administration, développés par les collectivités à destination des acteurs publics; constituent un facteur clef du développement numérique des territoires, un facteur de leur attractivité. «L'urbanisme numérique doit servir à construire la ville de demain. La transition en cours vers un nouveau modèle de développement représente une opportunité de faire du numérique (plates-formes et services en ligne) un levier pour l'amélioration de la qualité de vie, l'attractivité territoriale et la création de la valeur économique» conclut M. Kheireddine.