Incapable de fournir des preuves, Amnesty s'est engagée dans un bourbier politique qui risque d'entacher sa crédibilité. L'approche d'Amnesty International nous rappelle durement les doubles standards qui sont responsables de l'érosion de la position morale des droits humains universels. Des critiques, dont les rédacteurs en chef de The Economist et du Wall Street Journal, ont également condamné la méthodologie hautement politisée d'Amnesty. Cela tourne en dérision l'engagement de cette organisation à « faire face à toutes les violations des droits de l'homme, partout et en toutes circonstances ». Le Maroc attend toujours qu'Amnesty International fournisse aux autorités des preuves de ses accusations d'avoir piraté le téléphone d'un journaliste. Mais Amnesty International tourne autour du pot. Le gouvernement marocain a adressé une seule demande à AI: apportez la preuve de vos accusations. Entre-temps, l'organisation qui croule sous les scandales est tiraillée entre des considérations sémantiques et des rappels biaisés du «bilan» du Maroc en matière de droits de l'homme au lieu de fournir les preuves matérielles tant attendues. La demande unique du Maroc est à la fois rationnelle et logique, alors qu'Amnesty démontre, jour après jour, qu'il n'a manifestement aucune preuve de l'accusation qu'il a portée contre Rabat. Ses accusations ont néanmoins servi de base à des reportages dans pas moins de 17 médias internationaux. La demande insistante des autorités marocaines a été exacerbée le 10 juillet, lorsque la secrétaire générale par intérim d'Amnesty, Julie Verhaar, a donné un coup de pied dans les hautes herbes dans sa réponse à une lettre au chef du gouvernement Saad Dine Otmani. En contrepartie, M. Otmani a déclaré à l'agence de presse MAP qu »‘au sein du gouvernement marocain, nous insistons toujours pour nous envoyer une copie du rapport médico-légal adopté pour répondre aux accusations non fondées ou le rendre public ». Dans le fond, la situation a commencé à ressembler à un dialogue de sourds. Et le camp qui prétend ne pas entendre est, en effet, Amnesty International. Pour comprendre les tenants et aboutissants de cet imbroglio, il faut remonter au 22 juin, date de la publication du fameux «rapport» dans lequel Amnesty International accusait le Maroc d'espionnage sur le téléphone portable du journaliste Omar Radi. Le 22 juin, AI a indiqué sur son site Web avoir découvert que le téléphone de Radi était infecté par Pegasus, un puissant système d'espionnage conçu par la société israélienne NSO Group. Il a affirmé être parvenu à la conclusion après avoir examiné le téléphone par un expert. AI a fait valoir que le logiciel espion permet d'accéder à toutes les données enregistrées sur le téléphone et est même capable d'activer sa caméra et son microphone. Le texte d'Amnesty International est long, très long, mais il n'a pas fourni l'élément le plus important: des preuves convaincantes. Les personnes qui ont écrit le texte l'ont appelé un rapport, qui était censé refléter une approche médico-légale de la question mais, en fait, ce n'était qu'un discours. Dans sa présentation, Amnesty a tenté d'établir deux faits, mais en vain. Le premier fait, qui ne concernait pas le Maroc, est que le téléphone portable de Radi était équipé du logiciel espion Pegasus. Le deuxième fait allégué est que l'État marocain était à l'origine de l'opération d'espionnage. Mais à aucun moment AI ou son laboratoire (Security Lab), à qui elle a confié l'analyse du téléphone portable, n'ont pu prouver cette accusation. Pour porter une accusation aussi grave contre un État, il faut encore apporter des preuves matérielles irréfutables. Sur ce point précis, le «rapport» d'Amnesty n'a pas misérablement transformé les préjugés en éléments de preuve clairs. Ce «rapport», avec un titre accrocheur, un journaliste marocain ciblé par des attaques par injection de réseau utilisant les outils du groupe NSO, a été utilisé pour la campagne médiatique ciblant le Maroc. Pour s'assurer que son accusation ait un impact international, Amnesty a confié le rapport, avant sa publication, aux partenaires de Forbidden Stories. Alors que pour d'autres affaires, comme «Green Blood», les journalistes des partenaires médiatiques de Forbidden Stories mènent des enquêtes, dans ce cas, c'est Amnesty qui a fourni le matériel aux médias internationaux, dont le rôle n'a pas dépassé celui d'un simple cas de raisonnement. Alors que Forbidden Stories s'est jusqu'à présent intéressé à des histoires inachevées de journalistes, dont certains ont été assassinés pour les empêcher de poursuivre leurs enquêtes, Radi est bel et bien en vie. Des journaux aussi prestigieux que The Guardian, The Washington Post, El Pais et Le Monde ont pris les accusations d'Amnesty au pied de la lettre, sans se donner la peine de procéder aux vérifications nécessaires. En effet, aucun de ces journaux n'a contacté les autorités marocaines pour connaître leur position. Quant à Amnesty, qui prétend avoir contacté les autorités marocaines pour demander un commentaire sur le contenu de son «rapport», sa soi-disant correspondance en dit long sur le manque de sérieux et la désinvolture avec laquelle la question a été abordée. Les autorités marocaines disent qu'elles n'ont jamais été contactées par Amnesty pour commenter l'accusation à laquelle elles sont confrontées. Amnesty affirme avoir contacté le gouvernement marocain, qui n'a pas donné suite. Pour prouver sa bonne foi, Amnesty a même divulgué une correspondance avec le bureau du Premier ministre à Al-Araby Al-Jadeed, un média panarabe basé à Londres. Après la publication du rapport d'Amnesty et le battage médiatique des histoires interdites, les autorités marocaines ont convoqué Sektaoui, le dirigeant d'Amnesty au Maroc, pour l'informer de leur surprise face aux allégations de l'ONG et que le gouvernement marocain avait exigé des preuves matérielles de ses accusations. Le gouvernement marocain a ensuite publié le 2 juillet une déclaration officielle demandant à Amnesty de fournir publiquement des preuves matérielles de ses accusations. M. Otmani a également informé Verhaar de la position du gouvernement. Cependant, la réponse est venue le 3 juillet de Heba Morayef, directrice régionale d'Amnesty, qui n'a fourni aucune preuve matérielle mais a publié un communiqué de presse inhabituellement virulent, révélant l'amertume de l'ONG envers le pays d'Afrique du Nord. Dans cette déclaration, dont le langage est à des années-lumière de ce que vous attendez des défenseurs des droits humains, Morayef a dénoncé «une intensification de la répression au Maroc». Elle a déclaré que «un grand nombre de militants des droits de l'homme, de journalistes indépendants et de manifestants étaient actuellement emprisonnés et les autorités profitent de la pandémie de COVID-19 au cours de ces derniers mois pour poursuivre d'autres voix critiques». La déclaration de Morayef pourrait avoir été un signe d'embarras d'Amnesty en raison des voix montantes demandant des preuves que le Maroc possède le logiciel espion «Pegasus». Amnesty s'est mise dans une position délicate. Il est non seulement censé fournir des preuves contre l'État marocain, mais aussi aux partenaires de Forbbiden Stories. Dans l'ensemble, Amnesty a déchargé une rafale humide dans les médias internationaux. Le 9 juillet, Verhaar a finalement écrit à M. Otmani. Selon certaines sources crédibles, elle a fait référence à la convocation du représentant d'Amnesty au Maroc ainsi qu'à la réponse du bureau régional de l'ONG, mais n'a pas répondu à la déclaration ferme de Morayef le 4 juillet. Verhaar a indiqué qu'elle était ouverte au dialogue et pour expliquer la méthodologie d'Amnesty aux responsables marocains. Mais l'État marocain, comme l'a annoncé le Premier ministre dans sa déclaration au MAP, ne demande pas de cours sur la méthodologie mise en œuvre par Amnesty dans ses recherches, mais demande carrément des preuves. Le Maroc est ouvert au dialogue avec Amnesty International, mais à condition que cette ONG apporte rapidement les preuves matérielles de ses accusations, qui ont servi de base à une campagne médiatique mondiale contre le Royaume.