Il s'agit des affrontements parmi les plus violents depuis le début du mouvement de contestation anticorruption, qui dure depuis trois mois. Des jets de pierres, de feux d'artifice, de panneaux de signalisation et de pots de fleurs du côté des manifestants ; des lacrymogènes et des canons à eau du côté de la police antiémeute. A Beyrouth, le quartier du Parlement s'est dissipé dans un nuage de gaz, samedi 18 janvier, lors d'affrontements parmi les plus violents depuis le début du mouvement de contestation anticorruption, qui dure depuis trois mois. Près de 400 personnes ont été blessées, selon les secouristes. Les violences ont commencé devant l'une des principales entrées du Parlement, lorsque des contestataires s'en sont pris aux membres de la police antiémeute, stationnés derrière des barricades et des barbelés. Les manifestants, certains au visage masqué, ont lancé différents projectiles, et quelques-uns ont tenté de franchir les barbelés. La police a alors violemment répliqué, faisant de nombreux blessés. 377 personnes ont été soignées sur place ou transportées vers des hôpitaux, selon les bilans de la Croix rouge libanaise et de la défense civile. Les heurts se sont poursuivis en début de soirée. Retranchés dans les rues aux alentours du Parlement, les manifestants ont continué à viser les forces de l'ordre. Des inconnus ont mis le feu aux tentes dressées par les contestataires depuis le début du mouvement près de la place des Martyrs, au centre-ville de Beyrouth. Une manifestation était initialement prévue samedi près du Parlement, vers lequel devaient converger plusieurs marches parties depuis différents points de la capitale. Mais la situation a dégénéré avant l'arrivée des groupes de protestataires. De part et d'autre de l'artère menant à l'entrée du Parlement, des vitres de panneaux publicitaires ont été brisées, qui a fait état de cas d'évanouissement parmi la foule sous l'effet des tirs de gaz lacrymogène. Les ONG Amnesty International et Human Rights Watch ont déploré des «arrestations arbitraires» et un «niveau inacceptable de violence» exercée à l'égard des manifestants. Dans un communiqué sur Twitter, les forces de sécurité intérieure (FSI) ont déploré des actes «violents» appelant les «manifestants pacifiques à quitter les lieux urgemment pour leur propre sécurité». Sur Twitter également, le président Michel Aoun a appelé les services de sécurité à «garantir la sécurité des manifestants pacifiques, empêcher les actes de vandalisme et préserver les biens publics et privés». Ces derniers jours, les protestataires ont ciblé les banques, accusées de complicité avec le pouvoir, attaquant plusieurs branches dans le quartier de Hamra dans la capitale. Des dizaines de personnes ont été arrêtées mardi et mercredi puis relâchés. La Croix-Rouge libanaise avait déjà fait état de plusieurs dizaines de blessées durant les deux nuits de violences. La contestation réclame depuis le début du mouvement un gouvernement formé de technocrates et de personnalités indépendantes du sérail politique traditionnel. Mais les tractations traînent en longueur depuis la nomination le 19 décembre d'un nouveau premier ministre, sur fond de divergences sur le partage des portefeuilles au sein même des partis politiques ayant appuyé sa nomination, ce qui a attisé la colère de la rue. Face à l'impasse, la contestation a connu un regain cette semaine après une période d'essoufflement. La colère a été exacerbée par une détérioration rapide des conditions de vie et des restrictions draconiennes imposées aux retraits par les banques. «Je suis là parce qu'après quatre-vingt-dix jours dans la rue, ils continuent de se disputer les parts [du gâteau] au sein du gouvernement sans se soucier» du peuple, a déploré Maya, une manifestante de 23 ans. «La colère populaire est désormais la solution, a-t-elle martelé.