Driss Lachgar estime que le PJD a pris ses distances avec les départements qui présentent des difficultés majeures et qui mettent généralement le gouvernement en confrontation directe avec les citoyens. ALM : Quelle lecture faites-vous de la structure du nouveau gouvernement? Driss Lachgar: Certes, nous n'allons nous prononcer sur le degré de respect des promesses du gouvernement qu'après la présentation de la déclaration gouvernementale devant le Parlement. Mais d'après nos premières impressions, nous estimons que la composition du nouveau gouvernement est altérée, notamment en ce qui concerne la dénomination des portefeuilles. En plus du chef de gouvernement, nous avons des ministres et des ministres délégués, alors que l'article 87 de la nouvelle Constitution dispose que le gouvernement se compose du «chef de gouvernement et des ministres, et peut comprendre aussi des secrétaires d'Etat». Il s'agit également d'un gouvernement conservateur s'agissant du référentiel de la majorité écrasante de ses composantes. L'aspect conservateur se traduit également par la faiblesse de la représentativité des femmes. Il s'agit d'un cabinet «machiste». A l'heure où la nouvelle Constitution met l'accent sur le renforcement de la place des femmes au niveau des instances politiques en perspective de la parité, on se trouve avec une seule femme au gouvernement. A rappeler que depuis les années 90 nous avons toujours eu environ 20% de femmes au cabinet. Que dites-vous à propos de la répartition des portefeuilles entre les alliés au gouvernement ? Il est clair que le gouvernement ne traduit pas les résultats de l'opération électorale du 25 novembre à tel point qu'on commence à se poser des questions à propos de l'utilité des élections. Les Marocains qui ont voté massivement pour le Parti de la justice et du développement (PJD) portent l'espoir de voir se concrétiser son programme électoral. L'élément attirant du programme du PJD c'est essentiellement le volet social, à savoir l'emploi, l'habitat, l'enseignement, la lutte contre la pauvreté et la santé. C'est grâce aux promesses du PJD concernant ces secteurs vitaux pour les citoyens qu'il a réussi à faire le plein des voix. Et pourtant, au moment de la répartition des portefeuilles, le PJD n'a hérité d'aucun de ces secteurs ministériels. Par exemple, le PPS qui participe au gouvernement depuis 1998 s'est vu octroyé les secteurs de l'habitat, l'emploi et la santé. On s'inscrit ainsi dans la continuité. Alors que les Marocains qui ont voté pour le parti vainqueur aspiraient au changement. Quelles seront les répercussions de cette situation? Il paraît que le PJD a pris ses distances avec les départements qui présentent des difficultés majeures et qui mettent généralement le gouvernement en confrontation directe avec les citoyens. Les gens commencent à se demander si réellement c'est le PJD qui a remporté les élections. Le PJD ne pourra nullement se soustraire à sa responsabilité. Les protestations au Maroc n'ont plus qu'un aspect sectoriel. Les Marocains protesteront désormais contre le rendement du gouvernement dans sa globalité en cas de dysfonctionnement. Comment l'USFP se prépare-t-il aux prochaines échéances ? L'USFP compte pratiquer une opposition constructive et citoyenne. Nous allons assumer pleinement notre rôle en tant qu'opposition à la Chambre des représentants. Aujourd'hui, nous attendons la présentation de la déclaration gouvernementale. Nous espérons que l'élaboration de cette déclaration ne prendra pas le même temps que le processus de formation du gouvernement. Il y a des institutions qui doivent être mises en marche.