Environ trois heures après la clôture des bureaux de vote, on ne parle chez les islamistes que «des violations graves enregistrées au cours du scrutin» et de ce fait, mettent en cause sa transparence et son honnêteté. On est le vendredi 25 novembre. L'horloge indique 19h, l'heure de clôture des bureaux de vote. Le siège du Parti de la justice et du développement (PJD) au quartier «Les Orangers» à Rabat connaît un mouvement inhabituel. Des membres dirigeants du parti islamiste, des militants et des sympathisants sont mobilisés pour suivre de près les premiers résultats du scrutin. Tout un service de communication bien équipé en outils informatiques se charge de la réception et du traitement des données provisoires recueillies auprès des 38.000 bureaux de vote répartis sur l'ensemble du territoire national. Dans une pièce à côté, les membres dirigeants du parti islamiste, notamment Abdelilah Benkirane, Mustapha Ramid, Abdellah Baha, Lahcen Daoudi, Jamaâ Moâtassim et d'autres sont en veille pour analyser et discuter des données reçues au fur et à mesure. Et au niveau du hall du siège des islamistes, c'est Saâd-Eddine El Othmani qui est chargé de communiquer avec les médias. De plus, quelques sympathisants du parti sont installés devant un grand écran diffusant les dernières nouvelles du scrutin. Environ trois heures après la clôture des bureaux de vote, on ne parle chez les islamistes que «des violations graves enregistrées au cours du scrutin» et de ce fait, mettent en cause sa transparence et son honnêteté. «Nous avons enregistré beaucoup de violations lors de ce scrutin. Il y a eu un usage massif de l'argent au niveau de plusieurs circonscriptions. Nous avons passé toute la journée à essayer de traquer les fraudeurs», a souligné Saâd-Eddine El Othmani, président du conseil national du PJD. Aussi, Mustapha Khalfi, membre du PJD et directeur de publication d'«Attajdid», avait souligné auparavant au niveau de l'hôtel Hilton, là où était organisée la soirée électorale, que “le PJD ne va pas approuver des élections entachées de fraude”. «Nous avons constaté une attitude de neutralité passive de la part du ministère de l'intérieur. Nous avons enregistré des violations inquiétantes qui risquent de porter gravement atteinte à l'honnêteté du scrutin», avait déclaré M. Khalfi vers 20h. Ce n'est qu'environ 23h que les dirigeants du parti islamiste commencent à atténuer leur discours dénonciateur de la fraude électorale. Les écrans installés sur place diffusent les premiers résultats faisant état d'un raz-de-marée des islamistes au niveau de plusieurs circonscriptions. A Casablanca, Khouribga, Salé, Marrakech, Tanger, Mohammedia, le PJD est largement en avance par rapport à ses concurrents. Ainsi, dès réception des premiers résultats, la tendance est claire et les islamistes commencent à se féliciter de la grande victoire. Les camarades de Abdelilah Benkirane n'ont plus de doute quant à leur exploit. «Nous aurons au moins 80 sièges», se félicitent à haute voix les sympathisants du parti. Vers minuit, les dirigeants du parti commencent à quitter le siège après une longue journée. Le lendemain, la victoire du PJD est rendue officielle par la déclaration faite par le ministre de l'intérieur Taib Cherkaoui vers 14h. Le parti remporte, selon les résultats partiels, excluant 17 sièges ainsi que la liste nationale, 80 sièges. Dès l'annonce de ce résultat, c'est la grande joie au niveau du siège du parti. Dans un climat festif, les sympathisants du PJD se laissent emporter par les chansons et par la danse. Peu de temps après, les membres dirigeants du parti, dont M. Benkirane, rejoignent le siège, ils sont accueillis en héros.