Le président-directeur général du Groupe Omnium Nord Africain (ONA), Mouatassim Belghazi, passe en revue le bilan et les nouvelles orientations du Groupe. ALM : L'année 2008 et le premier semestre 2009 ont été marqués par un contexte international difficile. Comment le Groupe ONA s'est-il comporté durant cette période ? Mouatassim Belghazi : Avant de focaliser sur les réalisations du Groupe ONA, permettez-moi de rappeler que dans cet environnement, qui a été particulièrement éprouvant pour de nombreuses économies, le Maroc a vu son PIB non agricole progresser d'environ 2% au premier semestre 2009. Dans ce contexte, le Groupe ONA, qui tire une bonne partie de sa croissance de la consommation intérieure, a certes connu un ralentissement de son rythme de développement. Néanmoins, il réalise des performances honorables avec un chiffre d'affaires et un excèdent brut d'exploitation qui progressent respectivement de 2,6 et 4,4%, en ligne avec nos budgets. Avez-vous procédé à un recadrage de votre stratégie suite aux développements économiques qu'a connus la scène internationale ? Les travaux liés au recadrage stratégique que nous avons opéré fin 2008 intégraient l'analyse de la résilience de notre modèle économique face à des chocs extérieurs. Nos réalisations au premier semestre 2009 prouvent que nous avons fait les bons choix en termes de positionnement et de complémentarité de nos métiers. Ainsi, les récents événements, préoccupants certes, ont bien au contraire renforcé notre conviction quant au bien-fondé de notre vision stratégique. Néanmoins, au sein de certains métiers, nous avons jugé utile d'approfondir notre démarche d'immunisation de notre portefeuille d'activités. C'est le cas du secteur des mines qui orientera dorénavant son développement sur les métaux précieux, le cobalt et le cuivre, qui optimisent au mieux le savoir-faire et les ressources de Managem dans un contexte de cours très volatiles. C'est le cas de l'immobilier qui s'est engagé résolument à rééquilibrer son portefeuille en faveur de l'immobilier résidentiel moyen gamme. C'est également le cas de Wana qui, grâce à la nouvelle configuration de son tour de table et l'obtention de la licence 2G, dispose des atouts nécessaires pour devenir un opérateur de référence. Ces orientations sont soutenues par un renforcement des procédures de veille et de contrôle afin de prévenir tout dérapage de certains postes sensibles (stocks, clients, trésorerie, change, etc). Quelles prévisions faites-vous pour l'année 2009 ? Je reste vigilant mais néanmoins serein quant à notre capacité de poursuivre notre développement et respecter nos budgets au titre de l'exercice 2009. Aussi devrions-nous clôturer l'exercice avec des performances en ligne avec celles réalisées au cours du 1er semestre. Vous êtes donc optimiste quant au maintien de la croissance au sein du Groupe ? Absolument. Nos résultats au premier semestre traduisent notre capacité et notre volonté de poursuivre un développement rentable et pérenne de nos activités. Parmi les recadrages que vous avez opérés figure le changement du tour de table de Wana. Avec l'arrivée de Zain et Ajial, comment Wana compte-t-elle renforcer ses parts de marché et équilibrer ses finances ? Sur les activités Fixe et Internet, Wana dispose d'ores et déjà de parts de marché enviables (respectivement 60 et 31%). Au premier semestre 2009, elle a été le premier contributeur au chiffre d'affaires et au résultat d'exploitation consolidés du groupe. Son parc clientèle a quasiment doublé en un an et nous avons l'ambition de donner à cet élan plus d'ampleur avec le Mobile. Par ailleurs, l'augmentation de capital qui a accompagné l'arrivée de nos partenaires Zain et Ajial a consolidé les fonds propres de la société de 2,85 milliards de dirhams et par la même assaini sa situation financière. Aussi, si les récentes performances opérationnelles se maintiennent, nous escomptons un équilibre à l'horizon 2011 et la confirmation définitive d'une croissance profitable et pérenne pour notre filiale télécoms. Les observateurs s'interrogent sur vos intentions concernant le secteur de l'énergie. Vous semblez hésiter à vous lancer dans ce domaine. Est-ce vrai? Absolument pas. L'énergie est aujourd'hui un métier à part entière pour notre Groupe. Notre filiale Naréva est aujourd'hui pourvue de ressources humaines de grande qualité et de partenaires de renom. Nous avons ainsi soumissionné, en partenariat avec International Power, à l'appel d'offres relatif au parc éolien de Tarfaya (300 MW) dont nous attendons le résultat incessamment. Nous comptons également soumissionner au projet de la centrale à charbon de Safi (1320 MW) dont la date de soumission a été reportée au 31 octobre 2009. Enfin, nous sommes en phase de finalisation des études de qualification et de rédaction des contrats pour des projets éoliens destinés à l'offre EnergiPro. L'un des secteurs phares des activités du Groupe est l'agro-alimentaire. Comment l'ONA compte-t-elle accompagner et profiter de la dynamique enclenchée par le Plan Maroc Vert lancé par le gouvernement? Le Groupe ONA est résolu à soutenir ce plan. Dans cette perspective, de nombreux projets d'envergure sont actuellement à l'étude ou en chantier au sein de nos filiales agroalimentaires. Cette dynamique qui vise une intégration en amont, ambitionne de renforcer la sécurité de notre approvisionnement en matières premières (lait, betterave, olive, etc). Vos filiales vont de plus en plus à la recherche de marchés en Afrique. Cette politique commence-t-elle à donner ses fruits? En effet, à l'image des nombreuses concessions remportées par Managem dans les mines et les nouveaux territoires concédés à Optorg dans la distribution automobile et d'équipement ; et ce dans plusieurs pays d'Afrique. En témoignent également les récentes acquisitions et ouvertures de succursales d'Attijariwafa bank. Aujourd'hui, le Groupe est présent dans plus de 23 pays et réalise près de 20% de son chiffre d'affaires à l'international. Par ailleurs, de nombreuses filiales œuvrent activement dans ce sens, je pense en particulier aux filiales agro-industrielles et à la GMS. On reproche, dans certains milieux, au Groupe ONA de vouloir s'assurer un monopole de fait sur certains secteurs. Quelle est votre réaction quand vous entendez ce genre d'accusations ? Je me dis que les hommes et les femmes de notre Groupe qui font preuve au quotidien d'une éthique et d'une mobilisation admirables ne méritent pas ces reproches. Nous avons tout au long de notre histoire eu le courage d'investir dans des secteurs qui de prime abord n'étaient pas faciles : qui croyait en la fusion Attijari-Wafabank, combien nous ont reproché cette opération en la qualifiant de dilutive ? Qui a osé se lancer dans la GMS, quand la rentabilité n'était pas évidente ? Qui a soumissionné pour la reprise des sucreries, après un premier appel d'offres infructueux ? Beaucoup là encore se sont montrés sceptiques quant à la pertinence du rachat par Cosumar des sucreries, jugeant le prix payé trop élevé. Aujourd'hui on ne peut que s'en féliciter. Il est facile, a posteriori, de juger nos positions de leader dans nos marchés mais chacune a été le résultat d'un pari risqué au départ et d'un engagement au quotidien de nos équipes. Des rumeurs vous ont donné partant de la présidence du Groupe. Qu'en est-il ? Le Conseil d'administration s'est exprimé sur cette question à l'occasion du communiqué de presse relatif aux résultats semestriels. Propos recueillis par Omar Dahbi et Atika Haimoud