Le président Jacques Chirac a annoncé, comme prévu, qu'il ne briguerait pas un troisième mandat, tournant la page de plus de 40 ans de vie politique, dont douze à la tête du pays. Ému et sobre, le président Jacques Chirac, 74 ans, a annoncé, comme prévu, dimanche 11 mars, qu'il ne briguerait pas un troisième mandat. «Au terme du mandat que vous m'avez confié, le moment sera venu pour moi de vous servir autrement. Je ne solliciterai pas vos suffrages pour un nouveau mandat», a-t-il déclaré dans un discours télévisé solennel. Avant la déclaration politique-politicienne, le Chef d'Etat a tenu à faire une déclaration d'amour : «pas un instant, vous n'avez cessé d'habiter mon cœur et mon esprit. Pas une minute, je n'ai cessé d'agir pour servir cette France magnifique. Cette France que j'aime autant que je vous aime». Chabadabada pour les uns, chapeau pour les autres. «Le Midi Libre» a repris hier en Une cette phrase étonnante de Jacques Chirac : «je vous aime». «Chirac, derniers feux plein d'amour», a, pour sa part, écrit le journal socialiste « Libération». Le quotidien «France-Soir», lui, a décodé le testament politique du président : «Chirac a dit : aimez-vous !». Même si son successeur à déjà un programme, Jacques Chirac a tenu à lui en faire un : guerre à tout extrémisme et racisme, égalité des chances, solidarité, Europe, écologie… Et surtout ne pas brader le modèle français. «Ne composez jamais avec l'extrémisme, le racisme, l'antisémitisme ou le rejet de l'autre. Dans notre Histoire, l'extrémisme a déjà failli nous conduire à l'abîme. C'est un poison. Il divise. Il pervertit, il détruit», a lancé le président, qui fut élu en 2002 avec plus de 82% des voix face au président du Front national, Jean-Marie Le Pen. «Tout dans l'âme de la France dit non à l'extrémisme», a-t-il insisté, appelant ses compatriotes à se battre pour l'«unité» et la «cohésion», chez eux et dans le monde. «Face au risque d'un choc des civilisations, face à la montée des extrémismes notamment religieux, la France doit défendre la tolérance, le dialogue et le respect entre les hommes et entre les cultures», a souligné le président Chirac. Plaidant pour le «développement pour tous», Jacques Chirac a par ailleurs invité les Français à prendre en considération la «révolution écologique qui s'engage». «Avec sa recherche, avec ses entreprises, avec son agriculture, avec l'avance qu'elle a prise dans le nucléaire et les choix résolus qu'elle a faits dans les énergies renouvelables, la France a tous les atouts pour relever ce défi majeur du XXIe siècle», a-t-il assuré. Le chef de l'Etat est revenu sur l'un des principaux échecs de son second mandat : le «non» des Français au traité constitutionnel européen lors du référendum du 29 mai 2005. «Il est vital de poursuivre la construction européenne. Les nationalismes qui ont fait tant de mal à notre continent peuvent renaître à tout moment», a-t-il rappelé. «Et ce n'est pas seuls que nous ferons face aux bouleversements économiques du monde». En revanche, pas un mot sur Nicolas Sarkozy, cela viendra. Le président Chirac a, en effet, indiqué qu'il s'exprimerait plus tard sur ses «choix personnels» pour l'élection d'avril-mai, ne faisant aucune référence au candidat UMP. L'annonce de son retrait était largement attendue puisque, selon les enquêtes d'opinion, plus des trois quarts des Français ne souhaitaient pas que Jacques Chirac se représente. Sarkozy ne se considère pas comme l'héritier de Chirac Nicolas Sarkozy s'est dit lundi «touché» par la déclaration la veille du président Jacques Chirac, mais a précisé qu'il ne se considérait pas comme son «héritier». «C'était un moment émouvant. Jacques Chirac a été digne, sincère», a dit M. Sarkozy sur la radio France Inter, en décrivant le président français comme un homme «complexe et pudique». «Jacques Chirac est sans doute l'homme le plus complexe et le plus pudique qu'il m'ait été donné de rencontrer dans la vie politique. C'est un homme qui ne correspond absolument pas à l'image qu'on en donne», a estimé le candidat UMP. Interrogé pour savoir s'il se considérait comme l'héritier politique de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy a répondu : «au fond, je ne me suis jamais senti l'héritier de personne. La France, c'est la République, ce n'est pas un héritage».