Mohamed, fils d'un trafiquant de drogue, a subtilisé la somme de deux mille dirhams à Rachid, un jeune ferrailleur. Pour se venger, ce dernier a rossé le neveu de son voleur, déclenchant ainsi une vendetta fatale. Les penchants criminels de Mohamed remonteraient-ils à sa naissance ? La réponse à une telle question nécessiterait un examen psychiatrique approfondi. Toutefois, quasiment tous les habitants du douar Moumnia, à Hay Mohammadi, Casablanca, en sont persuadés. Aussi loin qu'ils s'en souviennent, ils ont de Mohamed l'image d'un garçon violent, toujours prêt à se bagarrer quitte à inventer des prétextes pour cela. A coups de poings ou pire, au couteau, cet outil lui étant plus familier qu'un jouet. Ce que les habitants du douar Moumnia savent également de lui, c'est que ses frères et sœurs ne se comportent pas mieux que lui. A croire que la criminalité relevait chez eux de la tradition familiale. Les frères de Mohamed sont des trafiquants de drogue et ses sœurs, des prostituées. Quant à leurs parents, on ne sera pas surpris d'apprendre que le père leur avait donné l'exemple : il s'agit d'un trafiquant de drogue notoire, qui a purgé plusieurs peines d'emprisonnement. Leurs oncles paternels sont également des repris de justice, profondément amoraux, incapables à ce titre de faire la distinction entre le bien et le mal. C'est donc dans cet environnement familial que Mohamed avait grandi. C'est sans doute la raison pour laquelle il avait quitté l'école sans parvenir à franchir le cap de l'enseignement primaire et qu'il s'était lancé dans la voie de la délinquance. Il apprendra très tôt à se droguer, à se soûler, à se bagarrer au couteau et enfin à revendre de la drogue, au point de devenir l'un des plus gros dealers de la région. Résultat d'un tel engagement sur les chemins de la perdition, Mohamed sera condamné par deux fois à des peines d'emprisonnement. Il défraiera même la chronique judiciaire en 2004 en portant plainte contre quatre policiers de la brigade anti-drogue de la PJ de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ, au motif d'extorsion. Mohamed s'était présenté un jour devant le chef de la police judiciaire et avait révélé avoir soudoyé trois des quatre policiers en leur remettant un mouton chacun à l'occasion de l'Aïd El Kébir, en contrepartie de quoi il leur demandait de fermer les yeux sur son trafic de hachich. Quant au quatrième policier, avait poursuivi Mohamed, il s'était présenté à son domicile en exigeant lui aussi un mouton. Une enquête avait été diligentée, qui s'était soldée par l'arrestation des quatre éléments de la brigade antidrogue. Les policiers incriminés avaient eu beau dénoncer les accusations de Mohamed et expliquer que sa plainte n'était qu'une tentative du dealer de compromettre des policiers gênants, ils avaient été condamnés à des peines d'emprisonnement. Fort de son sentiment d'impunité, Mohamed ne se contentera pas d'approvisionner les toxicomanes, mais en arrivera à se livrer à des agressions. Mais l'une de ses victimes, prénommée Rachid, sera la cause de son malheur. Rachid travaille avec son père, qui exerce la profession de ferrailleur. Portant sur lui la somme de deux mille dirhams, il s'apprêtait à rentrer chez lui lorsque Mohamed, complètement drogué, lui avait barré le chemin. Sous la menace d'un couteau, il l'avait forcé à lui remettre l'argent qu'il détenait. Rachid n'avait pas porté plainte, préférant se faire justice lui-même. A cette réserve près que ne se sentant pas assez fort pour s'en prendre à Mohamed, il avait décidé de se venger sur le neveu de ce dernier, le jeune Abdallah. Le surprenant un jour seul dans le douar, il l'avait donc impitoyablement rossé, déclenchant ainsi une fatale vendetta. En effet, encouragée par Mohamed, la famille de Abdallah avait fait de cette vengeance une affaire d'honneur. Et Abdallah avait été méthodiquement remonté contre son agresseur. Jusqu'au jour « J » du passage à l'acte. Flanqué de ses oncles maternels, Mohamed, Jilali et quelques autres, Abdellah avait barré le chemin de Rachid. Ce dernier, se voyant gravement menacé, avait commencé par implorer la pitié de sa victime. Mais le groupe d'hommes qui accompagnaient Abdallah, ses oncles ivres de rage, n'étaient pas d'humeur à pardonner. Encouragé par le groupe, Abdallah avait donné le premier coup de couteau. Frappé au ventre, Rachid avait quand même tenté de s'enfuir. Mais les autres avaient fait cercle autour de lui, permettant à leur neveu de finir le travail. C'est ainsi que Rachid avait fini par s'effondrer, baignant dans son sang, et que la troupe de ses agresseurs avaient pris la fuite. Alertés, les éléments de la protection civile s'étaient dépêchés sur les lieux pour évacuer le blessé vers les urgences de l'hôpital Mohammed V où il avait rendu l'âme. Les investigations qui avaient été aussitôt entreprises par la police de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ s'étaient soldées par l'arrestation d'Abdellah et de ses deux oncles maternels, Mohamed et Jilali. L'affaire est actuellement entre les mains du juge d'instruction près la Cour d'appel de Casablanca, qui devrait bientôt la confier à ses collègues de la chambre criminelle.