Les deux séries comiques programmées en prime time exploitent un type de comique à propos duquel il y a tant à dire. Arrêt sur l'humour-harira et l'humour-café. Les séries «comiques» fleurissent pendant le mois de Ramadan sur les deux chaînes nationales. La production nationale ne garde une mine renfrognée tout au long de l'année que pour lâcher d'une seule traite un gros rire sur nos télévisions pendant le mois sacré. Le prime time correspond aux minutes qui succèdent à la rupture du jeûne. L'avalanche de spots publicitaires est suivie par la série comique vedette. Il y en a deux, cette année, interchangeables sur tous les plans d'ailleurs : mêmes acteurs, même type de «comique». Mister Miloud ouvre le bal sur 2M. La fin de ses aventures coïncide avec le début de celles de Bouchta et Bougtaya sur la première chaîne. Les deux chaînes nationales ont si bien accordé leurs violons, cette année, qu'on peut quitter l'une tout en étant à peu près sûr de la retrouver dans l'autre. En plus, ils ont synchronisé la diffusion de leurs deux séries vedettes. La fin des aventures de Miloud concorde parfaitement avec le début de celles de Bouchta et Bougtaya. L'harmonie ne dépasse guère le timing, parce que le contenu de ces deux séries est une harira de nature à renvoyer dans sa marmite celle qui ne manque pas pourtant d'ingrédients. Et puis, ce bouillon comique n'a pas pris le temps de bouillonner. Les aliments flottent à la surface. Ils sont d'ailleurs nettement moins digestes que la vraie harira. Ces deux séries exploitent un genre d'humour basé sur quelques tours de passe-passe dont on peut très vite faire le tour. Il y a d'abord la gesticulation dans tous les sens : des gambades et accrochages physiques qui n'ont même pas le mérite de nous essouffler en même temps que les acteurs. Ce que le «dialogue» peine à dire, les acteurs l'improvisent en usant de leurs corps. L'effet est répétitif, la démarche est peut-être trop rudimentaire pour laisser supposer un quelconque travail préparatoire. Et puis cette scie consistant à opérer des transformations erronées dans le français («on la pluie» pour «on l'applaudit», «suivez-lui», «mirage» pour «mariage»). Mais qui cherche-t-on à faire rire avec ce français-là? Pire encore : est-ce qu'on a le droit d'exhiber des handicaps physiques, des laideurs hideuses et des personnes d'une taille anormalement petite pour provoquer le rire ? Certains pensent que cette façon de chercher à faire rire mérite un procès. Les mêmes détracteurs de ces deux séries estiment que les programmateurs de la première et deuxième chaînes devraient avoir un peu plus d'égard pour leur public. Ils insultent son goût en pensant qu'il goûte un comique grossier et sommaire. Il y a pourtant des comédiens qui arrivent à faire rire un large public, tout en restant fins et créatifs. Les deux séries qui succèdent à Bouchta et Bougtaya nous réservent parfois de belles surprises. Saïd Naciri et Hassan El Fad atteignent un bon comique, quand ils sont en forme. La diffusion de leurs séries coïncide avec le moment où l'on prend son café. Il y a donc un humour-harira et un humour-café. Les programmateurs des deux chaînes nationales se connaissent en harira et en café!