Nour-Eddine Ayouch nous fait le bilan de l'année 2001 sur le plan culturel : «Nous manquons d'une stratégie et d'une vision d'ensemble. Si on devait faire le bilan de cette année sur le plan culturel, on constaterait un vide énorme pour un pays à fortes potentialités. Certes, il y a quelques nouveautés. En littérature, ce sont les femmes qui sont à la base du renouveau et qui font l'événement. Un nouveau souffle est arrivé avec Souâd Bahéchar, Siham Benchekroun ( recueil de poésie), Souâd Filal, Bahaa Trabelsi. Même chose pour le cinéma avec ceux qui s'inscrivent dans ce qu'on appelle «la nouvelle vague», Nour-Eddine Lakhmari, Fouzi Bensaïdi, Nabil Ayouch, Narjiss Nejjar. Ils ont une vision originale et neuve sur le Maroc, un sens aigu du professionnalisme, des sujets audacieux et modernes, des compétences évidentes sur le plan technique. Aujourd'hui, nous pouvons dire que nous sommes en train de devenir compétitifs en matière cinématographique dans le monde arabe et au Maghreb. Le théâtre aussi évolue. Son renouveau vient du théâtre universitaire, lancé par Smili. On y trouve un engouement et une recherche intéressante. C'est un théâtre régional, universitaire. Nous avons pu assister à de belles représentations à Oujda, Casablanca, Fès, cette année. Bien sûr, il y a l'incontournable et talentueux Nabyl Lahlou. Malheureusement, il a peu d'adeptes. C'est un marginal et un fou qui fait du très bon travail. Il y a toute une éducation culturelle qui reste à faire chez nous. Par exemple, seul le théâtre populiste remplit les salles. Il existe très peu de spectateurs pour un théâtre expérimental ou intimiste. La danse n'a pas pris l'essor qu'elle aurait dû prendre avec un caractère moderne et universel alors que nous avons des potentialités certaines. Il est vrai qu'il y a Zinoun, mais ce n'est pas suffisant. En ce qui concerne la chanson, il n'y a pas eu de relève de groupes comme Nass El Ghiouane ou Lamchahb ou Jil Jilala. Notre pays vit, de manière générale, en dessous de ses potentialités dans le domaine culturel. Nous avons un patrimoine architectural délaissé qui tombe dans la désuétude à El Jadida, Casablanca, Fès. Chaque petite ville devrait avoir son musée pour mettre en valeur notre artisanat, nos costumes, notre patrimoine culturel. Il faudrait aussi penser à aider tout ce qui est art conceptuel. L'Etat a un rôle à jouer. Les commanditaires aussi. Nous manquons d'une vision et d'une stratégie d'ensemble. Il y a des actions, mais elles sont ponctuelles. Alors que le Maroc est un pays qui a un passé, une histoire, un patrimoine, des traditions culturelles.