Le président du Forum de Paris, Albert Mallet est un personnage multiple. Dans le mariage entre le CIH et la Caisse d'épargne, son rôle «adoulaire» fut déterminant. Rencontre avec un personnage haut en couleurs. C'est à travers ce sexagénaire au visage respirant la tranquillité d'une mission bien accomplie, aux allures de banquier suisse, que le groupe Caisse d'épargne française est rentré au Maroc. Le qualificatif de «l'homme des réseaux» (un terme qu'il déteste, car synonyme pour lui de barbouze) lui irait comme un gant, si l'on n'était pas face au président du Forum de Paris, cette tribune annuelle «anti-Davos» dédiée au dialogue eurorméditerranéen. Albert Mallet ne cultive pas le secret. Une moindre chose quand on a été pendant 17 ans président de Radio Shalom (la Voix de la Paix) et, par ailleurs, à l'origine de la création d'un réseau de radio associatives. Pas de signe distinctif extérieur, à l'exception de cette «quête de la paix» qui sous-tend toutes ces actions. Au lendemain des accords d'Oslo, il réunit un grand colloque, en partenariat avec TFI et où prirent part les deux signataires desdits accords (Issac Rabin et Yasser Arafat) autour d'une interrogation enthousiaste. «Proche-Orient : après la paix, quel avenir?». Les désillusions de l'après-Oslo, et plus tard celles du processus de Barcelone viendront nourrir l'œuvre de l'homme autour du Forum de Paris, rare tribune où les citoyens ordinaires sont en contact avec les spécialistes. Passionné par les médias, il se joindra ensuite à Jean-François Khaan, Maurice Szafran et Robert Assaraf pour créer l'hebdomadaire Marianne. Puis ce sera, à partir de 1997, le cabinet du ministre de l'Intérieur de l'époque Jean-Pierre Chevènement. De son large expérience, M. Mallet a, quand même, une certitude : «les ponts économiques et les partenariats sont les meilleurs ponts entre les peuples». Aussi, cet ancien du lycée Lyautey, doit, à ses nombreux engagements dans le même thème -obsessionnel chez lui- du dialogue, adjoindre désormais la lourde tâche de devoir être l'accompagnateur de Charles Milhaud, patron de la Caisse d'Epargne, l'un des faiseurs de pluie dans l'Hexagone. La rencontre entre les deux hommes fut déterminante. C'était courant 2002, à la sortie d'un déjeuner organisé à l'ambassade du Maroc en France. Séduit par les immenses connaissances du Maroc et du Maghreb dont fait preuve M. Mallet, le président de la Caisse d'épargne le nomme conseiller pour le Maroc et le Maghreb. Quoi de plus profitable pour cette vieille institution de 150 ans que de confier à un psychologue clinicien de formation, diplômé de psychopédagogie spécialisée, qui plus est marocain, la tâche d'ouvrir le marché marocain à ses capitaux. Pour Albert Mallet, c'était le retour aux sources trente ans après. Difficile d'évoquer le Maroc : «pays d'où je suis parti à 16 ans mais où je conserve intacts mes souvenirs de jeunesse», sans une pointe de l'émotion. Casablanca, c'est d'abord la jeunesse, l'esprit d'engagement, quand à 21 ans, le futur président du Forum de Paris revint travailler en tant qu'éducateur au foyer de Sidi Maârouf. Une expérience «unique et inoubliable» qui sera sans doute à l'origine d'autres combats. «Je ne pouvais pas m'imaginer que ma vie après : mon travail se limiterait à flaner de la télé», explique-t-il, d'une voix calme qui révèle la patience du psychologue. Pour celui qui a vu s'écouler la décennie 70 avec son lot de crises et d'escalades, le mot «engagement» a un sens particulier. Il en explorera les contours avec constance, convaincu que son identité de «juif et citoyen marocain» rimait comme un pont à bâtir entre les peuples de la région. Les militants de cette cause étaient nombreux. Albert Mallet se rappelle à juste titre de l'association «Identité et Dialogue» d'André Azoulay, qui initiait des dialogues entre Juifs et Arabes et Israéliens et Palestiniens. Accompagner la Caisse d'épargne au Maroc s'inscrit pour Albert Mallet, en prolongement de son engagement. Charles Milhaud, «méditerranéen militant» est convaincu de l'importance pour son groupe de s'installer au Maroc. L'homme aux commandes de la Caisse d'épargne n'en est pas à son premier challenge, lui qui a hissé son institution parmi les trois grands du secteur bancaire français. Albert. Mallet l'a accompagné à la découverte du Maroc dans ses diversités, dans sa composition politique, économique et sociale : «On a très vite vu la volonté des pouvoirs publics d'accueillir le groupe Caisse d'épargne» au Maroc. Reçu par Driss Jettou, très à l'écoute et par plusieurs ministres, le président de la Caisse d'épargne est orienté vers le CIH. Avec toujours, rappelle M. Mallet, un objectif de participer au «développement d'une banque marocaine et non celui de lancer une banque française au Maroc». Après ce montage réussi, l'heure est désormais au travail. «Il y a des gens très compétents et très professionnels dans le personnel et l'encadrement du CIH sur lesquels nous fondons notre confiance», remarque celui qui fait désormais office de passerelle entre les différents partenaires. C'est quoi le Groupe Caisse d'Epargne ? Le GCE est une banque universelle avec des lignes de métier allant de la banque de détail à l'immobilier, en passant par les entreprises, les collectivités et institutions locales, l'économie sociale, l'assurance et la prévoyance. Différentes branches qui forment l'activité de la banque commerciale de proximité, premier pôle du Groupe. L'autre mission du GCE, à savoir : la banque d'investissement s'occupe des financements et marchés de capitaux, de la gestion d'actifs, des services aux investisseurs et de la garantie financière. Les différents métiers de la banque sont engagés dans une logique de marque : Ixis pour l'Asset management, Caceis pour les services dédiés aux investisseurs, mais aussi le Crédit Foncier, la Banque Platine…Véritable conglomérat financier, le GCE a clôturé l'année 2004 avec un chiffre d'affaires de 152 milliards d'euros (multipliez par dix pour l'équivalent en dirhams), et un encours d'épargne, y compris des dépôts à vue de 296 milliards d'euros. Sur le même exercice le produit net bancaire a atteint 9,7 milliards d'euros, réparti entre les activités Banque commerciale de proximité (72%), la Banque d'onvestissement (24%) et le Holding (4%).