Entre le Groupe salafiste de la prédication et du combat (GSPC) et les services de renseignements militaires algériens, il existe plus d'une connexion. Une enquête du “Monde Diplomatique” en trace les contours. Et si le Groupe salafiste de la prédication et du combat (GSPC) n'était finalement qu'une arme de plus entre les mains du pouvoir algérien et ses services de renseignements . C'est en tout cas la question à laquelle tente de répondre une excellente enquête, réalisée par Salima Mellah, responsable du célèbre site d'Algeria-Watch et Jean-Baptiste Rivoire, journaliste à Canal+ et publiée dans l'édition du mois de février du très respecté “Le Monde Diplomatique”. L'enquête s'attarde avec intelligence sur le choix des moments où le GSPC est passé à l'action, une action soldée à chaque fois par plusieurs morts. A commencer par le « sacré coup de main» donné par M. Abderrezak «El-Para», un ancien officier des forces spéciales de l'armée algérienne officiellement passé à la guérilla du Groupe salafiste au pouvoir algérien en 2003. Alors que ce dernier se pliait en quatre pour obtenir de Washington un soutien financier et militaire, et à la veille de l'arrivée à Alger, le 4 janvier de cette année, d'une importante délégation militaire américaine, le GSPC attaque un convoi militaire près de Batna. Bilan : quarante-trois soldats tués et une émotion considérable dans la population. Peu après, les Etats-Unis allègent l'embargo sur les armes à destination de l'Algérie et annoncent la vente d'équipements militaires antiterroristes. La même année, entre le 22 février et le 23 mars, trente-deux touristes européens (seize Allemands, dix Autrichiens, quatre Suisses, un Suédois et un Néerlandais) sont enlevés dans la région d'Illizi, en plein Sahara algérien. Le processus de collaboration militaire américano-algérien s'en trouvera accéléré. Ce qui pose la question sur le rôle d'El-Para. Est-il réellement un haut dirigeant de ce groupe? L'état-major de l'armée algérienne, ancien employeur d'El-Para, était bien le seul à affirmer qu'il agissait pour le compte du GSPC... lequel n'a jamais revendiqué l'enlèvement des touristes. Idem pour la tristement célèbre prise des touristes comme otages au Sahara, entre février et août 2003, ni revendiquée ni négociée par le Groupe. Certains prisonniers témoigneront que l'opération n'aurait pas été ordonnée par le chef présumé du GSPC, Hassan Hattab, mais par El-Para lui-même. Les prisonniers rapportent en outre que leurs ravisseurs communiquent régulièrement par radio et surtout que, très vite, des hélicoptères de l'armée algérienne survolent leurs positions pourtant changeantes. Grain de sable dans ce qui ressemble un scénario monté de toutes pièces, le terroriste algérien est capturé par des rebelles du Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDJT), en guerre contre le régime d'Idriss Deby. Après plusieurs rebondissements, El-Para est entre les mains du DRS. Dès lors, le « Ben Laden du désert» n'est plus considéré comme une grosse prise. Il soutiendrait le projet d'amnistie générale du président Abdelaziz Bouteflika, destiné à absoudre aussi bien les terroristes que les chefs militaires impliqués dans les crimes contre l'humanité commis au cours de la «sale guerre»…Mieux encore, le pouvoir algérien semble lui avoir trouver un remplaçant, répondant du nom de Mokhtar Belmokhtar présenté, lui et ses hommes, comme étant liés au GSPC. Entre-temps, en 2003, Washington annonce la vente à l'Algérie d'équipements militaires antiterroristes et décrète que c'est le pays «le plus démocratique» du monde arabe.