Dans un communiqué sur l'évolution possible du Code pénal au sujet de l'avortement La question de l'avortement revient à nouveau sur le devant de la scène. Le Conseil supérieur des ouléma a fini par donner son avis sur cette question en publiant lundi soir un communiqué. Le Conseil a clairement affirmé que les dispositions du Code pénal relatives à cette question ne connaîtront aucune modification «sauf ce qu'exige l'intérêt et permet l'Ijtihad». Le secrétariat général du Conseil supérieur des ouléma estime que les dispositions contenues dans le Code pénal (chapitre VIII, section I, de l'article 449 à l'article 458) constituent la seule référence concernant la question de l'avortement. L'instance rappelle d'ailleurs que l'élaboration de cette loi était le fruit d'un travail laborieux et de concertations, auxquels ont pris part plusieurs institutions, dont le Conseil supérieur des ouléma. Il souligne dans son communiqué que chaque partie autorisée pourra réviser son avis, dans le cadre permis par la loi. Par ailleurs, l'instance avertit qu'à l'exception des cas où «l'ijtihad» est recommandé (troisième source du droit musulman après le Coran et la Sunna), «aucune personne n'est habilitée à surpasser une partie compétente d'une manière à impliquer le Conseil supérieur des ouléma dans un débat clos, donnant l'impression que ledit Conseil était absent et n'assume pas ses responsabilités, et exploitant cette implication dans une polémique à caractère politique». Cette question demeure une affaire publique et le mécanisme avec lequel le Conseil participe à ce débat est «connu» et personne ne peut l'ignorer, conclut le communiqué. Selon le Pr Chafik Chraibi, président de l'Association marocaine de lutte contre l'avortement clandestin (AMLAC) «cet avis fait suite à la déclaration du chef de gouvernement qui avait clairement dit que le débat sur l'avortement est clos après le consensus national trouvé en 2015. La position du Conseil veut clairement dire que l'on n'obtiendra pas plus. Cela dit, il n'y a pas de quoi s'inquiéter. Le projet de loi autorisant l'avortement dans 4 cas précis, à savoir le viol, l'inceste, les malformations congénitales et handicap mental, passera au niveau des deux Chambres. D'ailleurs, la semaine dernière une journée d'étude a été organisée par le PPS au Parlement sur cette question. Ce projet de loi devrait être voté prochainement en plénière lors de cette session parlementaire». Par ailleurs, l'avis du Conseil montre bel et bien qu'il souhaite faire prévaloir l'Ijtihad qui est le droit de donner la possibilité d'avorter dans un certain nombre de situations. Or le Pr Chraibi estime que «la santé de la mère est l'affaire du ministère de la santé et non pas du Conseil des ouléma». Selon le président de l'AMLAC, le droit de se faire avorter dans les 4 cas cités n'est pas suffisant dans la mesure où il ne règle que 10 à 15% des situations. D'où la nécessité d'élargir les cas de figure énumérés en tenant compte notamment de la santé mentale, physique et sociale de la mère. Dans son mémorandum relatif à l'amendement de la loi 10-16 du Code pénal dont une partie a été consacrée à l'avortement, le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) avait recommandé «d'autoriser la femme enceinte à mettre un terme à sa grossesse en cas de menace de sa santé physique, psychologique ou sociale». Le mémorandum avait souligné que la poursuite d'une grossesse non désirée pour des raisons de santé représente une atteinte à l'intégrité de la femme enceinte. Enfin, le CNDH avait recommandé l'adoption de la définition de l'OMS de la santé: «La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité». Cela fait des années que le Pr Chafik Chraibi, revendique l'adoption de cette définition au niveau de l'article 453 du Code pénal. Pour El Otmani, le débat est «clos» Suite aux recommandations émises par le CNDH concernant le changement des dispositions du Code pénal et particulièrement l'avortement, le chef de gouvernement avait réagi fermement en faisant savoir qu'il s'opposait à toute relance du débat sur cette question. «Certains veulent un retour à la case départ. Ce qui n'est pas une bonne initiative. Il ne faut pas renier ce que nous avons déjà convenu. Nous n'allons pas accepter cela», avait-il déclaré lors d'une réunion interne de son parti qui s'était tenue en novembre dernier. «Il y a eu en 2015 un débat national sur la question de l'avortement. SM le Roi Mohammed VI a validé les recommandations d'une commission spéciale qui a conduit le dialogue. Ces recommandations ont été, d'ailleurs, intégrées dans le projet de réforme du Code pénal», avait indiqué le secrétaire général du PJD. «Notre position est claire sur les questions qui dépassent les constantes nationales. Nous allons rester fermes sur tout ce qui se rapporte au référentiel islamiste. Il est difficile de revenir en arrière après être parvenus au compromis», avait conclu le secrétaire général du PJD.