Bagdad a renforcé sa coopération avec les inspecteurs de l'ONU en détruisant de nouveaux missiles prohibés. Appelé à « faire plus », le régime irakien suscite encore méfiance, divisions et embarras. L'Irak devait détruire hier « sept à neuf » missiles de type Al-Samoud 2, après les dix engins déjà éliminés depuis samedi. Un geste important de la part du régime qui dispose de quelque 120 missiles du même genre, fabriqués à partir de 1997, et dont l'élimination a été exigée par le chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU, Hans Blix. Bagdad préparait d'ailleurs parallèlement un rapport sur la destruction de ses armes bactériologiques, le bacille du charbon et l'agent neurotoxique VX - officiellement détruits en 1991. Egalement réclamée par les Nations-Unies, cette étude « plus détaillée » que la précédente devrait être transmise d'ici le 10 mars, selon le porte-parole de l'instance Hiro Ueki. Ce dernier a précisé que cette décision avait été prise à l'issue de discussions techniques entre l'ONU et des responsables irakiens dimanche soir. Ces événements ont en tout cas démontré que l'Irak se montrait de plus en plus prêt à collaborer et à faire entendre la voie de la paix dans un contexte international particulièrement tendu. « L'Irak doit faire plus, coopérer davantage et plus activement » a encore souligné le président français lundi, depuis Alger. « Nous devons maintenir sur lui une forte pression pour parvenir ensemble et dans la paix à l'objectif que nous nous sommes fixé : l'élimination des armes de destruction massive », a précisé Jacques Chirac. La destruction de ces missiles prouve « l'efficacité du travail des inspecteurs » et d'une «coopération plus active» de Bagdad avec l'ONU, a de son côté estimé le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Iouri Fedotov. Reste que la tournure actuelle n'est pas pour plaire à tout le monde. « Elément très important d'un vrai désarmement » pour le chef de la COCOVINU, Hans Blix lui-même, ces destructions de missiles ont été qualifiées dimanche de « jeu de dupes » par le président américain et ses deux alliés, les chefs de gouvernent britannique et espagnol. José Maria Aznar a évoqué le sujet dimanche dans des entretiens téléphoniques avec les présidents égyptien Hosni Moubarak et syrien Bachar al-Assad, dont le pays est membre non permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Humiliés par le Parlement d'Ankara qui a rejeté dimanche le déploiement de leurs troupes en Turquie, les Américains semblent quant à eux contraints de revoir leurs plans de bataille. Surtout qu'ils ont aussi été largement critiqués par les chefs d'Etat arabes qui ont, lors du sommet de Charm el-Cheikh de samedi, dénoncé les « tentatives visant à imposer des changements dans la région » et marqué leur « refus catégorique » de participer à un tel conflit. Ce qui ne veut toutefois pas dire que le monde arabe parle d'une même voie, certains pays comme l'Arabie saoudite ou les Emirats arabes unis plaidant pour un exil du dirigeant irakien. Initié par le président émirati Cheikh Zayed, ce plan est justifié par le nécessaire retour de « la paix, la sécurité et la stabilité pour le peuple irakien ». Le secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa a quant à lui appelé lundi à la tenue « très prochainement » d'un deuxième sommet arabe et indiqué que le comité de bons offices sur l'Irak formé par le sommet de Charm el-Cheikh entamerait ses contacts dans les prochains jours.