Dimanche, l'existence du plan franco-allemand de désarmement de l'Irak a été confirmée par Berlin au lendemain de son annonce par voie de presse. Nouvelle qui avait largement irrité les Américains lors de la réunion de Munich. Démenti par Paris samedi puis confirmé par Berlin dimanche ! Le plan élaboré par le couple européen en vue de désarmer l'Irak a pour le moins remué les chancelleries occidentales tout au long du week-end. Révélée par le journal allemand Spiegel, dans son édition datée de lundi, cette nouvelle feuille de route doit être présentée le 14 février au Conseil de sécurité de l'ONU, a déclaré dimanche le ministre allemand de la Défense Peter Struck. Elle prévoit le renforcement du nombre des inspecteurs en et l'arrivée en Irak des Casques bleus de l'ONU ? Fuites incontrôlées ? Presse trop bien informée ? Si le nouveau duo européen comptait sur un effet de surprise en ne révélant leurs projets que lors du rendez-vous new-yorkais, il est en effet trop tard… Même si la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a tenté samedi de démentir son existence, se contentant de rappeler que son collègue des Affaires étrangères avait fait de telles propositions mercredi dernier à l'OTAN. Reste que les Américains n'ont pas apprécié. Présent à la conférence annuelle sur la sécurité à Munich, Donald Rumsfeld a rétorqué qu'il n'était «pas au courant», préférant minimiser ses récents propos sur la « vieille Europe». Le secrétaire d'Etat à la Défense a expliqué que pour lui, l'adjectif « vieille » était une marque de tendresse, tout en exhortant Paris et Berlin à ne pas persister dans leur opposition à une guerre. Ses collaborateurs ont par contre fustigé l'absence de communication de leurs homologues européens. « Maintenant, nous faisons savoir à chaque Français et chaque Allemand que nous rencontrons que ce n'est pas le moyen de l'emporter avec les Etats-Unis », a expliqué l'un d'eux sous couvert de l'anonymat. Le secrétaire d'Etat à la Défense a par ailleurs qualifié d'«inexcusable » le blocage par la France, l'Allemagne et la Belgique de l'octroi d'une aide militaire de l'OTAN à la Turquie en prévision d'une guerre contre l'Irak. Il a, dans le même temps, invité les Européens à rejoindre « la plus importante coalition de l'Histoire » et mis en garde l'Allemagne et la France contre le risque de « s'isoler elles-mêmes, plutôt que d'isoler les Etats-Unis ». « Etre allié, c'est un statut qui implique le dialogue et le respect de l'autre », lui a aussitôt répondu la ministre française de la Défense. «Cela veut dire que l'on évite les accusations infondées, que l'on évite les interpellations fallacieuses, que l'on évite les assertions mensongères», a souligné Michèle Alliot-Marie, répétant que, pour la France, l'option militaire toujours doit intervenir en dernier ressort. Egalement à Munich, le ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, a répété qu'il n'était pas non plus convaincu de la nécessité de faire la guerre à l'Irak tout en affirmant que la position des Quinze n'était pas « si loin que ça » de celle de l'administration Bush. Le débat n'est de toute façon pas clos et les interventions ne vont pas manquer d'ici le 14 février. Le chef du gouvernement allemand, Gerhard Schröder, et le président russe, Vladimir Poutine, devaient même évoquer le « plan » en question dès dimanche à Berlin. Lequel allait sans doute faire aussi partie du menu des entretiens prévus le même jour entre le chef d'Etat égyptien Hosni Moubarak et les dirigeants syrien, libyen et saoudien, à Charm el-Cheikh, en présence du secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. Tous devaient réfléchir sur « les moyens d'éviter une guerre en Irak et d'apporter une solution diplomatique à la crise irakienne ». Par le biais de l'initiative saoudienne d'«ultime chance », qui propose l'amnistie à plusieurs membres du régime irakien « afin d'encourager son éviction et prévenir la guerre » ? L'enjeu est pour le monde arabe de se mettre d'accord sur une position unanime en vue de la réunion ministérielle au Caire le 16 février, et surtout du sommet arabe de mars. Parallèlement à tous ces va-et-vient diplomatiques, les deux chefs des inspecteurs de l'ONU, Hans Blix et Mohamed El Baradei, ont entamé dimanche leur deuxième journée de consultations avec les responsables irakiens. Les deux hommes ont vu une délégation conduite par le général Hossam Mohamed Amine, chef de l'organisme chargé de la coordination avec les inspecteurs, et le général Amer Al-Saadi, conseiller présidentiel. Laquelle entrevue s'est soldée par la remise par Bagdad documents sur son armement « nucléaire et biochimique », ont indiqué les Nations unies.