Ayant suscité, à ses débuts, l'enthousiasme de plus d'un opérateur, le e-commerce représente désormais plus une charge supplémentaire qu'un moyen de doper les ventes. La déception est quasi générale. Sassia Emsalem est la directrice générale de Laetistyle, une entreprise florissante de design industriel. Férue des nouvelles technologies et voulant donner une autre dimension à son commerce, elle décide, il y a quelques années de cela, de se lancer dans la commercialisation on-line de ses produits. Laetistyle.com, une véritable vitrine mettant en vente des articles de poterie, de bureau, de bijouterie, de maison pour les particuliers comme pour les entreprises voit le jour. Le visiteur dispose d'une galerie marchande qui lui permet de s'informer sur les produits proposés. Il suffisait d'un clic pour passer la commande. Sauf qu'il n'y a jamais eu de commande. La déception n'a pas tardé à suivre. « Face à l'absence d'acheteurs et les coûts élevés d'hébergement de mon site, je n'ai eu d'autre choix que d'arrêter », déclare Mme Emsalem. L'entreprise s'en retrouvée allégée d'un fardeau qui n'était pas nécessaire. Au lieu d'attirer la clientèle et de doper les ventes, le e-commerce représente pour plus d'une structure une charge supplémentaire, parfois injustifiable. Manque d'acheteurs, de structures dédiées au e-commerce, de moyens de paiement électroniques…tel est l'état des lieux d'un secteur pourtant porteur sous d'autres cieux. «Même si en croissance permanente, force est de constater que le nombre des internautes au Maroc ne favorise pas le développement d'une telle activité. Les cartes Visa ou Mastercard, nécessaires à ce genre de transactions, sont limitées. La seule plate-forme viable et opérationnelle reste Maroc Telecommerce. « À cela s'ajoute des facteurs psychologiques liés à la sécurité, ou non, du paiement électronique qui font que le bilan n'est guère reluisant », explique Karim Zaz, directeur général de Wanadoo Maroc. Une opinion que les statistiques ne font que renforcer. Sur les neufs principaux sites que connaissait le pays, cinq ont fermé boutique (voir tableau page ouverture). Le nombre de consommateurs utilisant le commerce électronique ne dépasse pas les 10000, selon les meilleures estimations. Sur les 3 millions de cartes de crédit en circulation en 2001, seuls 860 pouvaient être utilisées pour le paiement en ligne. Et seuls trois portails de commerce électronique sont disponibles. Le temps où l'on prédisait monts et merveilles pour le e-commerce au Maroc est révolu. « Certaines banques refusent d'ouvrir l'accès de leur clientèle à Maroc Telecommerce. Or, cette dernière répond aux standards internationaux en matière de sécurité des paiements. Il est donc difficile d'avoir des acheteurs locaux », insiste M. Zaz. Même avec le Système de paiement sécurisé, qui garantit la confidentialité des données confiées par le client, en se basant sur le cryptage des informations échangées, deux des cinq banques qui offrent des cartes de paiement acceptées sur Internet n'autorisent pas de transactions pour les clients possédant des cartes de paiement domestiques. Un marché local du e-commerce n'est donc pas pour demain. Le développement de ce secteur est à chercher… ailleurs. Reste que le e-commerce peut profiter à des secteurs de prestation de services à l'échelle internationale comme le tourisme. L'expérience de l'agence de voyages Atlas Voyages avec l'opérateur Wanadoo est là pour le prouver. « Même si la transaction ne se fait pas de bout en bout et que la commande et le paiement se font manuellement, nous enregistrons 50 à 100 transactions par semaine. Les opérateurs économiques ne saisissent toujours pas les opportunités qui existent sur le marché international. C'est une mutation importante et à laquelle il faut procéder », affirme le directeur de Wanadoo Maroc, dont l'entreprise héberge le site de l'agence précitée. Des propos que confirme Sassia Emsalem qui dit croire toujours au e-commerce, mais pour la prestation de services à une clientèle internationale et non pour la vente.