Monopole des courtiers sur les rendez-vous de visa : Nasser Bourita tape du poing sur la table    Les dimensions de la visite du président chinois au Maroc : des transformations stratégiques    Le Maroc lancera les premières adjudications relatives au gazoduc Afrique atlantique en 2025    Alfa Romeo Junior : ce que vous devez savoir sur ce SUV urbain    Journée mondiale des transports durables : l'ONCF lance une promotion spéciale    Al Barid Bank et Guichet.com s'allient en faveur des jeunes Marocains    Le Trésor place 3,5 MMDH d'excédents de trésorerie    Grèves des médecins du secteur public : Aux origines d'un malentendu onéreux [INTEGRAL]    Echange commercial Maroc-Royaume-Uni : Rabat affiche un excédent commercial de 1 milliard de livres sterling au deuxième trimestre-2024    Arrestation de Boualem Sansal : l'hallucinante rhétorique antisémite du régime algérien contre Emmanuel Macron et la France qui appuie sa folle dérive autoritaire    Victoire de Trump et échec des démocrates : quels enseignements pour les partis politiques au Maroc ? [Par Amine Karkach]    L'Uruguay retient son souffle avant le deuxième tour des présidentielles    LDC (F) Maroc 24: L'AS FAR très proche de sa 2e étoile !    Botola D1 J11. Acte II : IRT-MAT et RSB-HUSA au programme d'aujourd'hui    Mpox: l'OMS maintient son plus haut niveau d'alerte    Le théâtre, un outil diplomatique efficace pour exporter la culture marocaine à l'international    Cinéma : Avec plus de 10 semaines en salles, Triple A" brille au BO    Mohamed Khouyi remporte le prix du meilleur acteur au CIFF    Speed-meetings : le sésame des artistes à Visa For Music    Les températures attendues ce samedi 23 novembre 2024    Le temps qu'il fera ce samedi 23 novembre 2024    Un souffle éthique au cœur de l'Istiqlal    Le Maroc, un modèle en matière d'égalité et de parité dans le monde arabe    Patrice Motsepe : la CAN féminine Maroc 2024 sera la "meilleure" et la "plus réussie"    La COP29 prolongée, en l'absence d'un compromis    UNAF U17/ Cet après-midi, un intense Maroc-Algérie : Horaire? Chaînes ?    L'Algérie libère deux groupes de 43 Marocains emprisonnés depuis des années    Le MSPS lance "Riaya 2024/25" au profit des zones touchées par le froid    Alerte 'orange' : La météo s'affole ce week-end !    Botola : Le Raja et le Wydad se neutralisent dans le derby de Casablanca    Sahara marocain: les USA réaffirment leur soutien à l'initiative d'autonomie    La COP29 prolongée, en l'absence d'un compromis    CAN Féminine Maroc 2024 : Le Maroc dans le groupe A avec la RDC, la Zambie et le Sénégal    Sophie De Lannoy : "Chaque personnage est inspiré d'une personne réelle"    Pavillon Vert: 90 Eco-Ecoles labellisées pour l'année scolaire 2023-2024    Moroccan parties urge ICC action against Netanyahu and Gallant    Le président chinois achève sa visite au Maroc après de riches entretiens avec le prince héritier Moulay El Hassan    Des partis marocains appellent à l'application de la décision de la CPI contre Netanyahu et Gallant    Ce que l'on sait d'Orechnik, le missile balistique russe qui a semé la panique [Vidéo]    Démantèlement d'une cellule terroriste affiliée à "Daech" dans le cadre des opérations sécuritaires conjointes entre le Maroc et l'Espagne (BCIJ)    Première édition de Darb Race, le 8 décembre prochain à Dar Bouazza    Protection du patrimoine marocain : Mehdi Bensaïd affûte ses armes    Cinéma : "Gladiator II", le retour réussi de Ridley Scott    Visa For Music : À l'ExpoStand, les musiques du monde se rencontrent!    Le Panama décide de suspendre ses relations diplomatiques avec la pseudo    M. Zniber souligne les efforts déployés par la présidence marocaine du CDH en vue de la réforme des statuts du Conseil    Démantèlement d'une cellule terroriste affiliée au groupe Etat islamique lors d'une opération hispano-marocaine    Les prévisions du vendredi 22 novembre    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mon cœur mis à nu
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 24 - 01 - 2003

« On ne met pas en cage un pareil » est le titre du journal intime de l'écrivain Mohammed Khaïr-Eddine. L'auteur l'a écrit trois mois avant de mourir. C'est dire qu'il se ressent d'une urgence : celle d'exprimer les regrets, les colères et les amitiés.
Les ennuis de Mohammed Khaïr-Eddine commencent chez le dentiste. « Le chirurgien-dentiste, un incompétent notoire, au lieu d'extraire la molaire malade, s'est attaqué à l'os de la mâchoire qu'il a fêlé », écrit l'écrivain à la première page de son journal. En observateur intrépide, il note les dégâts occasionnés par ce praticien : « malgré toutes les précautions que j'ai prises (en ne négligeant pas, par exemple, de multiplier les bains de bouche), les germes ont trouvé le moyen de s'installer dans la fêlure de la mâchoire.
Je prenais alors des antibiotiques et des anti-inflammatoires, mais les microbes n'en avaient cure ; au contraire, ils prospéraient dans ce milieu sordide qu'est la bouche ». Cette écriture simple, fluide, sans révolution formelle, caractérise le journal de Khaïr-Eddine. Elle rompt avec les livres précédents de l'écrivain qui pouvaient rebuter certains lecteurs. Au demeurant, tout porte à croire que Khaïr-Eddine a écrit ce journal alors qu'il savait que sa mort était proche.
Le temps sur lequel s'étend l'écriture de ce journal ne dépasse guère à cet égard un mois. Il ne peut s'agir donc d'un journal intime au sens classique du mot. On n'y retrouve pas d'ailleurs de progression chronologique. Khaïr-Eddine ne fixe pas les événements au jour le jour, mais agit par variations autour d'un thème, ce qui multiplie les va-et-vient entre les différents âges de l'auteur. La maladie, la souffrance et le sentiment de la mort rendent urgents la formulation d'un point de vue définitif sur certains sujets. Les regrets : « Je n'ai que trop souffert de certaines femmes. On ne gagne rien avec elles. Elles m'ont beaucoup nui. Et nui à l'écriture. » Les colères : « Les profs d'université vous font manger du sable à la place du couscous. Ils sont nombreux, répétitifs et incapables d'invention. Je les évite de plus en plus (…) L'université n'est pas un lieu propice à la réflexion, c'est une fabrique de poncifs. Comme c'est minable ! » Mais surtout l'amitié qui paraît comme la valeur la plus stable, la plus durable dans le journal. L'enseignement de ce livre, ce qui éblouit et touche à la fois, c'est que Khaïr-Eddine, avec sa violence, son esprit libre et rebelle à tout attachement, croit ferme en l'amitié.
Au point de vue sentimental, l'amitié lui suffit, idéale société secrète, alliance intime à quelques-uns, en parfaite communion de vues, de vie et de travail. Que ce soit dans un chic restaurant à Paris ou dans un bar sordide où il les rencontrait, Khaïr-Eddine a nommé la petite communauté d'hommes dont il se réclame. On y trouve des noms connus comme ceux Michel Leiris, Jacques Berque, Pierre Bernard et d'autres connus seulement par l'écrivain et à qui il a tenu à rendre grâce.
D'autre part, le titre d'un ouvrage revient incessamment dans ce journal. Khaïr-Eddine l'a écrit en contrepoint de son roman posthume : « Un vieux couple au village ». L'on comprend alors qu'il est impossible de comprendre le ton apaisé de cette romance pastorale indépendamment de l'état dans lequel il a été écrit. Le journal nous instruit de l'état de l'auteur. Il ne pouvait pas manger, ce qui explique la présence massive de la gastronomie dans le roman. Il ne pouvait pas se promener, ce qui justifie les descriptions de la nature dans le roman. Il souffrait et avait besoin de paix. Et c'est ce qui explique le ton apaisé et la sérénité qui sous-tendent le roman.
Ce roman lui a tenu compagnie dans la souffrance, il lui a aussi permis de vivre par procuration. Il faut se rendre compte de ce que cela représente. Khaïr-Eddine brise les frontières entre l'écrit et le vécu, ou essaie plutôt de transformer le second en s'instruisant du premier. Ce qui en dit long sur l'empire de la littérature dans sa vie. Il rend aussi grâce à Dieu d'être encore en vie. Les amis, la littérature et Dieu sont le triangle au sein duquel s'abrite l'écrivain. L'écrivain ? Le mot est peut-être injuste. Dans la dernière phrase de son journal, Khaïr-Eddine écrit : « je voulais avant tout être poète ». Qui peut lui dénier cette qualité !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.