Pour mettre un terme au chantage et aux extorsions de fonds exercés par son mari, de qui elle était divorcée, Fatima a décidé de tuer par étouffement un second enfant issu d'une relation extraconjugale. Fatima, vingt-cinq ans, n'imaginait pas qu'il changerait complètement. Elle pensait mener une vie conjugale harmonieuse et sans problèmes. Seulement, tout a été chamboulé quelques mois après leur mariage. Pourquoi? Elle en ignore la raison. Ahmed était calme, sympathique, très gentil avec elle lors de la période des fiançailles. Il lui exprimait son amour et lui promettait de prendre soin d'elle pour l'éternité. Seulement, tous ces promesses se sont volatilisées en un clin d'œil. Elle se demande à chaque fois pourquoi et elle ne trouve jamais de réponse. D'abord, c'est lui qui l'a choisie comme épouse et personne d'autre ne le lui a imposé, ni ses parents, ni ses proches. C'est lui qui lui a demandé, un jour de 1998, quand il l'a croisée à Médiouna située à la périphérie de Casablanca, d'entretenir une relation amoureuse avec lui. Elle a refusé prétextant n'avoir jamais entretenu une relation et ne pense jamais l'entretenir. Il lui a expliqué que son but était bel et bien le mariage, qu'il ne pense pas jouer avec ses sentiments, qu'il n'a jamais imaginé passer un certain temps avec une fille pour lui tourner le dos. «Si l'idée me vient, je pense à mes sœurs et je n'aimerais jamais faire à une femme ce que je ne supporterais pas de voir exercé sur mes sœurs», lui a-t-il confié. Certes, il n'a pas tardé à la demander en mariage. Et après quatre mois de fiançailles, ils ont uni leurs destins sous un même toit. Comme toute jeune mariée, elle était pleine de joie. Seulement le comportement d'Ahmed a changé quelques mois plus tard. Sa gentillesse a cédé la place à de la méchanceté. Il commence à la maltraiter pour la moindre raison. Elle ne peut plus mettre le nez dehors, ni rendre visite à sa famille, ni adresser la parole à une voisine. Il lui interdit tout cela. Si elle n'obtempère pas, elle sera giflée, malmenée, brutalisée cruellement. Depuis, elle ne voit désormais devant elle qu'un monstre. Une année après le mariage, leur foyer a été égayé par la naissance d'une petite fille. Cela n'a pas pour autant atténué la méchanceté d'Ahmed à son égard. Sa cruauté n'a pas cessé de se développer au point qu'au bout de cinq ans, elle ne le supporte plus. Un jour qu'il rentrait chez lui, il ne l'a pas trouvée à la maison, ni elle ni son enfant. Où sont-ils partis ? Elle n'a plus d'amie, ne rend plus visite à personne et ne fréquente plus ses voisins. Il s'est rendu illico pour la chercher chez ses beaux-parents. Y est-elle ? Oui. «Je ne veux plus rester chez toi», lui lance-t-elle. D'un mot à l'autre, ils ont commencé à se chamailler. Une dispute qui n'a pris fin qu'après l'intervention de la belle-famille. Et Fatima ne veut plus retourner au foyer conjugal. Elle est restée chez ses parents en attendant qu'il prenne l'initiative de la répudier. À défaut d'argent, elle a commencé à travailler dans les champs pour gagner sa vie et prendre soin de son enfant. Au fil des mois, elle s'est adressée à la justice pour réclamer sa pension alimentaire. D'une audience à l'autre, la justice la lui a accordée et Ahmed s'est retrouvé dans l'obligation de la lui verser. Entre-temps, elle a fait la connaissance d'un jeune homme. Il s'appelle Mohamed. Ce dernier l'a croisée à la station de grands taxis et lui a adressé la parole. Elle lui a répondu. Et c'était le début d'une relation qui s'est développée au fil des semaines pour finir en aventure amoureuse. Au fil des rencontres, elle est tombée enceinte. Mais, Mohamed, qui l'aidait et la soutenait matériellement, lui a tourné le dos. Que doit-elle faire ? Elle n'en sait rien. Toutefois, quand son mari, Ahmed, est arrivé chez elle pour lui demander de retourner au foyer conjugal, elle a accepté sans la moindre condition. Cependant, il a remarqué le changement qui s'est opéré au niveau de son ventre. C'est quoi ? lui a-t-il demandé. Après une longue hésitation, elle a fini par cracher le morceau. Ahmed est resté calme en entendant la nouvelle. Il n'a pas réagi. Il l'a fixée longuement du regard avant de lui demander de lui restituer tout l'argent de la pension alimentaire qu'il lui avait versé durant leur séparation. Pire encore, il a continué à lui extorquer de l'argent pour qu'il ne dévoile pas son secret et pour laisser les gens croire que l'enfant est de lui. Il a commencé même à l'obliger à coucher avec lui et à subir ses caprices les plus pervers. Une situation qu'elle n'a pas supporter. Le neuvième mois de sa grossesse est arrivé et elle s'est rendue à l'hôpital pour accoucher. Et même là, il a continué à la menacer de dévoiler son secret pour que tout le monde, y compris ses parents, sache la vérité. Le jour “J“ est arrivé. Fatima a accouché d'un petit garçon. Ses parents étaient heureux. Ils souhaitaient que ce deuxième enfant puisse combler le fossé qui sépare leur fille d'Ahmed. Le lendemain, l'infirmière est venue pour examiner le nouveau-né. Elle a remarqué que son visage était bleuâtre. Qu'est-ce qui lui est arrivé ? L'infirmière a alerté le médecin-chef, qui a examiné le nouveau-né. La mort n'est pas naturelle, conclut-il. Il a alerté la police qui est venue pour interroger la mère. D'une interrogation à l'autre, Fatima a fini par avouer : «Je l'ai étouffé en lui mettant un oreiller sur le visage pendant plusieurs secondes ». Pourquoi ? Pour ne plus avoir à subir les menaces d'Ahmed. Fatima a été traduite devant la Cour d'appel de Casablanca pour infanticide.