Une convention cadre a été signée entre le ministère et la FNPI pour la réalisation de 20.000 logements De tous les chantiers ouverts par le ministère de l'habitat depuis 2012, sous le mandat de Nabil Benabdellah, celui du logement pour la classe moyenne subventionné par l'Etat figure sans doute parmi ceux ayant connu le moins d'avancées. Qu'on en juge. Depuis l'introduction de ce dispositif dans le cadre de la loi de Finances 2013, soit plus de 4 ans, tout juste 124 logements de ce type ont été effectivement livrés! Même quand on s'intéresse aux volumes d'unités actuellement dans le pipe, c'est-à-dire mises en chantier, la situation n'est pas plus encourageante. Ce ne sont en effet que 1.807 unités qui sont aujourd'hui en cours de construction et qui s'ajouteront à terme à la production, selon les statistiques officielles du ministère de l'habitat. Et encore, si ce n'était l'aménageur public Al Omrane, appelé en renfort par le département de tutelle pour initier le mouvement sur le dispositif, on en serait aujourd'hui tout juste à 188 logements en chantier et probablement aucune unité achevée. Avec ces maigres chiffres, l'on ne s'étonnera pas de savoir que le dispositif pensé par les pouvoirs publics pour satisfaire les besoins des ménages à revenu intermédiaire, est très loin de ses objectifs et c'est peu dire. En effet, en début de mandat le ministre de l'habitat avait estimé que pour répondre correctement aux besoins de la classe moyenne, 20.000 logements dédiés à cette cible doivent arriver chaque année sur le marché. Depuis 2012 ce sont donc 100.000 unités qui étaient supposées être livrées. En comparaison avec les achèvements effectifs et même en rajoutant les logements en chantier, on en est à moins de 2% de l'objectif ! Bien sûr, il n'y a pas que le dispositif étatique qui est à même de répondre à la demande de la classe moyenne, la production de moyen standing réalisée par les promoteurs hors convention est tout autant susceptible de couvrir le besoin. Mais en faisant le tour du marché dans les principales villes du Royaume, l'on comprend rapidement que la production libre des opérateurs privés, présentée comme moyen standing, est très loin de correspondre aux attentes de la demande en matière de prix. Ainsi, en regardant les tarifs rapportés par les agences immobilières, les biens proposés sur le segment intermédiaire dépassent facilement le million DH, alors qu'une récente enquête du ministère de l'habitat sur la demande de logements fait ressortir que seuls 4% des demandeurs sont disposés à dépasser cette enveloppe. Proposer des prix plus adaptés à la demande était justement le grand pari du logement subventionné pour la classe moyenne (voir encadré). Les acquéreurs y trouvent donc largement leur compte, ce qui est loin d'être le cas pour les promoteurs immobiliers. Ceux-ci ont dès le départ buté sur le prix du logement subventionné. Il est vrai qu'en pratiquant un tarif de 6.000 DH/m2, les promoteurs immobiliers seraient amenés à vendre le logement pour la classe moyenne au même prix que le logement social (commercialisé à 250.000 DH HT pour des surfaces autour de 50 m2, soit 5.800 DH/m2) tout en proposant en théorie des prestations de meilleure qualité. Faible concrétisation des engagements des développeurs Mais les choses ne sont pas restées bloquées à ce niveau, et pour faire adhérer les promoteurs au dispositif, le ministère de l'habitat a rapidement brandi des promesses d'incitations supplémentaires. Entre autres, il était question de faire bénéficier les développeurs sur le segment d'un taux d'IS préférentiel, sans que cela n'aboutisse en fin de compte. L'Habitat a aussi joué la carte de la mise à disposition du foncier public avec un modèle de partenariat public-privé avec Al Omrane, sans plus de succès. Le département de tutelle est parvenu finalement à retenir l'attention des professionnels en promettant des dispositions urbanistiques avantageuses pour le dispositif. L'idée du ministère était d'ouvrir la voie pour les programmes de logement pour la classe moyenne à une optimisation des normes d'urbanisme en vigueur, en termes de densité et de verticalité, pour améliorer la rentabilité des projets. En effet, en construisant sur de plus grandes hauteurs avec une plus grande densité, les promoteurs peuvent espérer mieux rentabiliser leurs programmes. Cette promesse a stimulé l'appétit des développeurs. C'est ainsi qu'une convention cadre a été signée entre le ministère et la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) pour la réalisation de 20.000 logements. Près de 14.000 logements ont été effectivement conventionnés avec le secteur privé dans ce sillage, ce à quoi s'ajoutent près de 3.000 paraphés avec Al Omrane. Mais l'Habitat a tardé à tenir sa promesse. A sa décharge il faut préciser que l'assouplissement des normes urbanistiques en vigueur n'est pas de son seul ressort. Les ministères de l'urbanisme et de l'intérieur y ont aussi leur mot à dire, et il faut dire qu'ils n'ont pas suivi le ministère de l'habitat sur son terrain, selon les indiscrétions du département de Benabdellah. Cela a fait que les développeurs ont in fine concrétisé une très faible portion de leurs engagements. Dans tout cela, les ménages de la classe moyenne doivent encore prendre leur mal en patience avant de voir arriver une offre qui s'adapte réellement à leurs besoins.