Plus de quarante familles vivent dans des conditions insalubres sur le boulevard Sour Jdid, dans les parages de Chnider, souk « Aoua », pas loin de la Mosquée Hassan II à Casablanca. Reportage. Depuis la fin du mois d'août, plus de quarante familles sont installées dans de petites baraques, dans l'attente d'être évacuées dans des habitations salubres au lotissement « Nassim », selon les promesses des responsables communaux de la commune de Moulay Youssef, au moment de l'évacuation. Sur une petite ruelle donnant sur le boulevard Sour Jdid, dans les parages de Chnider, souk « Aoua », pas loin de la mosquée Hassan II, les petites baraques sont alignées. Un spectacle choquant. Un cas social qui interpelle à plus d'un titre. Une seule toilette pour l'ensemble des familles. L'insalubrité de l'habitat à son paroxysme. Les détritus et les déchets ménagers, qui se trouvent amoncelés au coin des baraques, forment des monticules dégageant des odeurs nauséabondes qui agressent l'odorat de ces pauvres habitants. Ces derniers, notamment les femmes, qui ne peuvent rester à l'intérieur de la petite « demeure » en raison de son étroitesse passent presque toute la journée devant ce bidonville. Le sujet qui anime leurs discussions s'articule toujours autour de leur sort. « Nous nous sentons comme des réfugiés privés de tous nos droits. Nous vivons dans des conditions inhumaines. Depuis plus de deux mois que nous sommes dans cette situation lamentable. Le grand problème est que cette situation inadmissible risque de durer longtemps », affirme Fatma ben Ahmed, les quarantaines, mère de cinq enfants. Trois groupes, trois cas différents, forment ces familles, qui vivent aujourd'hui ensemble comme des proches. Leur malheur est commun. Le premier groupe est formé de familles qui habitaient à Chnider, depuis plus de quarante ans. Leurs parents y travaillaient dans le temps comme des gardiens avec des étrangers qui étaient sur place. « Mon père dépasse maintenant 111 ans. Je suis né et grandi à, Chnider. On nous a évacués d'une façon inhumaine la fin du mois d'août dernier », souligne Fatma ben Ahmed. Le deuxième groupe est constitué des victimes des habitations vétustes, ou menaçant ruine, il y a environ six ans, dans l'ancienne médina. Depuis 1996, elles habitaient dans des tentes installées aux côtés des autres habitations à Chnider. En 1999 d'autres familles, qui résidaient dans des anciennes habitations, furent transférées également dans des tentes sur le même endroit. Depuis lors, toutes ces familles attendent une solution leur permettant d'habiter dans des gîtes salubres. Cette attente qui n'a que trop duré a débouché sur le pire. Un autre bidonville catastrophique. « Depuis que mes enfants commençaient à comprendre, on leur disait d'attendre. Il y aura une solution à notre problème. Maintenant, ils ont grandi et l'on attend toujours. En plus, ces conditions de vie ont des répercussions négatives sur le parcours scolaire de nos enfants. La majorité n'a pas pu résister pour poursuivre ses études. C'est ça notre sort », ajoute Fatma bent Ahmed, les larmes aux yeux. Toute sa vie, ainsi que celle de ses voisines, est marquée par l'attente. Depuis des années. Et elles attendent encore. Jusqu'à quand ? C'est la question qui se pose et s'impose chaque jour au sein de ces familles.