Saddam Hussein a supplanté Ben Laden Comme premier ennemi de Washington. Ariel Sharon reçoit l'ordre de Bush de garder un profil bas. L'Amérique estime qu'il existe de «forts risques» que l'Irak lance une attaque surprise contre les Etats-Unis ou n'équipe, dans le même but que Ben Laden, des terroristes avec des armes biologiques, chimiques ou nucléaires. Si les Nations Unies se révèlent incapables de neutraliser l'Irak, «les Etats-Unis agiront délibérément et prendront la tête d'une coalition pour retirer les pires armes du monde des mains de l'un des pires dirigeant du monde», a averti Bush. Il y a un an, le président américain avait lancé la traque contre Ben Laden en déclarant à la presse une semaine après les attentats orchestrés par ce fondamentaliste : «Je veux la justice. Il y a une veille affiche au Far West où, si je me souviens bien, il y a écrit recherché mort ou vif-». Au plus haut dans les sondages, George Bush décide de s'en prendre à un nouvel ennemi public numéro un, Saddam Hussein. Selon les Etats-Unis, ce dernier est le commanditaire d'un attentat manqué à la voiture piégée en avril 1993 contre l'ancien président George Bush père. «Il ne fait pas de doute qu'il ne peut pas nous supporter. Après tout, c'est un gars qui a essayé autrefois de tuer mon père», a affirmé récemment l'actuel président, en donnant au dossier irakien une tournure toute personnelle. Cet accent mis sur l'Irak survient alors que depuis quatre mois les sondages d'opinion montrent que les Américains sont de plus en plus divisés sur les résultats de la guerre lancée contre le terrorisme en l'absence d'indications précises sur le sort d'Oussama Ben Laden. Selon un sondage Gallup, la moitié des Américains estimait que l'intervention militaire américaine en Afghanistan ne pouvait être considérée comme un succès tant que Ben Laden n'a pas été capturé. Depuis Bush et les principaux dirigeants américains ne cessent de minimiser l'importance du sort des leaders des Talibans et d'Al Qaïda encore en fuite. L'opposition à une éventuelle action militaire américaine en Irak se fait entendre aux Etats-Unis même. Aux cris de «non à la guerre», des milliers d'Américains se sont réunis dans plusieurs Etats pour protester contre la politique de leur président à l'égard de l'Irak. Des protestations qui coïncident avec les manifestations prévues devant les ambassades américaines dans le monde entier un an après le début des frappes sur l'Afghanistan. Le mouvement pacifiste américain réunit d'influents intellectuels, des militants des droits de l'Homme, des écrivains ou des écrivains engagés, comme Noaam Chomsky, Russel Banks ou l'actrice Susan Saradon. Dans ce même volet, Washington cherche à neutraliser les critiques des pays arabes modérés à l'égard de sa campagne contre l'Irak. C'est pourquoi, il veut obtenir d'Israël qu'il agisse comme pendant la guerre du Golfe en 1991. Les Etats-Unis exigent du gouvernement israélien qu'il s'abstienne de toute déclaration au sujet de Bagdad. Apparemment agacée par les récentes déclarations de responsables israéliens, l'administration américaine n'a pas attendu la visite de Sharon, la septième depuis son arrivée au pouvoir en mars 2002, pour faire passer un message clair en ce sens. Il y a quelques jours, le ministre israélien de la guerre Binyamin Eliezer a estimé que les Etats-Unis pourraient lancer une offensive contre l'Irak fin novembre et qu'Israël « était prêt à faire face à toutes les éventualités». Le chef d'état-major de l'armée israélienne enfonçait le clou et affirmait que «si l'Irak nous attaque, Israël saura se défendre». Hier Sharon a appelé ses ministres à l'ordre en leur demandant de se taire sur ce sujet, relayant ainsi, a-t-il précisé, une requête de son principal allié. Il a souligné que les déclarations intempestives causaient du tort aux Etats-Unis: «Les Américains veulent simplement que nous nous taisions. Rien de ce que nous dirons ne les aidera», a-t-il précisé. En échange, les Etats-Unis ont promis de détruire, dès le début de leur offensive, d'éventuels lanceurs de Scud, selon la presse qui indique également que les Israéliens ont reçu l'assurance d'être prévenu 72 heures à l'avance du début de l'offensive américaine. Les mains liées sur l'Irak, Sharon a également reçu un message similaire concernent les Palestiniens, tranchant avec des mois de communion de vue entre Washington et Tel-Aviv. Les Etats-Unis ont donné un avant-goût de leur nouvel fermeté à l'égard de Sharon au sujet de la crise de la Moukataâ. Après dix jours de siège et de pression américaine, l'armée israélienne avait fini par retirer ses troupes. Enfin, Bush veut éviter que l'installation au Liban Sud de nouvelles pompes de captage des eaux du fleuve Ouazzani, qui finissent par s'écouler aussi en Israël, vienne empoisonner la gestion de la crise irakienne.