Le responsable du groupe acridien au siège de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) à Rome estime que la lutte antiacrédienne nécessite des fonds énormes. M. Clive parle du rôle de l'organisation pour combattre ce fléau. ALM : Vous êtes le responsable du groupe acridien au siège de la FAO à Rome. Avez-vous des informations concernant l'avancée des essaims de criquets dans le Souss marocain? Elliott Clive : Effectivement, nous suivons de près la situation au Maroc, au même titre que dans les autres pays concernés par la menace acridienne. J'ai eu, lundi matin, un entretien téléphonique avec Saïd El Ghaout, le responsable de la Centrale de lutte anti-acridienne à Aït Melloul. Il m'a informé que les équipes marocaines ont traité pas moins de 100.000 hectares uniquement dans la journée du dimanche. Il m'a également assuré que 60% de cette superficie totale ont été traités dans la vallée du Souss. L'avancée des essaims notamment dans la région de Tiznit a-t-elle causée des dégâts sur les cultures? J'ai posé cette question à M. El Ghaout, mais il n'avait pas d'informations précises à ce sujet. En effet, il se trouvait au Sénégal dans le cadre de la coopération entre les Etats du Maghreb et du Sahel pour lutter contre la progression des essaims de criquets. Notez également que les criquets ayant pénétré au Maroc sont, en fait, des essaims immatures en provenance du Sahel. A cause des conditions climatiques assez sèches au Sud du Maroc et au Nord de la Mauritanie, ces essaims risquent d'aller au-delà de la région du Souss. Jusqu'où ces criquets peuvent-ils aller au Maroc? Normalement, la migration des criquets s'opère dans la direction du Nord/Nord-ouest. Les essaims privilégient aussi les couloirs côtiers. Je pense que leur progression sera stoppée par la barrière formée des montagnes de l'Atlas. Justement, j'ai appris que les précipitations n'ont pas encore commencé dans la région du Sud de l'Atlas. C'est une bonne nouvelle concernant les conditions de reproduction des criquets. Le Maroc et l'Algérie ont donc l'opportunité de combattre plus facilement l'avancée des essaims de criquets. En fait, la reproduction des criquets s'opère avec les pluies du printemps, c'est-à-dire au mois de février. Toutefois, si les pluies viennent avant l'heure, les criquets se reproduisent plus tôt. Quels rôle joue la FAO dans la lutte anti-acridienne au Maroc et ailleurs? Nous participons au financement de la lutte anti-acridienne. La FAO a consenti au Maroc une aide de 1,5 million de dollars. C'est une simple participation, bien évidemment. La FAO, qui fait ce qu'elle peut, a appelé les Etats membres de l'organisation à créer un fonds d'urgence destiné à lutter de manière rapide et efficace contre la menace acridienne. A ce titre, nous avons estimé le besoin en financement de cette lutte à 100 millions de dollars. Malheureusement, la réponse des Etats membres a été un peu lente. Ce qui nous a causé beaucoup de problèmes sur le terrain. Vers la mi-septembre, la FAO a reçu 2 millions de dollars. Cette somme est extrêmement insuffisante. Ce qui a poussé notre directeur général à rappeler les Etats membres de la gravité de la situation. Aujourd'hui, nous n'avons reçu que 45 millions de dollars et prochainement, nous recevrons 25,5 millions de dollars supplémentaires. Cette somme vient, hélas, trop tard. Si nous l'avions reçue au mois de juillet la situation, aujourd'hui, aurait été beaucoup moins grave. Au Maroc, le budget de l'Etat est sérieusement grevé par le financement de la lutte anti-acridienne. Qu'en pensez-vous? Je sais que le gouvernement marocain a dépensé, lors de la dernière saison printanière, pas moins de 40 millions de dollars. Je pense qu'aujourd'hui, cette somme a augmenté. Vous savez, la lutte anti-acridienne nécessite énormément de fonds. Et les pays touchés ne les ont forcément pas. D'où l'importance de la solidarité internationale. Justement, comment se présente la coopération entre les différents pays touchés par ce fléau? Il y a une excellente solidarité entre les pays du Nord et ceux du Sahel. Des pesticides, des avions de traitement, des équipes, des véhicules, etc. sont mis à la disposition des pays touchés : la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Maroc, l'Algérie, la Libye et, à moindre mesure, la Tunisie.