À partir du 21 octobre, commence la centralisation des dossiers au niveau des tribunaux de première instance et des Cours d'appel. Destinée à faciliter la vie aux justiciables, cette opération ne fait pas l'unanimité auprès des professionnels de la justice. Branle-bas de combat dans les tribunaux de Casablanca. Depuis quelques jours, un ballet incessant de chariots transportant les dossiers d'archives anime les allées des tribunaux. «Avec tout ce que cela comporte comme risque de pertes de dossiers pendant le déménagement» fait remarquer, interloqué, un avocat du barreau de Casablanca. En effet, les tribunaux de la métropole s'apprêtent à troquer, une énième fois, leurs compétences. À partir du 21 octobre, les tribunaux céderont leur compétence territoriale pour une compétence matérielle par objet. Un changement qui implique la centralisation des dossiers au niveau des tribunaux de première instance et des Cours d'appel. Concrètement, le tribunal de première instance d'Anfa, deviendra le tribunal de première instance du Grand Casablanca et siégera en exclusivité dans les affaires civiles et sociales. Le tribunal des Roches Noires se chargera des affaires correctionnelles et délictuelles. Celui du Derb Soltan-El Fida devient le tribunal de la famille. Quant aux Cours d'appel, elles devraient disparaître laissant place à une seule grande Cour qui a élu domicile au quartier d'El Oulfa. Officiellement, cette nouvelle configuration fait partie des corrections apportées à la carte judiciaire, élément fondamental de l'accès à la justice. Si le principe est bon, ce redéploiement ne fait pas pour autant l'unanimité au sein des professionnels de la justice. Premier grief : le timing du redéploiement, mal choisi pour mener une opération de cette envergure. Pour preuve, «le grand nombre de affaires retardé pour cause de déménagement, alors qu'on est en pleine rentrée judiciaire. On aurait pu envisager cette opération pendant les vacances judicaires, là où il y a moins de pressions sur les tribunaux» renchérit un avocat de l'ordre de la ville. D'autres professionnels soulèvent des questions de logistique : «Comment envisager un fonctionnement correct des futures juridictions avec la même infrastructure et les mêmes fonctionnaires ?» fait observer un autre avocat. Ce dernier cite comme exemple le cas du local de la future cour d'appel. Alors que ce tribunal sera amené à traiter l'ensemble des affaires pénales de la métropole, seules les salles 5, 6, 7, 8 et 9 peuvent accueillir les accusés en état d'arrestation puisque les autres ne disposent pas d'un accès vers les geôles du tribunal. Ce qui rend de fait inexploitables ces derniers pour ce genre d'affaires, qui vont naturellement augmenter. D'autres interrogations persistent également quant aux futures attributions ( qui restent encore floues) des présidents des tribunaux, sachant que ces derniers ont été nommés, au même titre que leurs homologues de Rabat par un Dahir spécial. Pour rappel, c'est la loi n° 1-74-338 du 15 juillet 1974 relative à l'organisation judiciaire du royaume qui fixe dans son article 2, l'organisation des tribunaux de première instance. Dans l'ancienne configuration, chaque tribunal de première instance était divisé en chambres selon la nature des affaires qui leur sont soumises. Ces tribunaux disposaient d'une compétence générale qui s'étend à toutes les affaires civiles, immobilières, pénales et sociales. Les Cours d'appel comprenaient également un certain nombre de chambres spécialisées dont une chambre de statut personnel et successoral et une chambre criminelle. Ce dernier redéploiement devrait, en principe, simplifier la vie aux justiciables de la ville de Casablanca en centralisant les affaires en fonction de leur nature. Atteindre cette ambition reste cependant tributaire de bon déroulement de l'opération, ce qui n'est toujours pas le cas.