Après quelques mois de répit, le bras de fer entre le gouvernement et les syndicats vient de reprendre. Quatre des principales centrales syndicales du pays ont annoncé hier, mardi, une série de mesures de protestation pour pousser le gouvernement à répondre aux revendications de la classe ouvrière. Dans un communiqué de presse rendu public à l'issue d'une rencontre avec les médias, l'Union marocaine du travail (UMT), la Confédération démocratique du travail (CDT), l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM) et la Fédération démocratique du travail (FDT) ont annoncé une grève nationale de la fonction publique et des collectivités locales le 10 décembre prochain. Cette mesure sera la troisième d'une série qui débutera avec une marche ouvrière «pacifique», souligne le communiqué, le dimanche 29 novembre à Casablanca, suivie d'un rassemblement ouvrier le 8 décembre. Après cette protestation en trois temps, les centrales syndicales n'auront pas abattu toutes leurs cartes. Elles menacent d'une grève générale qui touchera les établissements privés, publics, semi-publics et les collectivités locales. Sa date devrait être fixée ultérieurement. Que veulent les syndicats ? «Des réponses concrètes et rapides aux revendications des salariés», répond Miloudi Moukharik, secrétaire général de l'UMT, dans une déclaration à ALM. Dans la pratique, cela voudrait dire, entre autres, l'augmentation des salaires, la baisse de l'Impôt sur le revenu (IR) et la prise en compte de la position des salariés en ce qui concerne la réforme des retraites. «Nous avons utilisé tous les moyens en notre pouvoir et attendu plus de trois mois pour que le gouvernement réponde aux revendications légitimes des travailleurs», explique Moukharik. La goutte qui a fait déborder le vase serait, selon le secrétaire général de l'UMT, le projet de loi de Finances 2016 présenté par le ministre de l'économie et des finances le mois dernier. «Il ne prend pas en compte les intérêts des salariés. Ils sont les seuls à payer autant d'impôts avec l'IR», s'indigne le syndicaliste. A cela vient s'ajouter la réforme des retraites que l'Exécutif est accusé de vouloir faire passer de force «en dépit des intérêts de la classe ouvrière». Rappelons que la question des retraites avait fait l'objet d'un débat houleux entre le gouvernement et les syndicats il y a un peu plus d'une année. Si pour Moukharik, «le gouvernement doit apprendre des leçons des expériences précédentes», l'espoir d'une réponse immédiate, et dans le calme, de l'équipe de Benkiran semble plutôt mince. «Les syndicats ont, bien évidemment, le droit de recourir à la grève, mais je ne pense pas que ce soit la meilleure solution pour le moment», commente Mohamed Moubdie, ministre délégué chargé de la fonction publique et de la modernisation de l'administration, dans une déclaration à ALM. «Le gouvernement ne refuse pas d'augmenter les salaires mais nous avons également des contraintes», temporise le ministre, rappelant que «les salaires de la fonction publique coûtent déjà 11% du PIB (Produit intérieur brut, ndlr)». Concernant l'épineux dossier de la réforme des retraites, Mohamed Moubdie a totalement fermé la porte des négociations. Selon lui, «cette question ne peut pas faire l'objet de débat indéfiniment puisque les pertes augmentent avec chaque jour de retard». Le gouvernement n'a pourtant pas intérêt à faire la sourde oreille aux revendications d'un mouvement syndical représentant 80% des délégués du personnel et 14 des vingt sièges réservés aux syndicats dans la Chambre des conseillers.