Lorsque les 200 élèves qui poursuivent leurs cours à l'école Sidi Ziyane saluent le drapeau national chaque lundi à 8h du matin, c'est toute une histoire en faits marquants qui défile dans leurs imaginaires d'enfants. Ils savent que leur école est la première école moderne du Maroc. Mais perçoivent-ils la charge historique d'un haut lieu de savoir qui a vu plusieurs hauts commis de l'Etat user leurs culottes d'écoliers sur ses bancs. C'est le cas des Osman, Saâdi, Benharbite, Achachi, Ben Abdellah, Derraji. Fondée en 1907 au moment où la France entamait son forcing militaire pour coloniser le Maroc, l'école Sidi Ziyane fut la première école moderne du Maroc. Oujda, étant la première ville marocaine à tomber entre les mains des forces coloniales, fut aussi la ville qui allait connaître l'édification de plusieurs bâtiments administratifs. Ils seront les premiers du Maroc moderne. C'est le cas de la gare ferroviaire, du lycée, de l'école primaire, de l'état-major militaire et de l'école pour filles (l'actuelle Oum Albanine) entre autres. C'est en octobre 1907 que l'école urbaine musulmane d'Oujda fut édifiée et a ouvert les portes de ses deux classes pour accueillir ses 23 premiers élèves. Trois années par la suite, l'école comptait 103 élèves qui sont passés à 220 en 1913 dont 66 Européens et 154 Marocains et Algériens. Sidi Ziyane fut baptisée dans un premier temps l'école arabe française, puis l'école urbaine musulmane de la place Sidi Ziyane, avant de prendre définitivement l'appellation actuelle. L'enseignement dispensé était basé sur l'apprentissage de la langue française et sur les connaissances des sciences modernes. En 1910, l'école comptait quatre branches pour l'enseignement technique: enseignement technique, menuiserie, jardinage et tissage et broderie. En octobre 1940, les cours du secondaire ont débuté. En 1952, l'école Sidi Ziyane est devenue aussi un centre de formation pour instituteurs, école de travaux pratiques et cantine principale de la ville. Seize directeurs se sont succédé sur la gestion administrative de l'établissement. Le premier se nommait Ahmed Bennassef (1907-1914), l'actuel directeur n'est autre que Mohammed Mbarki. Sept Français ont occupé le même poste de 1914 à 1956. Et c'est feu Yahia Laâtigui qui a géré l'école pour une longue période (23 ans : 1960 à 1983). L'école s'étale sur une superficie de 3451 m2 et compte 12 salles d'études en plus du bloc administratif, la bibliothèque et les maisons administratives. Sidi Ziyane a été rénovée à quatre reprises : 1929, 1940, 1990 et 2006. Pour Mustapha Moumni, le plus ancien des enseignants de l'école (depuis 1976), «cette école représente, pour moi, beaucoup de choses. D'abord lorsque les français l'avaient construite, ils ont édifié deux classes avec deux dômes pour lui donner un semblant de mosquée. C'est dire l'importance du savoir pour toutes les religions du moment que chrétiens, juifs et musulmans cohabitaient merveilleusement dans cette école. Pour moi, Sidi Ziyane est un lieu béni qui a permis à des générations de passer du stade d'analphabète au stade d'érudit. Sidi Ziyane c'est mon école, ma demeure et mon lieu sacré». Il est à préciser que, dans un premier temps, l'apprentissage de la langue arabe et des valeurs musulmanes était tout simplement exclu. C'est à partir de cette école que l'enseignement de la langue française fut généralisé au Maroc et est devenu une langue obligatoire de travail. Il faut aussi signaler qu'en 1907, il y avait une Médersa et plusieurs écoles coraniques qui constituaient le système éducatif local. C'est le cas de la célèbre Médersa Mérinide. Les matières enseignées s'articulaient autour de la grammaire arabe, la jurisprudence, l'enseignement du Coran, l'écriture et la lecture. Les études étaient d'un bon niveau mais ne facilitaient guère l'acquisition des nouveaux savoirs, d'où l'importance de l'apport d'une école moderne.