Le 27 janvier 1976, éclata la deuxième guerre entre l'Algérie et le Maroc. En fait, ce dernier pays affirmait ses visées territoriales sur ce Sahara, tandis que l'Algérie méditerranéenne, refusant l'extension de son voisin, aspirait à un «couloir» vers l'Atlantique, qui, outre son caractère politique et stratégique, lui permettrait d'évacuer notamment son minerai de fer de Gara Jbilet. Faisons cependant un bref historique. Dès 1955, depuis le Caire, Allal El Fassi avait produit une carte du Grand Maroc des Almoravides qui se terminait aux frontières du Sénégal, une revendication adoptée par son parti l'Istiqlal et publiée dans son journal El Alam, (juillet 1956). L'armée de libération marocaine envahit en 1957 la région nord du Sahara espagnol ; elle ne sera refoulée qu'en février 1958 par la Légion étrangère espagnole, aidée par des unités françaises du sud algérien et de l'AOF (Afrique occidentale française). Le 25 février 1958, le Roi MohammedV affirmait officiellement, que son pays «poursuivrait son action pour la restitution du Sahara au Maroc», peuplé alors de quelque 75 000 âmes, selon le recensement espagnol. Le 28 novembre 1960, naissait la Mauritanie. En 1963, l'Espagne projette d'exploiter les gisements de phosphates de Bou Krâa, qui couvrent 250 km² avec des réserves de 2 milliards de tonnes à ciel ouvert, et décide de construire à El Ayoun, un quai pour des minéraliers de 100 000 tonnes, tout en édifiant à Huelva, en Espagne, plusieurs usines d'acide phosphorique. En 1971, le général Franco – dont le gouvernement a toujours considéré le Sahara occidental comme «Terras nullus» (terre sans maître) au moment où les Espagnols se sont installés – et n'ayant aucunement l'intention de se dessaisir du Sahara au profit de l'un ni de l'autre, répond ainsi à la démarche du Roi du Maroc qui lui rend visite à Madrid : «Ce que vous me demandez, Majesté, est un suicide auquel ni moi ni l'Espagne ne sommes disposés…». Peu après, Hassan II, recevant le ministre espagnol Lopez Bravo, lui demande: «…Donnez-moi l'engagement que vous n'accorderez pas l'indépendance au Sahara… Je suis prêt à accepter encore une présence coloniale espagnole… parce que ce territoire m'appartient…». En septembre 1973, Franco, dans un message à l'Assemblée locale (la Jemâa) proclame que le «peuple sahraoui est le seul maître de son destin et que l'Espagne assurerait son intégrité». En octobre 1974, par un accord secret entre Hassan II et Ould Daddah, on assiste à la partition du Sahara : Saguiet El Hamra pour le Maroc et le Rio de Oro pour la Mauritanie. Le 10 décembre, l'Assemblée générale de l'ONU décide de soumettre l'affaire du Sahara à la Cour internationale de justice pour avis consultatif. Le 2 novembre 1975, le prince Juan Carlos se rend à Laâyoune et déclare : «l'Espagne tiendra ses engagements au Sahara». Le 6, c'est la «Marche verte» avec 20 000 marcheurs qui pénètrent au Sahara. Le 9, le Roi annonce : «La Marche a atteint son objectif». Le 14 novembre 1975, à Madrid, un accord tripartite est signé entre l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie. L'Espagne acceptait de mettre fin à sa colonisation du Sahara pour le 28 février 1976, la transition étant assurée par une administration à trois : un gouverneur espagnol et deux adjoints marocain et mauritanien. On respectera toutefois «l'opinion de la Jmâa» : l'assemblée des habitants du Sahara. Une société d'exploitation des phosphates est créée: avec 65 % de participation marocaine et 37 % espagnole. D'autres arrangements conclus restaient secrets. • Tahar Belkhodja