Cette rentrée scolaire 2015-2016 aura été la première après la présentation du rapport très attendu du Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS). Le changement commence-t-il déjà à se faire ressentir ? «Nous avons étudié le rapport du conseil et nous en sommes sortis avec 26 projets à appliquer sur le court, le moyen et le long termes», a déclaré le ministre de l'éducation nationale et de la formation professionnelle, Rachid Belmokhtar, lors d'un point de presse hier, lundi, à Rabat. Selon le ministre, certaines réformes ne sont pas à attendre tout de suite. Le changement du curriculum dans son ensemble, par exemple, est un grand chantier qui devrait nécessiter près de 15 années. «En revanche, la révision de l'approche pédagogique pour les quatre premières années du primaire est une urgence», a expliqué le ministre. Cette année, près de 300.000 élèves constituant des classes pilotes devraient d'ores et déjà bénéficier d'un nouveau modèle d'apprentissage des langues, notamment l'arabe. «La manière dont les langues étaient enseignées était quasi inefficace», a noté le ministre, rappelant les diverses études qui avaient été menées dans ce sens l'année dernière. La désignation de classes pilotes à travers le Royaume pour l'application de ces réformes permettra, d'après Rachid Belmokhtar, de mesurer l'efficacité de ces mesures au fur et à mesure de leur application, permettant ainsi de meilleurs résultats après leur généralisation. Cette mesure s'accompagnera, par ailleurs, d'un complément de cours de langue pour les élèves de 5ème et de 6ème années du primaire pour rattraper le manque dont ils souffrent, une approche qui aurait donné ses fruits dans plusieurs pays, dont l'Egypte, selon le ministre. De manière globale, le ministre de l'éducation nationale parle de 23 mesures prioritaires qui seront appliquées dès cette rentrée. La plupart concernent le volet pédagogique, celui de la gestion, mais également la lutte contre l'abandon scolaire. Outre la question de l'apprentissage des langues, et plus globalement celle de l'amélioration du curriculum des quatre premières années du primaire, ces mesures comprennent également l'extension du nombre de filiales du baccalauréat professionnel, l'amélioration du système d'orientation scolaire ou encore la réévaluation des seuils de passage inter-niveaux et inter-cycles. «Il n'est pas normal que nous ayons des élèves qui passent du primaire au collège, ou du collège au lycée avec des moyennes extrêmement basses», a commenté Rachid Belmokhtar. Rappelons que l'annonce de ces mesures d'urgence intervient quelques jours après les déclarations alarmantes de Omar Azziman, président du CSEFRS, qui avait assuré que l'école publique marocaine risquait une «crise cardiaque». Le ministre de l'éducation nationale et de la formation professionnelle partage, visiblement, cette opinion. «La situation de notre enseignement est sans aucun doute lamentable», a-t-il déclaré, ajoutant que «le diagnostic a été fait. Nous savons exactement de quoi souffre notre système éducatif, il ne nous reste qu'à appliquer des solutions adaptées». La rentrée 2015-2016 en chiffres Ils sont au total plus de 6,88 millions d'élèves à avoir regagné les bancs de l'école cette rentrée, soit 3,6% de plus que l'année dernière. La majorité de ces élèves est inscrite aux établissements primaires (4,14 millions), contre 1,7 million au secondaire collégial et un peu plus d'un million au secondaire qualifiant. Ceux du collège ont, en revanche, connu la hausse la plus importante avec 5,8% de plus qu'en 2014-2015. En ce qui concerne l'offre scolaire déployée par le ministère, il existe aujourd'hui un total de 10.805 établissements d'enseignement qui se partagent 164.741 salles de cours. Cela veut dire que, sans considérer la moyenne par niveau, le nombre moyen d'élèves par classe est de 41. Le nombre d'internats est, lui, de 832. En ce qui concerne le personnel enseignant, il est au nombre de 229.667, «dont 466 professeurs spécialisés dans l'enseignement de la langue amazighe», tient à préciser le ministère. Notons que le nombre d'enseignants pour le primaire a chuté de 0,9%, ce qui explique en partie l'aggravation du problème de surpeuplement des salles de classe, tandis que le nombre d'enseignants pour le cycle secondaire collégial et qualifiant a augmenté de, respectivement, 2,9 et 7,7%. Du côté des nouveaux inscrits en première année du primaire, ils sont, en cette rentrée, au nombre de 676.376, soit 3,9% de plus que l'année dernière. Moins de 20% d'entre eux sont inscrits dans des écoles privées, tandis qu'un peu moins de la moitié (309.401) sont dans le milieu rural. Précisons, enfin, que le nombre de bénéficiaires de l'Initiative «Un million de cartables» a atteint cette année près de 4 millions. L'abandon scolaire, un problème de qualité Pourquoi les élèves quittent-ils l'école? Le taux d'abandon scolaire est le plus élevé lors du passage du primaire au collège, la raison évoquée le plus souvent est la distance entre les domiciles des élèves et les établissements collégiaux. «La question de la distance n'est la raison de l'abandon que dans 10 à 11% des cas», selon le ministre, Rachid Belmokhtar, qui explique que 32% des élèves qui quittent l'école le font simplement parce qu'ils ne l'aiment pas. «Si nous améliorons la qualité de l'enseignement, le taux d'abandon baissera», a-t-il conclu.