La Grande-Bretagne avait opposé une fin de non-recevoir à la demande des autorités marocaines concernant Mohamed Garbouzi, soupçonné d'être l'un des commanditaires des attentats du 16 mai. Cet islamiste avéré est introuvable depuis le 11 mars. Il est marocain. Il y a quelques semaines, on pouvait encore le voir à Londres, très actif dans les associations musulmanes, ou encore à la télé, devisant sur la géopolitique, sous l'œil attentif des animateurs, visiblement impressionnés par cet homme qui se réclame ouvertement du «Groupe marocain des combattants islamiques». Il est suspecté d'être entré en Grande-Bretagne en compagnie d'un certain Imad Eddin Barakat Yarkas, plus connu sous le nom de guerre de Abou Dadda, né syrien, devenu espagnol et recherché par Madrid depuis plus de deux ans pour appartenance au groupe Al Qaïda. Mohamed Garbouzi fait partie de l'un de ces présumés terroristes, souvent recherchés dans leurs pays d'origine, fichés par Interpol, mais étrangement libres dans Londres. Soupçonné de contacts rapprochés avec Jamal Zougam, arrêté dans le cadre de l'enquête sur les attentats du 11 mars où 190 personnes ont péri, Garbouzi est en cavale aujourd'hui. Le Maroc avait demandé son extradition bien avant les attentats de Madrid, mais la Grande Bretagne, terre d'asile, est restée sourde aux appels pressants de Rabat. Non seulement, toutes les demandes d'extradition furent sans suite, mais en plus, Garbouzi, franc parleur, homme de télé, serait même devenu au fil du temps, un collaborateur des services de contre-espionnage britannique, d'après le journal «The Indépendant». Aujourd'hui, le monsieur sécurité de la Grande-Bretagne, David Blunkett, sonne lui-même le tocsin, «il est temps de couper la tête à la pieuvre», dit-il à la conférence des ministères européens de l'Intérieur et de la Sécurité, tenue à Bruxelles, vendredi dernier. Beaucoup de services européens ont critiqué l'attitude de la Grande-Bretagne pour avoir refusé un certain temps de s'intéresser aux cas sympathisants déclarés d'Al Qaïda, comme Garbouzi. La police pense que le marocain a rencontré l'imam radical Abou Qatada, considéré par les services comme étant «le leader spirituel» de la mouvance islamiste en Europe, par ailleurs locataire habituel des prisons britanniques, où il est resté au moins une année. Le même Abou Qatada aurait proposé dans les années 90 à apporter sa contribution pour préserver Londres d'un attentat. L'imam d'origine palestinienne est retourné en prison, ayant fait les frais de la nouvelle législation anti-terroriste adoptée en Grande-Bretagne suite aux attentats du 11 septembre. Les documents confidentiels dont ont eu accès certains organes de presse révèlent que l'Imam a bien rencontré des responsables des services de sécurité britannique à plusieurs reprises dans les années 1990. Beaucoup sont convaincus aujourd'hui que les liens entre Zougam et Garbouzi conduisent à une connexion certaine avec les attentats de Madrid. Le lien avec les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca serait aussi évident. La presse avait révélé peu après ces attentats, l'arrestation par les autorités marocaines, d'un diplômé de physique, Saâd Al-Houssaini, sans qu'il y ait confirmation ou infirmation de la nouvelle. Le même journal, qui avait donné l'information, avait ajouté que Said Houssaini est supposé être un aide de camp de Mohamed Garbouzi. Les enquêteurs européens sont aussi sur cette piste. Aujourd'hui, en Grande-Bretagne, Garbouzi est activement recherché. La police londonienne enquête pour déterminer si le Marocain djamal Zougam, qui l'a rencontré, s'était rendu en Grande- Bretagne pour y chercher des fonds et un appui logistique. Le chef de la police britannique, John Stevens, a déjà déclaré qu'il y a un «lien formel dans les événements».