Rachid Yazami, un éminent chercheur marocain a remporté, lundi, le prix Charles Stark Draper 2014 de la prestigieuse National Academy of Engineering (NAE) de Washington DC. En reconnaissance à ses travaux déterminants dans le développement des batteries lithium rechargeables, il y a 30 ans. Yazami partage cette distinction avec l'Américain John B. Goodenough, et les Japonais Yoshio Nishi et Akira Yoshino, qui ont également contribué à cette conquête scientifique et industrielle. Doté de 500.000 dollars US, le trophée, considéré comme le prix Noble pour les ingénieurs, sera décerné le 18 février à la capitale américaine, lors d'une cérémonie spéciale qui marquera cette année le 25e anniversaire du Prix Draper. Un parcours de génie: Rachid Yazami a effectué ses études aux Lycées Moulay Rachid et Moulay Driss à Fès où il obtient le baccalauréat en sciences mathématiques en 1971. Après une année à l'Université Mohamed V de Rabat, il rejoint la ville française de Rouen où il intègre les classes préparatoires aux grandes écoles, avant d'être admis en 1978 à l'Institut Polytechnique de Grenoble (INP), où il travaille depuis. Après l'obtention d'un diplôme de Grenoble INP (Phelma, ex-ENSEEG), Rachid Yazami effectue un doctorat au laboratoire d'Adsorption et Réaction de Gas sur Solide associé au CNRS sur les composés d'insertion du graphite, qui sont des matériaux complexes utilisés dans les électrodes des batteries. C'est en préparant sa thèse que Yazami fut le premier, en 1980, à réussir à intercaler du lithium dans du graphite de façon réversible. Pour cela, il a eu l'ingénieuse idée d'utiliser un électrolyte solide et non pas liquide comme cela était classiquement fait à l'époque. Le lithium est inséré dans le graphite sans encombre pour se comporter au final comme une anode (électrode négative) de batterie. Mieux encore: le processus d'insertion du lithium dans le graphite était réversible, sans perte de métal. Cette électrode a permis de convertir la pile lithium en batterie rechargeable. Dans le même temps, une cathode était mise au point par John Goodenough, ce qui a permis à Akira Yoshino, cinq ans plus tard, de réaliser le premier prototype de la batterie à ion lithium puis à Yoshio Nishi de l'introduire au marché en 1991. Ces travaux ont conjointement permis la mise au point de la première batterie lithium rechargeable. Depuis, les batteries Li-Ion n'ont cessé d'évoluer en termes de composition chimique et de densité énergétique. Après sa thèse, Rachid Yazami a rejoint le Centre national de recherche scientifique (CNRS) en 1998, en tant que Directeur de Recherche. Il a été chercheur invité à l'Université de Kyoto puis au California Institute of Technology (Caltech) à Los Angeles. Après avoir travaillé sur d'autres formes de matériaux de graphite, notamment l'oxyde de graphite et de fluorure de graphite, utilisés dans la cathode des batteries au lithium, Yazami est actuellement Professeur en Energétique à Nanyang Technological University à Singapour ou il poursuit ses recherches sur les batteries en collaboration notamment avec BMW. Il compte à son actif plus de 50 brevets étendus dans le monde et plus de 200 publications scientifiques. En 2007, il fonde une start-up en Californie pour développer et commercialiser ses découvertes brevetées en particulier sur les batteries d'ion fluorure. En 2011 il fonde une autre start-up, KVI PTE LTD spécialisée dans l'amélioration de la sécurité des batteries et l'extension de leur durée de vie. Les batteries lithium ont révolutionné le monde de l'électronique portable. Il s'en est fabriqué 12 milliards d'exemplaires dans le monde rien qu'en 2012, pour un marché estimé à plus de 20 milliards de dollars US en 2016