Les habitants de la ville d'Al Hoceima ont été exaspérés non seulement, par le manque de sérieux dans la gestion de l'après-séisme, mais également par la couverture médiatique de la catastrophe par les médias audiovisuels nationaux. Pourquoi des émeutes ont éclaté à Al Hoceima et dans ses environs aux lendemains du séisme du 24 février. Ce n'est pas uniquement que ces populations sont "historiquement insoumises et révoltées", comme l'a souligné la presse internationale, et surtout espagnole. En fait, la mauvaise gestion des distributions est à l'origine de ces soulèvements sporadiques mais significatifs. "Comment voulez-vous qu'on réagisse, quand on aperçoit des tonnes d'aides venir chaque minute à Al Hoceima, sans que personne n'en profite", criait, Farid Idrissi, un jeune de Tamasint dans le parking de l'aéroport, deux jours après le drame. A quelques kilomètres de là, à Aït Youssef Ou'ali. Serikhi Mohamed se préparait, jeudi soir, à passer sa quatrième nuit dans la rue, avec ses dix enfants. "Nous passons la nuit près des égouts, dans le froid", dit-il avec résignation. "Venez prendre des photos de la situation dans laquelle nous vivons. Venez voir ce que nos chaînes de télévision refusent de filmer", dit un manifestant à Imzouren. En fait, ce qui a attisé la colère des sinistrés, ce n'est pas seulement l'amateurisme des autorités, mais également le manque de professionnalisme des télévisions nationales. "Pourquoi disent-ils que tout va bien alors que tout va mal?", se demande un habitant de la ville, irrité par la couverture médiatique nationale de la catastrophe. Les habitants d'Al Hoceima et de ses environs ont été tellement déçus de nos deux chaînes qu'ils ont fini par perdre la confiance en leur pays et même l'espoir de sortir de l'œil du cyclone. "Nous ne sommes pas en colère à cause des morts que nous comptons en dizaines, ni des maisons qui se sont écroulées comme des châteaux de cartes, ni même pour nos biens qui ont complètement disparu", explique un instituteur à Al Hoceima. "C'est un destin dicté par le Tout-puissant, nous ne le discutons pas". "Mais ce qui nous exaspère, en fait, c'est le manque de sérieux avec lequel cette catastrophe a été gérée". Les habitants d'Al Hoceima ont eu l'impression d'avoir été abandonné par l'Etat. Cette colère populaire, quelque part légitime, a trouvé un terrain fertile. "Tous les habitants d'Al Hoceima ne sont pas sortis dans les rues pour crier leur colère, mais tous étaient effectivement en colère", affirment plusieurs habitants.