En 2004, on estimait à 39 millions de tonnes le total des stocks du Maroc en DDT (dichlorodiphényltrichloréthane), produit utilisé sur le plan sanitaire pour lutter contre des maladies transmises par certains insectes. Ce mardi, ce sont 50 millions de tonnes de ce produit, et de déchets qui lui sont associés, qui devraient, grâce au concours diligent de la FAO, être embarquées au port de Casablanca vers la France où elles seront détruites. Entre les 2 chiffres, une grande différence et surtout, de nombreuses questions. Signataire de la convention de Stockholm, le Maroc était autorisé par dérogation spécifique à utiliser ses stocks de DDT acquis dans les années 80, «pour faire face aux risques de paludisme et de typhus», maladies transmises, la première par la femelle du moustique anophèle,et, la 2ème par les poux. Parce que le DDT est neurotoxique, parce qu'on le soupçonne d'être cancérogène, qu'on l'accuse d'avoir des effets endocriniens et de s'accumuler dans le lait maternel, son usage est interdit. Selon la littérature officielle, son utilisation est autorisée au Maroc exclusivement en vue de réduire les foyers de paludisme. Elle laisse donc entendre que c'est la double raison de l'efficacité dans la lutte contre les maladies transmises par les insectes et, la nécessité d'en user avec précaution qui a fait que le MS est resté vigilant sur la question de ses stocks. En 2004, les 39 millions de tonnes en possession du Royaume étaient entreposées essentiellement à Oued Zem et à Settat. Comme les quantités annuelles utilisées ne dépassent pas les 500 kg par an, ces stocks sont à l'évidence disproportionnés par rapport aux besoins réels et les autorités sanitaires n'en importent plus depuis plusieurs années, «se contentant d'utiliser le disponible avec beaucoup de parcimonie». Cependant, la grande question qui agite aujourd'hui les esprits est de savoir comment des avoirs qui étaient évalués à 39 millions de tonnes en 2004 et qui s'effilochaient à raison d'une demi-tonne chaque année durant dix ans, ont fini par prendre 11 tonnes de plus. Muet sur ce point , le communiqué de la FAO précise toutefois que toutes les précautions ont été prises pour transporter le DDT dans des conditions de sécurité maximales et que ce dernier est un produit «très répandu», étant un pesticide qui fait partie de la catégorie des Polluants Organiques Persistants (POP) communément présents dans les stocks de pesticides périmés. C'est le cas de ceux du Maroc dont l'essentiel avait été acquis dans les années 80 et qui seraient devenus toxiques et dangereux du fait, notamment, de leur emballage obsolète. Pour éviter d'éventuels coûts humains et environnementaux , «la FAO tenait à encourager financièrement et techniquement le ministère de la santé pour éliminer le DDT au Maroc en s'appuyant sur son système de gestion des stocks de pesticides et en se conformant aux conventions internationales de Stockholm et de Bâle». Après formation de ses fonctionnaires aux techniques de reconditionnement des fûts, de leur stockage, centralisation et sécurisation, le ministère a donc procédé à la décontamination d'un total de 7 dépôts- Kenitra (2), Fès, Moulay Yacoub, Settat (2) et Khénifra - avant de centraliser et de sécuriser l'ensemble des stocks dans un dépôt à Oued Zem. La FAO indique par ailleurs qu'en tant que partie à la convention de Stockholm, le Maroc reconnaît que la lutte contre les maladies à transmission vectorielle est l'unique champ d'utilisation du DDT - ce qui pose la question de son utilisation dans d'autres domaines. En conséquence, il s'est engagé à développer un plan d'action pour l'élimination de ce produit dans le cadre de la stratégie de la gestion intégrée de la lutte antivectorielle. Le Maroc a également ratifié la convention de Bâle relative au transport international des déchets toxiques et dangereux.