La banalisation des paroles de haine, de rejet de l'Autre, de violence ne pouvaient que conduire à cela. Depuis bien des mois un certain nombre de militants du «vivre ensemble» tirent la sonnette d'alarme, que ce soit au Maghreb ou en Europe, les propos intolérants, les paroles haineuses, xénophobes et de refus de «la différence» ne se disent plus en aparté mais bel et bien au grand jour. Tout le monde semble oublier que le racisme est un délit d'opinion et non pas une opinion et ce qui était un sentiment honteux devient une philosophie revendiquée. En France, un jeune de 18 ans vient de payer de sa vie son combat contre les «fachos», assassiné en pleine rue par une bande de skins, tout comme il y a 28 ans, le 1er mai 1995, l'était notre compatriote Brahim Bourram jeté à la Seine en marge d'une manifestation du Front National. Il faut dire qu'en France depuis plusieurs semaines un climat malsain s'est installé, le débat autour du «mariage pour tous» a, hélas, dérapé et favorisé tous les amalgames. Etre contre ce mariage est un droit et nombreux étaient ceux qui rejetaient cette proposition par conviction personnelle, dans le calme et le respect, mais des «attiseurs de haine» ont trouvé là un terrain fertile pour crier au grand jour leur haine de l'Autre, leur rejet d'autrui, leur volonté d'en découdre avec le Musulman, le Juif, le gay, le minoritaire dans sa différence... ce qui devait arriver, arriva ! Les paroles ont armé les bras ! Que Dieu nous préserve de telles extrémités, il y a pourtant nécessité d'ouvrir les contre feux car chez nous aussi les propos intolérants se multiplient. Des journalistes tels Sanaa El Aji ou Mokhtar Larhrzioui, des intellectuels tel Ahmed Assid, des artistes tel Kamal Hachkar, des militants associatifs telle Aicha Chenna se voient vilipender pour leurs écrits ou leurs opinions...Ne pas partager leurs avis est du droit de tout un chacun mais négliger le débat pour passer aux menaces est inacceptable ! N'est-il pas temps d'agir pour empêcher que des «esprits faibles» voient dans les paroles de rejet de certains des passe-droits pour passer à l'acte ! Qu'à Dieu ne plaise, mais lorsque l'on sait que notre code pénal ne prévoit pas un seul article permettant de condamner ne serait ce que les propos racistes, il y a de quoi s'inquiéter. Chez nous à l'heure actuelle il nous est malheureusement donné, quotidiennement, d'entendre des appels à la haine, des propos de stigmatisation de l'Autre, des avis prononcés au nom de «nos valeurs», de «nos traditions» ou encore de notre religion (à tort bien entendu) qui condamnent autrui sans que personne ne réagisse (ou si peu) et sans que la loi ne permette d'y mettre fin. Chacun(e) d'entre nous est interpellé(e), notamment sur les réseaux sociaux où l'anonymat permet tout: propos racistes, islamophobes, antisémites, sexistes, homophobes… pullulent et peuvent pervertir les esprits de nos jeunes, il faut dresser des garde-fous, montrer les limites, dénoncer tout dérapage et réfléchir à une réglementation qui pénalise les propos qui incitent à la haine. Les mots tuent, les paroles arment les bras…n'attendons pas un drame pour (ré)agir !