L'année 2012 a battu le record des drames des prisons, a informé le dernier rapport de l'Observatoire marocain des prisons qui a été présenté mercredi à Rabat. Ce document qui relève un nombre croissant des atteintes aux droits des détenus et qui établit que la dégradation de la situation matérielle et morale dans les prisons s'est aggravée, en impute la raison principale au surpeuplement. Le bâtonnier Abderrahim El Jamaii, cheville ouvrière de l'Observatoire, a estimé que l'abus fait de la procédure de la détention préventive est l'une des causes de cette surdensité carcérale. Cependant, il s'est refusé à considérer que les juges sont seuls responsables de cette situation. En réponse à une question d'ALM, il a déclaré que c'est la philosophie du système pénal qui est en cause, tant elle considère que la peine privative de liberté est la seule efficace. Il a donc appelé à privilégier les peines alternatives pour tenter de remédier au problème. Il a également jugé que le respect des droits des détenus exige des efforts permanents et la création d'une instance spécialisée dans le suivi des conditions de détention et de la gestion des affaires pénitentiaires. Il a affirmé que la composition de cet organe - nécessairement indépendant pour être performant-, doit aussi refléter la diversité des intervenants en réunissant des associations de la société civile, des juristes, des médecins et des représentants de la justice. Le document de l'Observatoire a salué le rapport parlementaire sur le pénitencier d'Oukacha et celui du CNDH sur les prisons comme des avancées insignes sur la voie de la bonne gouvernance pénitentiaire en ce qu'ils ont mis fin au mutisme qui entourait ces questions. Il a relevé que suite à ces documents, quelques mesures ont été prises pour l'amélioration des conditions de détention. Le document cite la réfection d'établissements pénitentiaires, la construction de nouvelles prisons et le projet de construction d'un centre de formation. Ce document note par ailleurs que les prisonniers en détention provisoire représentent 46% du total de la population carcérale dont 4,20% sont des femmes. Le document révèle aussi que 86% des prisonniers sont âgés de 21 à 50 ans – la classe active dans la société, précisent les rédacteurs du texte - , 8% sont âgés de 13 à 20 ans et 6% ont plus de 50 ans. Ces personnes sont détenues à proportion de 53,49% pour crimes financiers et trafics de drogue tandis que 31,29% ont été incarcérés pour crimes contre d'autres personnes ou contre l'ordre public. Le rapport conclut que «79,33% des prisonniers sont analphabètes ou d'un niveau scolaire bas, ce qui pose de nombreux problèmes pour la mise en œuvre des plans de réinsertion, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle et l'enseignement, qui sont soumis à des conditions précises par les secteurs de tutelle». L'Observatoire marocain des prisons qui a considéré que la bonne gouvernance pénitentiaire participe du fait que la prison est un élément de la société et un lieu de réinsertion sociale, a appelé à une refonte des relations qui unissent le juge d'instruction au parquet. Abderrahim El Jamaii, qui a en particulier déclaré que ces rapports ne sont pas transparents de la manière qui permette d'établir clairement la responsabilité de la détention préventive, a appelé à leur refonte vers une plus grande transparence et une meilleure redevabilité. Il a ajouté que la capacité carcérale doit également être agrandie. Avec 70.000 détenus chacun, le Maroc et la France n'ont pas les mêmes problèmes car nous n'avons que 70 établissements alors qu'ils sont un peu moins de 200 en France.