Les services des urgences sont considérés, à juste titre, comme étant la vitrine de l'hôpital. C'est par ces différents services que transitent plus de 60% de la fréquentation hospitalières, soit plus de 3 millions de passages par an. C'est énorme comme activités de soins, cependant, les professionnels arrivent à gérer tant bien que mal tous les cas, mais c'est surtout la prise en charge des malades lourds qui pose souvent problème. Plus de 70% représentent des urgences ressenties dites à tort fausses urgences, 25% des hospitalisations dans nos hôpitaux émanent des services des urgences; 11 % de la charge de morbidité totale (mortalité et morbidité), sont constitués par les accidents et les traumatismes; 33,5 % des interventions chirurgicales majeures sont réalisées en urgence; 50% des médecins généralistes affectés aux hôpitaux (y compris les Centres Hospitaliers Universitaires), exercent dans les services des urgences.60% des médecins spécialistes des hôpitaux sont impliqués et sollicités fréquemment dans la prise en charge des urgences; 9% des dépenses hospitalières ont été affectées aux services des urgences et 20% environ du budget de l'hôpital sont alloués aux services des urgences consacrés notamment aux produits pharmaceutiques.Au Maroc, plus de 3 millions de malades transitent chaque année par les services des urgences, c'est dire l'importance que revêtent ces services. Par ailleurs, il faut insister sur le nombre de cas urgents, de cas de détresses vitales recensés quotidiennement et qui sont évacués vers les services d'urgences des hôpitaux, exemple des accidents de la route avec leurs lots quotidiens de morts et de blessés graves… C'est aussi le cas des catastrophes naturelles que notre pays a connues (inondations, séismes…) où des douloureux événements de Meknès à la suite de l'effondrement du minaret qui a coûté la vie à plus de quarante personnes, de l'usine Rosamore, des actes terroristes. Autant de causes et de situations qui sont à la base d'une demande urgente en soins à laquelle font face les services des urgences avec les moyens dont ils disposent. Bien équipés, dotés en moyens humains suffisants, en matériels de réanimation adéquats, et bien rodés à la tâche, ces services d'accueil des urgences devraient normalement pouvoir mettre à la disposition des citoyens les meilleures prestations et soins qui soient. Bien accueillir les patients, les accompagner, les écouter et les soutenir car dans ce genre de situation, le malade et sa famille sont dans une situation difficile, ce qui fait appel à une grande dextérité et beaucoup de compassion. De même, ces services d'urgence sont dans l'obligation de répondre aux situations urgentes en cas de catastrophe. Ils doivent, de ce fait, être constamment mobilisés et leur personnel prêts à intervenir à tout moment. C'est leur rôle, c'est leur mission et la réalisation de tous ces objectifs est par essence la raison d'être de tout service d'accueil des urgences qui se respecte et qui a, à cœur, la santé des citoyens, c'est en tout cas la doctrine, mais dans la réalité, dans le vécu quotidien qu'en est-il réellement ? Gestion des urgences : une priorité constante La réponse à cette question, tout le monde la connaît. La majorité des centres hospitaliers n'ont pas de services d'urgences dignes de ce nom. Ces services ne sont pas véritablement équipés pour fournir des soins immédiats aux patients dont l'état nécessite une prise en charge rapide et surtout vitale. Il n'y a pas souvent de salle de déchoquage et encore moins de salles d'accueil des urgences vitales (SAUV), médicales et chirurgicales. Le matériel de réanimation (respirateurs, défibrillateurs...) fait cruellement défaut. Il en est de même pour les appareils de monitorage pour la surveillance des patients graves (scope, oxymétrie...), sans parler du défaut de moyens de diagnostics comme l'ECG et l'échographie Ce qui serait souhaitable, c'est de pouvoir procéder à une mise à niveau des différents services d'urgences existant au niveau des différentes villes. Il faut être juste et équitable, ne pas privilégier telle ou telle ville au détriment des autres, doter comme il se doit telle ou telle région et ailleurs rien. Nous devons constamment garder en mémoire les douloureux souvenirs encore vivaces des inondations survenues en 2002 à Settat et Berrechid et en 2003 à Mohammedia, l'incendie de la SAMIR en 2003, les attentats criminels du 16 mai 2003 à Casablanca et le séisme d'Al Hoceima en 2004 et plus proche encore l'attentat terroriste de Marrakech, qui ont été autant d'épreuves qui nous ont interpellés, qui ont mis a nu nos faiblesses en ce qui concerne la gestion médicale urgente de telles situations. Il faut dire que des actions ont été entreprises pour remédier quelque peu à ce qui peut l'être, des moyens ont été consentis pour renforcer certains services d'urgences, des efforts qui ont permis certes de changer un temps soit peu le visage de ces structures pour en faire de véritables services d'accueil, de gestion et d'assistance médicale des urgences. Mais il faut aussi dire qu'avec le temps, les actions qui avaient commencé à donner leurs fruits se sont estompées. Les efforts préalablement consentis par notre pays et développés par le département de la santé pour améliorer la qualité des soins et des services d'urgences n'ont pas été soutenus, continus et donc pérennisés, ce qui fait qu'aujourd'hui on retourne à la case de départ. C'est tout simplement inadmissible, au moment où la stratégie nationale de gestion des urgences médicales et des risques sanitaires, liés aux catastrophes, est inscrite en tant que priorité constante de notre gouvernement. A ce titre, cette stratégie doit être considérée comme l'un des axes essentiels de la politique sanitaire de notre pays. On ne peut pas ignorer les efforts qui sont entrepris, au moment où les besoins demeurent limités. Sans chercher à trouver des raisons aux dysfonctionnements qui existent ici et là, sans chercher à designer telle ou telle personne comme pouvant être responsable de ces anomalies, il convient de dire que la tâche est difficile, que les priorités en matière de santé sont innombrables et que parfois les responsables et les décideurs au niveau du département de la santé éprouvent toutes les peines et difficultés du monde pour faire des choix. C'est pourquoi nous disons qu'il ne s'agit nullement de tout entreprendre en même temps, mais d'initier une démarche cohérente et pragmatique, réaliste, et surtout réalisable là où le besoin se fait le plus sentir. En d'autres termes, il s'agit de cibler les régions les plus exposées, de recenser les points noirs au niveau de chaque région, de chaque ville par la suite, il conviendra de procéder à une étude détaillée des différents moyens disponibles, des potentialités, des ressources, des voies de communications… Remédier aux dysfonctionnements Remédier aux dysfonctionnements des services des urgences nécessite que soit instaurer un débat avec les différents intervenants, celles et ceux qui travaillent au niveau des services d'accueil des urgences. Il faut que tout le monde soit associé (médecin urgentiste, anesthésiste, réanimateur infirmier, radiologue …), il faut écouter les uns et les autres. Mettre à la disposition des services tout le nécessaire pour qu'ils puissent accomplir leurs missions dans de bonnes conditions. Les personnels qui travaillent au niveau des urgences doivent être motivés. Il faut réserver des primes conséquentes pour encourager les équipes, après tout c'est grâce à tous ces professionnels que l'hôpital fait des recettes, il est tout à fait légitime que cet argent puisse profiter en premier lieu à ces médecins et à ces infirmiers. Il faut aujourd'hui une décision courageuse, objective, cohérente, juste et équitable, pour que les services des urgences soient à la hauteur de leur mission. Avant de terminer, je voudrais insister sur un point qui me parait être fondamental, c'est celui de la gestion des services des urgences. Il faut désigner un médecin qui aime son métier pour occuper le poste de responsable, un médecin qui maîtrise les rouages administratifs et qui sait comment motiver les équipes, un médecin honnête, exemplaire, courageux, digne de confiance. Il faut en finir avec les parachutages. De même, il convient d'affecter des compétences avérées, des médecins, des infirmiers qualifiés, exemplaires, honnêtes qui aiment leur travail, qui soignent avec humanisme et amour, des professionnels de santé qui savent prendre soin des appareils qui leur sont confiés, qui utilisent de manière rationnelle et efficiente les médicaments et les fongibles destinés aux malades. C'est à ce prix que l'on peut réellement réconcilier le citoyen avec son système de santé.