C'est le thème d'une table ronde qui a été organisée, le mardi 3 mai à Casablanca à l'hôtel Barcelo, par l'Association marocaine de la presse médicale en partenariat avec Amnesty Maroc. Une table ronde à laquelle a été conviée la presse marocaine qui a répondu présent. Le thème de cette rencontre est d'actualité, il ne laisse personne indifférent eu égard aux enjeux que représente le droit à la santé, un droit qui ne signifie pas grand-chose, un droit qui est quotidiennement ignoré, bafoué. Zoom sur une réalité amère. Le droit à la santé : un enjeu de justice Aborder le droit à la santé peut sembler quelque peu illusoire, une sorte de rêve, une idée séduisante, surtout quant il est question de droit à la même santé pour tous. A l'évidence c'est pratiquement impossible eu égard aux nombreux obstacles et écueils qui entravent depuis des décennies l'accès aux soins aux plus démunis. Pourtant le droit à la santé est un enjeu de justice. A l'évidence personne ne peut dire le contraire. Dans les plus grande démocraties du monde, les prestations de santé mises à la disposition de l'ensemble des habitants sont les mêmes pour tous, indépendamment du lieu où ils habitent. C'est un haut degré de civilisation que d'investir dans la santé des individus quels que soient leur statut social, leurs moyens ou lieu de résidence. C'est la plus belle leçon de justice sociale qui puisse exister. Qu'il s'agisse des problèmes liés à une juste répartition des moyens humains ou matériels, de prévention ou d'une distribution équitable des soins, c'est un droit de la personne humaine tel que le précise la charte des droits de l'homme. En tant que tel, ce droit doit en principe être le même pour tous, sans distinction aucune. Au moment où la mise en œuvre du développement humain et social devient une priorité au Maroc, l'amélioration de la couverture médicale en est une condition sine qua non. D'où l'importance de cette rencontre qui a été animée par le Professeur Mohamed Sektaoui, directeur général d'Amnesty International, section Maroc. La garantie d'une bonne qualité des services de santé revêt une importance capitale. Il s'agit d'un «droit» acquis pour tous les citoyens, y compris les bénéficiaires du Ramed, cette fameuse assurance maladie des pauvres. Pour ces derniers, la qualité des services de santé doit être la même que pour les affiliés de la CNSS et de la CNOPS. En effet, la généralisation du Ramed devrait favoriser l'instauration des principes d'égalité, de solidarité et d'équité. C'est pour cela qu'il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la réussite de cette bonne initiative. Les déterminants du droit à la santé Dans son intervention, le Professeur Mohamed Sektaoui, directeur général d'Amnesty International, section Maroc a tenu à insister sur certains aspects fondamentaux qui caractérisent le droit à la santé. Le DG d'Amnesty international, section Maroc, à rappelé à l'assistance que le droit à la santé, c'est aussi le droit d'accéder au «plus haut niveau possible de santé physique et morale», tout en prenant en considération la dimension héréditaire de l'individu et les choix de style de vie. Ainsi que le niveau de compréhension scientifique et le maximum de ressources disponibles pour l'Etat. Ce droit comprend les libertés (comme le droit de disposer de sa santé et son corps) et les droits (comme l'égalité de l'accès aux soins de santé). Il est composé de deux éléments fondamentaux : les conditions de vie et de santé et les soins de santé. Le comité des droits économiques, sociaux et culturels a adopté une observation générale sur le droit à la santé. Il s'agit : d'«un droit global qui comprend non seulement la prestation de soins de santé appropriés en temps opportun, mais aussi les facteurs fondamentaux déterminants de la santé, tels que l'accès à l'eau salubre et potable et à l'assainissement, l'accès à une quantité suffisante d'aliments sains, la nutrition et le logement, l'hygiène du travail et du milieu et l'accès à l'éducation et à l'information relatives à la santé, notamment la santé sexuelle et génésique. Autre volet important : la participation des populations dans le processus de prise de décision concernant la santé au niveau local, national et international». Afin d'expliquer les engagements du droit à la santé, le comité a fixé les éléments suivants : Il doit exister suffisamment d'installations, de professionnels formés et de médicaments de base. Les installations, biens et services en matière de santé doivent être accessibles, physiquement et économiquement, à toute personne sans discrimination. Les installations, biens et services en matière de santé doivent être respectueux de l'éthique médicale, appropriés sur le plan culturel, et réceptif aux exigences spécifiques liées au sexe et aux différents stades de la vie. Les installations, biens et services en matière de santé doivent également être scientifiquement et médicalement appropriés et de bonne qualité. Ce qui nécessite entre autres des professionnels de médecine de qualité, des médicaments agréés scientifiquement et leur date de validité respectée, ainsi que du matériel pour les hôpitaux, de l'eau potable et toutes les raccordements sanitaires nécessaires. Santé mentale : il reste beaucoup à faire Parmi les possibles violations du droit à la santé figurent : * La rétention d'informations nécessaires sur la prévention d'une maladie ou d'une invalidité, ou son traitement ou la diffusion délibérée de fausses informations * La distribution de matières nocives * L'absence de contrôle de l'activité d'entreprises dont les produits génèrent des effets nocifs à la santé * L'absence d'un plan détaillé pour réaliser un minimum des engagements nécessaires concernant le droit aux soins de santé. Le rapport de l'ONU sur la santé souligne le droit de chacun au plus haut niveau de santé physique et mentale et aide à mieux appréhender le principe de droit à la santé, y compris la santé sexuelle, reproductive et mentale. Selon ce rapport récent, plus de 450 millions de personnes dans le monde sont atteintes d'une forme ou une autre de problèmes mentaux et plus de 90% des pays n'ont pas de politique en matière de santé mentale chez les enfants. Alors que 40% des pays n'ont aucune politique en ce qui concerne la santé mentale en général. Le rapport déplore également le fait que les droits des personnes atteintes de troubles mentaux soient bafoués y compris le droit à l'égalité, à l'enseignement, au travail, à l'intimité, au logement et à la liberté. Ce rapport a aussi examiné le lien entre le droit à la santé et l'agenda de l'OMC. En effet, plusieurs accords commerciaux entravent la production de médicaments génériques et élargissent les limites de la protection de la propriété intellectuelle. Résultat : des médicaments plus coûteux et inaccessibles pour les pauvres, en l'absence d'une subvention efficace de l'Etat. Les Etats exercent de plus en plus une pression afin d'exclure la santé générale du domaine de protection de la propriété intellectuelle pour fournir les médicaments de base. Mais, cette exception n'est pas toujours observée lors de la conclusion d'accords régionaux ou bilatéraux. Les journalistes présents à cette rencontre n'ont pas manqué eux aussi de rappeler les multiples problèmes qui entravent l'accès aux soins, aux médicaments et autres prestations de soins dont sont victimes les populations les plus démunies. Lors de leurs nombreuses interventions les représentants des médias ont insisté sur les maux qui rongent le secteur de la santé. A signaler que le système de santé marocain est un système à deux vitesses. Mais, il n'est plus acceptable aujourd'hui de permettre la création d'espaces de santé isolés sous forme de «ghettos sanitaires» à travers la généralisation du système au Maroc, sans évaluations, ni procédures, ni actions correctives continues. Il faudra donc faire attention à ne pas favoriser une couverture médicale à deux vitesses après la généralisation de ce système au niveau national. Par leurs participations à ce débat, les journalistes et les membres de l'AMPM ont tous contribué à l'enrichissement du dialogue sur les orientations stratégiques du pays en focalisant la réflexion sur le principe de la «santé pour tous» et son d'application sur le terrain, au niveau national et international ainsi que les moyens susceptibles de permette à tous les citoyens d'y accéder dans les meilleures conditions. Merci donc aux organisateurs de cette table ronde et bien entendu un grand bravo pour l'excellente prestation du professeur Mohamed Sektaoui, directeur général d'Amnesty International, section Maroc. A propos d'Amnesty international au Maroc Création et fondements La section marocaine d'Amnesty International a été créée au printemps de l'année 1994 conformément aux lois nationales. Les objectifs et le mandat de la section s'inspirent des statuts d'Amnesty International. La demande officielle d'enregistrement de l'Association auprès des autorités a été déposée en juin 1994, mais celle-ci n'a reçu le récépissé de dépôt légal que fin 1998. L'Association a pu se frayer rapidement une place de choix dans le tissu juridique marocain et se forger progressivement une bonne réputation grâce à son historique de défense de droits de l'Homme et l'enracinement de ses valeurs dans la société. Elle a pu attirer des membres actifs d'origines socio-professionnelles diverses à travers le Royaume. Actuellement, la section marocaine d'Amnesty, compte 27 groupes et 7 réseaux spécialisés (femmes, jeunes, médecins, juristes, journalistes, éducations aux droits humains, actions urgentes) en plus de plusieurs centaines de membres individuels, amis, et sympathisants. Les organes de la section sont constitués comme suit : - L'Assemblée Générale, le plus haut organe de décision - La Commission nationale des groupes ; - Le Comité Exécutif ; - Le Secrétariat National ; - Les Groupes et les Groupes spécialisés ; - Le Secrétariat national. Parcours du Pr Mohamed Sektaoui Chercheur et militant des droits de l'Homme, il a pris en charge plusieurs missions dans le cadre du mouvement des droits de l'Homme au niveau régional et international, notamment au Moyen-Orient et Afrique du Nord. Il est actuellement à la tête de l'organisation «solidarité universitaire marocaine», l'une des plus grandes instances qui opèrent dans le champ éducatif et défendent la dignité du corps enseignant. Il est aussi l'un des fondateurs de l'antenne marocaine d'Amnesty International, dont il est le DG actuellement. Il est l'auteur de plusieurs recherches sur l'éducation et les droits de l'Homme dont notamment : 1- Droits de l'Homme : Valeurs et principes 2- Droits de l'Homme : mécanismes et normes 3- Le médiateur administratif 4- Système de mutuelle au Maroc