Quand le treizième sommet de la Francophonie réuni à Montreux en Suisse, le 24 octobre dans l'après-midi et qu'une très courte – et désagréable confé rence de presse eut été, comme de tradition, organisée en présence de nombreux journalistes plutôt sceptiques sinon hostiles, on se rendait compte que l'événement, s'il était parfaitement organisé, n'avait en rien de vraiment palpitant. Il restera bien sûr la «déclaration de Montreux» mais qui ne se distingue des précédentes depuis quarante ans en rien sinon par un ton volontairement placide et peu lyrique. Aucun incident n'a certainement pas émaillé les travaux de ce rassemblement francophone qui a été mené de main de maître par les équipes de la bureaucratie responsables de l'«Organisation Internationale de la Francophonie» (O.I.T) sous la houlette du Secrétaire général, monsieur Abdou Diouf, qui paraissait tout le long de cette décade assuré et heureux d'être ce qu'il est devenu depuis sa désignation à la tête de l'organisation en octobre 2002, pour y être reconduit en 2006 et cette année-ci, à l'unanimité des participants. Il a donc la profonde satisfaction de se voir consacré «Monsieur Francophonie», sans conteste et dans une belle consécration dans la continuité, à l'opposé de son prédécesseur Boutros-Boutros Ghali, l'Egyptien qui avait occupé le siège du Secrétariat général sur pression manifeste de l'ancien Président français Jacques Chirac qui tenait à lui offrir une espèce de lot de colonisation après qu'il ait été chassé par des Américains de son poste de Secrétaire général des Nations Unies. Contre les franco-sceptiques, si on peut oser cette expression, monsieur Abdou Diouf estime que «contrairement à une idée répandue, la langue française a de plus en plus de locuteurs sur la planète». L'idiome, parti de France il y a plusieurs siècles, a essaimé par divers moyens pas toujours pacifiques et culturels, pour faire que sa langue soit aujourd'hui classée au 10ème rang des langues les plus parlées au monde. On compterait ainsi au moins 220 millions de Francophones dans le monde, dont 70 millions dits locuteurs partiels comme chez nous et au Maghreb. Le Français est aussi, il faut le rappeler, langue internationale et elle est langue officielle, seule ou avec d'autres langues, d'une trentaine d'Etats. Pour l'Internet, elle se positionnerait troisième (5% des pages), derrière l'anglais (45%) et l'allemand (7%). Enfin, l'OIT n'est pas peu fière d'avancer le chiffre d'un million de professeurs dans le monde. Suite de la page 1 Ces données sont répétées comme autant de cris de victoire face à la communauté internationale pour dire tout le poids de la Francophonie dans le monde ainsi que le rôle éminent qu'elle souhaiterait et voudrait jouer ! L'OIT est agacée par la réputation qu'on lui accole souvent d'organisation saine, sans beaucoup de poids politique et qui compterait presque pour «du beurre» sur la scène internationale. Elle réunit en son sein quelque un tiers des Etats membres des Nations Unies et peuvent se targuer d'avoir parmi eux le Canada, la Belgique, la Suisse et la France bien sûr sans oublier le poids lourd démographique qu'est le Vietnam. Seule ombre à ce tableau que les responsables de l'Organisation francophone s'évertue à présenter convaincant, l'absence de l'Algérie qui est le grand réservoir de la francophonie et la puissance moyenne que l'on connaît. Depuis le sommet qui s'est tenu à Beyrouth en 2002 et après à Ouagadougou en 2004, le président Abdelaziz Bouteflika avait tenu à être présent personnellement aux travaux, cérémonies protocolaires, séances plénières et huis clos. Avant Montreux où l'Algérie était active avec le président du Conseil de la Nation, Alger avait envoyé en 2006 à Bucarest un ministre du gouvernement pour bien prouver que l'Algérie en avait fini avec la politique de boycott à l'égard de la Francophonie institutionnelle, elle qui ne se contentait jusque-là que de timides incursions dans le réseau de «l'Agence Universitaire de la Francophonie». Il demeure que jusqu'à ce jour, c'est-à-dire jusqu'au XIIIe sommet de Montreux, rien de clair ni de décisif n'a été décodé, de la part de l'Algérie pour son adhésion pleine et entière à l'O.I.T et donc à tous ses réseaux divers et nombreux. C'est une affaire similaire lorsqu'il s'agit d'Israël quand on l'aborde dans le même ordre d'idées. Ce pays, en belligérance ouverte et constante avec tous les pays arabes – Maroc, Tunisie, Mauritanie, Egypte, Liban – et en délicatesse avec quelques Etats d'Afrique, notamment, n'a jamais franchi le pas de se porter candidat à l'O.I.T et personne n'ayant pris l'initiative au sein de cette organisation de le convier en son sein, le problème ne se pose donc pas. Même, ou en dépit du fait qu'en Israël les Francophones se comptent en quelques petits millions. Enfin, lorsqu'on examine en général cet aspect de la configuration de ceux qui la composent, et qui ont été présents à Montreux, nous nous apercevons que sur les soixante-dix Etats et gouvernements membres de l'O.I.T, seuls 56 peuvent être considérés comme l'étant à part entière, les quatorze autres le sont seulement à titre d'observateurs. Tous apparemment se sentent mobilisés sous la bannière très tolérante de la devise : «agir pour prévenir». Comment cela ? (A suivre)