L'art des jardins a toujours été développé et sublimé au Maroc. Les Marocains ont fait du jardin l'un des fondements de leur civilisation. Ils l'ont reproduit en une variété de motifs et de styles, sur bois, sur plâtre, sur pierre, sur leurs tapis, leurs étoffes, leurs portes ou leurs plafonds. L'art du jardin au Maroc serait l'héritier de l'art persan, repris et développé par les Abbassides, à Bagdad et Samarra, et diffusé par plusieurs dynasties dans le monde arabo-musulman. Depuis la fondation de Fès, jusqu'au début du XXème siècle, différents styles de jardins se sont succédé, au gré des dynasties régnantes et de l'inspiration des lieux. Aujourd'hui, l'art du jardin cultivé au Maroc depuis la nuit du temps, semble se perdre. Les espaces verts et parcs historiques sont dans un état avancé de dégradation et sont presque méconnaissables. Certains grands jardins ont pu, heureusement, retrouver une seconde vie après une habile opération de restauration et de préservation. Préservation et Sauvegarde, tels sont les maîtres mots de la Fondation Mohammed VI pour la protection de l'environnement, qui a entrepris dans ce domaine de la restauration des parcs et jardins historiques, un vrai travail de conservateur avec pour souci majeur une réhabilitation historique scrupuleuse afin de respecter les intentions premières de leurs créateurs respectifs. Pour la joie et l'agrément des publics citadins, à Casablanca, Fès, Rabat. Salé, et Marrakech, petit tour d'horizon de ces magnifiques parcs et jardins historiques sauvés du démantèlement et restaurés ou en cours de restauration. Jnane Sbil Créé au 18ème siècle, à Fès, par le Sultan Moulay Abdallah, le jardin « Jnane Sbil » joyau de la tradition Arabo-Andalouse, s'étend sur 7,5 hectares. Chargé d'histoire et de mémoire, cet espace qui a subi les outrages du temps avec les effets conjugués de la sécheresse est le jardin public le plus ancien et le plus prestigieux de la capitale spirituelle du Royaume, Fès. Il en est une mémoire vivante. L'action de la Fondation Mohammed VI pour l'environnement a consisté en une restauration historique et scrupuleuse pour retrouver le jardin à l'origine et mettre en valeur les intentions de son créateur ; de restituer aux Fassis, le charme et l'ambiance d'antan tout en actualisant les lieux aux besoins et contraintes d'aujourd'hui. Ce projet, toujours en cours, profitera doublement, à la population de la ville et renforcera le potentiel culturel de la ville ainsi que son destin de ville touristique internationale. L'Ermitage Créé entre 1917 et 1927 sur plus de 17 ha, par l'architecte Henri Probst, le Parc de l'Ermitage, appelé également Parc d'horticulture, fut un extraordinaire archipel de verdure pour les Casablancais. Il enchanta les riverains pendant plus d'un demi-siècle. Il fut surtout l'un des principaux poumons verts de la capitale économique avec le Parc de la ligue Arabe. L'Ermitage et son peuple d'arbres centenaires, leur végétation ombragée, les fleurs parfumées, le lac rafraichissant, les cris joyeux des enfants… tout un univers de joies, d'oxygène et de lumières, s'éteignait progressivement. La Fondation Mohammed VI pour la Protection de l'Environnement avec à sa tête, SAR La Princesse Lalla Hasna, décida d'inscrire le parc dans le cadre de son programme «Jardins historiques». L'Ermitage a fait l'objet d'une convention signée en 2007 entre le Conseil de la ville, la wilaya et la Fondation. Dans cet esprit, on missionna un groupe de paysagistes pour établir un diagnostic et de propositions de restauration. La réhabilitation du parc prévu pour être ouvert au public en 2010, respecte sa conception initiale, avec une grande pièce d'eau centrale, une aire de jeux pour enfants, une zone de sport pour les plus grands. Un patrimoine d'autant plus précieux pour la Ville de Casablanca, qu'il va restituer à la population, un immense espace d'agrément, soit plus de 50.000 habitants directement concernés. Le Jardin d'Essais Jean-Claude Nicolas Forestier, le célèbre architecte-paysagiste en fut l'initiateur dans les années 1914, mais il fut vraiment créé dans les années 1927-1928 et Gaston Herbert, Ingénieur Horticole en a été son 1er directeur. Le jardin d'essai à Rabat, jardin expérimental comme l'indique son nom, regroupait à l'origine plus de deux cent cinquante variétés différentes d'arbres fruitiers et d'ornements, provenant de tous les coins de la terre. Entretenu par l'école d'agriculture qui le jouxte, ce jardin que tous les botanistes du monde connaissent, se meurt par manque de moyens et d'intérêt. Alors que l'on s'extasie facilement devant les jardins de Majorelle de Marrakech, on a oublié ce joyau de jardin botanique. M. Hassan Amrani, wali de Rabat, l'avait promis : le jardin d'essais sera réhabilité à l'occasion du réaménagement de l'avenue de la Victoire, proche d'une centaine de mètres. 27 millions de DH seront nécessaires, dont 15 millions seront alloués par le Fonds Hassan II pour sa réhabilitation. Ce jardin de plusieurs hectares, trait d'union entre «l'ancienne médina» de Rabat ville et l'Agdal, sous les fenêtres de l'ambassade de France, était en effet abandonné depuis des années. M. Amrani, a peut-être sauvé le jardin d'essais et ses magnifiques nénuphars! Les Marocains et les Rbatis en particulier, lui en seront à jamais reconnaissants, car ils avaient besoin d'un tel espace ! Arsat Moulay Abdeslam Il répondait au doux nom de Prince « Serviteur de Paix », Moulay Abdeslam. Fils et frère de Rois, ce Prince de la dynastie Alaouite, vivait il y a 300 ans au cœur d'un jardin de huit hectares, véritable conservatoire de l'art sacré des jardins arabes. Ces jardins qui évoquait le paradis, conquis de haute lutte sur la nature hostile, étaient si précieux, que le Sultan Sidi Mohammed ben Abdellah en offrit un, à chacun de ses fils, comme l'Arsat du Prince Mamoun, qui devint l'écrin de la célèbre Mamounia sur 15 hectares. Ce Jardin aux très vastes dimensions, né au 18ème Siècle, a bénéficié au terme d'un véritable travail d'enquête paysagère et botanique, d'un plan d'aménagement et de sauvegarde enthousiasmant. Les oliviers tri centenaires de « l'Arsat Moulay Abdeslam », nous parlent d'un monde où la main de l'Homme, n'avait encore rien altéré…La réhabilitation botanique de «l'Arsat Moulay Abdeslam » et l'installation d'un Cyber Parc pour mettre en lien les Hommes et les nouvelles technologies, au cœur de ce Jardin historique, signe ici, une des réalisations emblématiques de la Fondation Mohammed VI. Les jardins exotiques de Bouknadel Ces jardins luxuriants avec leurs ponts de singes suspendus au dessus d'une végétation tropicale foisonnante aux essences rares et lointaines, ont fait rêver des milliers d'enfants depuis les années 60. Appelés aussi « Jardins du Père François » du nom de leur créateur, Marcel François, un ingénieur horticole féru de fleurs et amoureux de la Terre Marocaine, ces jardins aménagés de 1951 à 1961 sur un terrain de 4,5 hectares en bordure de la route de Rabat à Kenitra, présentaient une flore d'une très grande richesse en provenance de Chine, d'Afrique, d'Asie méridionale, du Congo, du Japon, du Brésil ou de la Polynésie Ouvert au public depuis 1961, cet espace vert a été laissé à l'abandon jusqu'en 2002. Depuis leur réouverture en 2005, ces jardins continuent d'être une réserve d'acclimatation de cette flore importée d'ailleurs, tout en lui assurant l'ambiance des pays d'origine. Jardin Majorelle “Tout n 'est que luxe, calme et volupté” dirait peut-être Baudelaire en visitant les jardins de Majorelle à Marrakech, des jardins typiquement marocains. C'est un jardin extraordinaire où les couleurs éclatantes des peintures à la chaux se mélangent aux camaïeux nuancés que nous offre la végétation. Les contrastes, les couleurs, les jeux de lumière semblent sortis d'un des tableaux de Jacques Majorelle. Il était un des plus importants collectionneurs de plantes de son époque, et c'est dans cet esprit que s'agrandit de jour en jour la flore du jardin. Des plantes des cinq continents sont exposées dans un cadre féerique. Ce qui fut l'atelier de Jacques Majorelle, lieu d'inspiration et de recueillement, abrite aujourd'hui la magnifique collection d'art Islamique de Pierre Bergé et Yves Saint Laurent. L'originalité de ces lieux réside dans la combinaison d'une végétation luxuriante et des éléments architecturaux alliant sobriété et esthétique traditionnelle marocaine. La puissance du bleu Majorelle participe à l'impression de fraîcheur et de quiétude. Avec la précieuse contribution d'entreprises citoyennes, chacun de ces espaces comprend également un important programme d'éducation et de sensibilisation du public à l'amour de la nature. Jardins du Maroc, le site de référence dans l'Art botanique au Maroc, dégage dans une fine présentation, le sentiment d'extase que l'on ressent lors d'une ballade dans l'un de ces jardins. «Se reposer à l'ombre des orangers en fleurs dont le parfum embaume, tandis que les oiseaux chantent et qu'une eau miroitante danse dans les vasques, c'est ainsi que le monde islamique médiéval s'imaginait le paradis. Et c'est cette image du bonheur parfait qu'il a tenté de recréer ici bas à travers ses jardins, élevant son savoir-faire au rang d'un art à part entière» Un art qui a aussi séduit des peintres internationaux, comme Delacroix, Matisse ou d'Ingres qui ont su restituer, à travers leurs œuvres, cette somptuosité végétale, aussi exubérante que raffinée.