Un colloque international sous le thème « L'éducation aux médias : horizons et aspirations » s'est ouvert mercredi à Rabat, avec la participation de ministres, d'ambassadeurs et de chercheurs spécialisés dans le domaine de l'éducation aux médias, à l'information et à la sécurité. Organisé par l'Organisation du Monde Islamique pour l'Education, les Sciences et la Culture (ICESCO) et l'Université arabe Naif des sciences de la sécurité (NAUSS) au Royaume d'Arabie Saoudite, ce colloque vise à discuter des moyens de consolider les concepts et les valeurs de l'éducation aux médias et à l'information et à œuvrer à les intégrer dans les programmes scolaires afin de développer les compétences de pensée critique et de renforcer les mécanismes d'obtention des informations correctes auprès de sources fiables. S'exprimant à cette occasion, le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, Mohamed Mehdi Bensaid, a souligné l'engagement du Maroc dans les questions de médias et de communication « pour promouvoir une culture médiatique basée sur le développement du sens critique auprès de toutes les couches de la société, notamment les jeunes », afin de les protéger des dangers des fake news. Le Royaume œuvre à préparer des études sur la désinformation et les fake news dans les médias, tout en incluant les sujets d'éducation aux médias dans les programmes scolaires, « dans le but de renforcer la culture aux médias chez les jeunes, au service des objectifs éducatifs et pour développer les connaissances sur la réception et l'analyse de l'actualité », a indiqué M. Bensaid lors de cet évènement tenu en coopération avec son ministère et la Ligue des Etats arabes, représentée par le Département des Médias et de la Communication- Secrétariat technique du Conseil des ministres arabes de l'Information. Il a, à cet égard, appelé à l'élaboration d'un code éthique visant à protéger les destinataires de contenus suspects et à les sensibiliser au danger de leur partage et de leur diffusion, ainsi qu'à œuvrer à utiliser les moyens d'information et de communication de manière positive, dans le but de réaliser des objectifs pédagogiques déterminés. De son côté, Boubker Sabik, porte-parole de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) et de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), a indiqué que le choix de ce sujet s'explique par la nécessité d'immuniser la société contre les différents risques émergents et d'accroître la prise de conscience commune à l'importance de l'éducation et de la sensibilisation en tant que prélude de la prévention du crime. Le pôle de la DGSN et de la DGST « a développé une approche intégrée pour renforcer la sensibilisation dans le travail sécuritaire et inclure l'éducation et la sensibilisation dans les plans de formation de la police », a précisé M. Sabik, soulignant que la sûreté, dans son concept global, dépasse la vision classique qui la réduisait auparavant à la prévention et la coercition. Selon lui, les défis posés par les réseaux sociaux imposent l'élaboration et le développement d'approches transversales pour neutraliser les risques auxquels sont exposés les jeunes et les enfants. Un accès non sécurisé à l'espace numérique peut faire de l'enfant, de l'adolescent ou du jeune une proie de l'embrigadement rapide et de l'extrémisme, a-t-il ajouté. De son côté, Hicham El Blaoui, Secrétaire général de la Présidence du Ministère public, a mis en exergue le rôle de l'éducation aux médias dans un contexte mondial marqué par une révolution technologique dans le domaine médiatique, car elle permet aux individus d'élever le niveau de conscience et d'acquérir des compétences qui les aident à analyser le contenu qu'ils reçoivent et à comprendre l'environnement médiatique et qui les rendent capables de faire des choix conscients des contenus médiatiques positifs. L'engouement croissant pour les médias numériques a entraîné des problèmes psychologiques, sociaux et de valeurs, qui représentent de véritables défis pour l'éducation aux médias, « ce qui nécessite de les traiter dans le cadre d'un usage intelligent des mécanismes de l'éducation aux médias à même de nous permettre d'acquérir les compétences de recours aux différents médias de manière rationnelles », a relevé M. El Blaoui. Il a souligné, dans ce sens, que le Ministère public joue de multiples rôles pour protéger le secteur médiatique en faisant face aux actes qui portent atteinte aux droits et libertés individuelles ou aux mœurs et qui se produisent à travers les moyens de communication, ainsi qu'en luttant contre l'incitation à la violence et à la haine entre autres. Farid El Bacha, président par intérim de l'Université Mohammed V de Rabat, a, quant à lui, mis en avant l'importance du thème du colloque, au vu du grand développement observé dans les médias et la communication. Le monde numérique fournit une quantité infinie d'informations, à travers diverses plateformes numériques, ce qui nécessite de les comprendre et de les analyser, a estimé M. El Bacha, soulignant l'importance de l'éducation aux médias en tant qu'outil essentiel pour permettre à l'individu de saisir le contenu médiatique et de l'analyser de manière critique. Pour sa part, le directeur général de l'ICESCO, Salem Ben Mohammed El Malek, a affirmé que les médias disposent d'un pouvoir avec des mécanismes face auxquels il faut s'armer sur le plan de la construction, de l'éducation, du développement et de la formation, présentant, dans ce contexte, des données sur le nouvel environnement des médias en ligne, qui montrent que plus de 4,4 milliards de personnes, représentant 64,6% de la population mondiale, échangent des informations et des idées via les réseaux sociaux. L'éblouissement du monde devant les nouveaux médias et l'essor de la communication que connaît ce domaine nécessitent de faire face aux projections qui en font un moyen de violer la vie privée des individus et de véhiculer des fake news, ce qui requiert la mise en place d'une éducation aux médias défendant les valeurs d'égalité, de justice et de citoyenneté, a fait savoir M. El Malek. De son côté, le secrétaire du Conseil suprême de l'Université arabe Naif des sciences de la sécurité, Khalid bin Abdulaziz Alharfash, a affirmé que l'université, sur la base de ses responsabilités en matière de mise en œuvre des stratégies et plans arabes de sécurité et de prévention du crime, cherche, à travers ses programmes, à traduire l'intérêt pour la question des médias et leur rôle dans la lutte et la prévention du crime en une réalité tangible qui contribue à renforcer le concept de sécurité intellectuelle. Il a formulé son souhait de voir ce colloque constituer un point de départ vers un plan stratégique arabe pour la généralisation de l'éducation aux médias. L'éducation aux médias est le socle sur lequel repose la réalisation de la sécurité intellectuelle dans les sociétés islamiques et arabes, a affirmé M.Alharfash, appelant à accorder un plus grand intérêt à la qualité et à ses exigences scientifiques, techniques et médiatiques pour développer les médias dans les pays arabes et islamiques. Dans une allocution enregistrée, Jean Emmanuel Ouédraogo, ministre burkinabè de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme, a mis en relief l'intérêt accordé par son pays à l'éducation aux médias, passant en revue les efforts déployés dans ce domaine, à travers la sensibilisation à la bonne utilisation des médias sociaux. Ce colloque de deux jours s'articule autour de plusieurs thèmes, dont « Partenariat médias/éducation en matière d'édification de la société du savoir et d'appui au développement durable », « Cadre déontologique de la liberté d'expression dans les législations et conventions arabes et internationales des médias », « Importance de l'éducation aux médias pour faire face aux défis médiatiques, intellectuels et sécuritaires » et « Intelligence artificielle et avenir de l'éducation aux médias ». Les participants à la rencontre discuteront également des « expériences arabes et internationales pionnières en promotion de l'éducation aux médias », « Les bases d'une utilisation responsable des médias, réseaux sociaux et sources d'informations » et « Intégration de l'éducation aux médias dans les cursus scolaires arabes ».