Les dirigeants turc Recep Tayyip Erdogan et suédois Ulf Kristersson se retrouvent lundi à Vilnius pour d'ultimes tractations autour de l'adhésion de la Suède à l'Otan, à la veille du sommet annuel de l'Alliance. La rencontre, organisée par le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, doit, espère-t-il, permettre de lever le veto d'Ankara qui bloque depuis mai 2022 l'entrée de Stockholm dans l'Alliance atlantique. M. Stoltenberg, qui souhaite que les trente-et-un Etats membres de l'organisation offrent un front uni face à la Russie, a jugé jeudi « absolument possible » d'obtenir « une décision positive » de la Turquie en Lituanie. Le président Erdogan a de son côté promis vendredi de prendre « la meilleure décision, quelle qu'elle soit », laissant sous-entendre que toutes les options sont sur la table. M. Erdogan reproche aux autorités suédoises leur mansuétude présumée envers les militants kurdes réfugiés sur leur sol et réclame l'extradition de dizaines d'entre eux. Il a toutefois tempéré tout excès d'enthousiasme en exprimant de nouveau ses réserves. « Comment un Etat qui ne prend pas ses distances avec les organisations terroristes peut-il contribuer à l'Otan ? », a demandé le président turc, qui a fustigé à plusieurs reprises la Suède, encore le mois dernier, pour avoir autorisé des autodafés de Coran. La Turquie est le dernier pays de l'Otan avec la Hongrie à s'opposer à l'entrée de la Suède en dépit des mesures prises par le pays scandinave, dont une réforme de sa Constitution et l'adoption d'une nouvelle loi antiterroriste. La semaine dernière, la Suède a en outre condamné un Turc d'origine kurde à quatre ans et demi de prison pour « extorsion » et « tentative de financement terroriste » au profit du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), un groupe qualifié de terroriste par Ankara et l'Union européenne – une première dans le pays scandinave. Mais une des clés du dossier réside à Washington, où le Premier ministre suédois Ulf Kristersson a été reçu mercredi par Joe Biden, estiment des analystes: pour eux, le feu vert turc est conditionné à la livraison des avions de combat américains F-16 à Ankara – ce que la Turquie dément. La présidence turque a toutefois indiqué dimanche soir que les présidents Erdogan et Biden s'étaient entretenus dans la journée par téléphone de l'adhésion de la Suède à l'Otan ainsi que du dossier des F-16. Les deux dirigeants s'entretiendront en tête à tête à Vilnius, a précisé Ankara. La Maison Blanche a dit vendredi s'attendre à une adhésion de la Suède à l'Otan « dans un proche avenir », jugeant « possible » que la Turquie et la Hongrie changent d'attitude au sommet de Vilnius. Certains observateurs affirment que le président Erdogan, qui fait barrage depuis 14 mois, ne peut prendre le risque d'attiser à nouveau les tensions avec les Occidentaux. En recevant vendredi à Istanbul le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dont le pays frappe aussi à la porte de l'Otan, M. Erdogan a estimé que Kiev « mérite » d'être admis dans l'Alliance. M. Zelensky venait de fustiger l'absence d'unité au sein de l'organisation sur les adhésions de la Suède et de l'Ukraine. La Russie compte sur « la faiblesse et la désunion de l'Alliance », qui « ne peuvent pas être permises », a affirmé le chef de l'Etat ukrainien.