Le Centre marocain de conjoncture (CMC) n'a pas manqué de faire une analyse critique du contenu du projet de loi des finances 2020 dans sa version actuelle. Le PLF 2020 s'inscrit dans la continuité de la rigueur budgétaire annonce les experts du centre qui s'attendait à une profonde reconfiguration de la politique budgétaire qui obéit aux orientations du nouveau modèle de développement en cours de réflexion. Le document Info-CMC pointe du doigt l'option qualifié d'improductive, celle de reléguer au second plan les objectifs de l'accélération de la croissance, l'amélioration des revenus et la préservation du pouvoir d'achat du citoyen. Les actions retenues dans le cadre du budget prévisionnel se révèlent nettement insuffisantes pour répondre à l'impératif de promotion de la croissance et de l'investissement. Le centre marocain de conjoncture se veut très critique par rapport aux objectifs et priorités fixés dans le cadre du projet de loi de finances 2020. Dans son analyse, le CMC souligne que les mesures liées à «la programmation budgétaire pour l'année à venir que ce soit au plan de l'affectation des ressources, du volume des dépenses, de l'effort d'investissement ou encore de la structure de la fiscalité relèvent en effet plus du fine-tuning que d'un véritable renouveau de la politique économique». La gestion des équilibres financiers et l'adaptation du système fiscal national aux standards exigés par les partenaires européens semble l'emporter sur d'autres fondamentaux de premier plan dans un contexte où l'économie a besoin de soutien et de consolidation du cycle des affaires. Le centre qui rappelle les prémices de rebond de l'activité économique au niveau international, explique aussi que les projections pour l'année 2020 tablent sur un redressement significatif du cycle économique grâce à l'amélioration attendue des conditions de l'offre et au raffermissement de la demande globale. L'économie mondiale, elle devrait afficher une croissance de 3,4% soit un gain de 0,4% par rapport à 2019. Les pays de la zone euro devraient enregistrer une croissance moyenne de 1,4% en 2020 selon les dernières projections du FMI, en hausse de 0,2 point par rapport à l'exercice en cours, note info-cmc. Les pronostics de croissance pour le Maroc et qui tiennent compte d'une hypothèse d'une bonne pluviométrie s'attendent à un taux de croissance du PIB en 2020 de 4,6% soit 2 points de plus qu'en 2019. Néanmoins, cette perspective n'aura pas l'effet escompté au vu des experts du centre à savoir la dynamisation du cycle des affaires et la prise de risque plus confirmée. Au contraire, «les ressources mobilisées dans le cadre de la programmation budgétaire pour l'année à venir apparaissent en effet fort limitées eu égard aux objectifs de relance de la dynamique d'investissement, de renforcement des politiques sociales et de protection du pouvoir d'achat avec la préservation des conditions de soutenabilité des équilibres financiers» estime le CMC. Plus encore, il s'avère que les ressources affectées aussi bien aux dépenses de fonctionnement qu'aux dépenses d'investissement auront un effet jugé marginal qui s'inscrit même en repli sensible par rapport à l'exercice précédent. L'on rappel dans ce sens que la hausse totale des charges du budget général de l'Etat est insignifiantes vue les évolutions très différenciées dans différentes rubriques de dépenses. Ainsi, que l'accroissement sensible des allocations budgétaires de fonctionnement qui atteindront 213 Milliards de DH en 2020, en hausse de 4,1% par rapport à l'exercice précédent, résulte principalement de la progression des crédits prévus au titre des dépenses de matériel et des dépenses diverses, suivies des dépenses de personnel. En plus clair, l'on explique que «les charges de matériel et des dépenses diverses devront progresser de 7,0%, les dépenses de personnel devront s'accroitre de 6,7% suite aux répercussions financières de la création prévisible de plus de 23 000 postes budgétaires et de l'avancement normal des personnels de l'Etat». Investissement public au ralenti et effet multiplicateur limité Le ralentissement sensible observé au niveau des crédits de fonctionnement concerne aussi les dépenses allouées à l'investissement, annonce le CMC. Le montant des crédits de paiement retenu pour l'exercice à venir s'établit en effet à 78,2 Milliards de DH. «le volume global des investissements incluant l'ensemble des acteurs publics se situerait selon les prévisions du budget à 198 Milliards de DH, en hausse d'à peine 1,5% en valeur nominale. Rapporté au PIB, l'effort d'investissement public s'est réduit de près de 2 points et demi depuis 2016 en passant de 18,7 % à 16,3 % projeté pour l'année 2020». Par ailleurs, le CMC note que l'impact des différentes dispositions du projet de budget reste différencié selon la catégorie des opérateurs visée. Ainsi, l'ajustement des taux de l'impôt sur les sociétés pour certaines catégories d'opérateurs en plus du relèvement des droits d'importation appliqués à certains produits, conduirait ainsi à une perte nette de ressources disponibles à l'investissement de l'ordre de près d'un milliard de DH. Au niveau des ménages, les différentes mesures fiscales affectant la consommation généreront une perte apparente de ressources pour cette catégorie d'agents de 5,3 Milliards de DH qui sera largement compensée par le surcroît de dépenses prévues au titre du personnel pour un montant estimé à 7,5 Milliards de DH. La consolidation des effets des mesures prévues dans le projet de budget 2020 permettrait une injection d'une dépense supplémentaire dans le circuit économique évaluée à 8,9 Milliards de DH. Aussi, le faible impact attendu du budget tel qu'il ressort de cette évaluation interpelle, dans un contexte de rareté de ressources, sur la pertinence des choix budgétaires et leur interaction avec les autres instruments de politique économique. Une nouvelle dynamique requiert une meilleure mobilisation du secteur privé et un meilleur soutien de la politique monétaire de l'effort d'investissement et des conditions de financement de l'entreprise. Pour conclure, le CMC reste convaincu que le «recadrage de la politique économique et la recherche d'une plus grande efficacité de ses instruments ne peuvent se concevoir que dans le cadre d'un renouveau du policy- mix, budgétaire et monétaire, en reconsidérant ses objectifs mais aussi en optimisant ses moyens».