Dans son dernier rapport, le Conseil économique social et environnemental (CESE) a appelé à une mise en place d'une stratégie nationale pour promouvoir la lecture. Mais quelles sont les actions menées par le Ministère de la tutelle en matière de promotion de la lecture publique dans son cadre? «Soulignons tout d'abord la satisfaction du Ministère de la Culture et de la Communication envers l'intérêt porté par une instance de l'envergure du Conseil Economique Social et Environnemental au secteur du livre et de la lecture au Maroc. Ceci reflète une prise de conscience de plus en plus importante du rôle de la lecture en tant qu'élément de développement humain et vecteur de l'épanouissement culturel et social», a souligné Zohour Benhalima, chef de la division de la lecture publique dans une interview accordée au journal. Dans son rapport, explique-t-elle, le CESE met le doigt sur les facteurs qui causent la «faible pratique de la lecture». Il s'agit notamment du pouvoir d'achat, de la persistance de l'analphabétisation, l'insuffisance des bibliothèques scolaires et publiques et le manque d'implication des collectivités locales dans la promotion de la lecture. En effet, le Ministère de la Culture et de la communication, en tant que l'un des intervenants dans la lecture publique, a-t-elle ajouté, met en œuvre un plan d'action qui prévoit l'expansion et le développement du réseau des bibliothèques publiques, placées sous sa tutelle. Ce programme s'articule autour des opérations à savoir: étendre la couverture géographique du réseau de lecture publique, notamment dans les zones rurales, le développement et modernisation de ce réseau et la sensibilisation du jeune public à la lecture. Pour Zohour Benhalima, ce plan se traduit par des opérations dont la création de médiathèques qui respectent les standards internationaux en ce domaine (une trentaine de médiathèques ont déjà vu le jour), la création d'espaces de proximité tels les points de lecture (60 points) et les bibliothèques des établissements de réinsertion de jeunes ou de prisons (32 espaces), l'organisation d'activités d'animation périodiques autour du livre et de la lecture pour fidéliser le public, allant de l'heure de conte et atelier de lecture passant par l'organisation de débat, table ronde, rencontre avec un auteur ou autour d'un livre, la mise en place d'un portail qui offre plusieurs services dont une boite à outils à l'intention des responsables locaux et des bibliothécaires sous forme de guides à la construction de bibliothèques, de traitement documentaire manuel et informatisé, guide pour l'organisation d'animation autour du livre, guide à l'intention de l'utilisateur.. Selon elle, les médiathèques du réseau offrent aux chercheurs un catalogue informatisé qui permet l'accès à distance aux données bibliographiques de leurs collections documentaires. Cet OPAC est accessible en ligne via le portail de la lecture publique. Il donne accès également à une bibliothèque de livre numérique pour enfant. «Conscient du fait que la lecture est une habitude qui s'acquiert dès le jeune âge, 40% des bibliothèques publiques disposent d'espaces pour enfant avec des équipements et des collections adaptés. En outre, le Ministère de la Culture et de la communication via les Directions Régionales met à la disposition des écoles des mallettes de livres à emprunter pour une période déterminée. Des bibliobus aussi intègrent dans leurs circuits les cours des écoles rurales», a-t-elle affirmé. En somme, le programme «livre et lecture publique» a permis de mettre à la disposition des citoyens des équipements de proximité constitués de médiathèques, bibliothèques de centres culturels et de points de lecture, a t-elle fait savoir. «Le réseau de la lecture publique est composé de 342 bibliothèques dont 69% en partenariat avec les collectivités locales, 13% avec la société civile et 6% avec l'Administration Pénitentiaire et de la Réinsertion», a-t-elle indiqué. A-t-on une véritable politique de la lecture? Pour Zohour Benhalima, les actions susmentionnées reflètent la politique du ministère. Cependant, ce secteur se caractérise par la multiplicité des intervenants, poursuit-elle. A vrai dire, la question de la lecture est transversale et partagée par les différents acteurs concernés. «Outre le Ministère de la culture et de la communication, citons les Collectivités locales, le Ministère de la Jeunesse, le Ministère des Habous et Affaires Islamiques et la société civile, d'où l'existence de politiques diverses et divergentes», a-t-elle déclaré. «Une politique intégrée doit réunir l'ensemble des intervenants et se fonder sur le respect des engagements mutuels. Sachant que la création des espaces de lecture relève des compétences des collectivités territoriales, principal acteur de développement au niveau régional, le Ministère de la Culture et de la communication doit alors jouer le rôle principal de régulateur du secteur et de fournisseur d'expertise et d'assistance technique», a-t-elle indiqué. D'après elle, toute politique, aussi ambitieuse soit-elle, est conditionnée par les ressources humaines et les moyens financiers mis à sa disposition. Or, des acteurs culturels pointent du doigt la situation actuelle des bibliothèques notamment publiques. «Certes, il existe un déficit quantitatif important des espaces de lecture publique par rapport aux besoins potentiels de la population», estime-t-elle. Et d'ajouter : «le réseau de lecture publique offre une bibliothèque pour 122.086 habitants et 1236 communes locales ne disposent pas de ce service. La répartition géographique de ces espaces n'est pas équitable, on enregistre 74% dans le milieu urbain contre 26% en zones rurales». Pour combler ce manque, le Ministère de la culture et de la communication, a-t-elle souligné, adopte une politique de partenariat avec les collectivités locales qui fournissent les locaux, le personnel et le budget de fonctionnement et le Ministère de la Culture et de la communication se charge d'équiper et de former le personnel proposé. «Le Ministère de la Culture et de la communication déploie des efforts louables aussi pour répandre les bonnes pratiques de gestion bibliothéconomique (Traitement documentaire normalisé, informatisation…) dans des espaces appropriés et adéquats, équipés en fonction des besoins de chaque catégorie d'âge. Les médiathèques et les bibliothèques des centres culturelles en sont l'exemple», a-t-elle déclaré. Cependant, notons qu'en dépit de la qualité des prestations offertes par ces bibliothèques, les statistiques collectées révèlent un faible taux de fréquentation, a-t-elle fait savoir. «Malgré les efforts déployés par le Ministère de la Culture et de la communication pour promouvoir la lecture publique, l'environnement socio-économique, la persistance de l'analphabétisme, le système éducatif, sont autant d'éléments qui entravent le rayonnement de la lecture», conclut-elle.