Faudrait-il se rassurer du satisfecit béat dont vient de faire preuve le chef de gouvernement lors de son récent discours traditionnel devant les parlementaires de la nation? Le speech de la primauté, plutôt narratif et jubilatoire, manquait en fait, d'homogénéité et surtout de charge politique. Certes, divers acquis sectoriels ont été identifiés, relatant ainsi d'ardus efforts déployés tout au long de la première manche du mandat. Des chiffres balancés à l'emporte pièce, se contredisent avec ceux du HCP et recèlent, sans doute, davantage d'authentification. Ceci étant, le récit descriptif du patriarche guilleret semble voguer à contre-courant, démenti par les affres de la réalité criarde qui s'offre à nos yeux. Assurément, le vécu quotidien est bien aitre, puisque la rue bouillonne de contestation et le foyer flambe de cherté. A entendre ce bilan fort jouissif, on a l'impression qu'il est question d'un pays scandinave et non le nôtre, tellement le ton du coryphée était démesurément congratulant. Revenons bien à terre ! Notre pays vit l'une de ses périodes les plus délicates de son histoire. Il vaut mieux en parler, au lieu d'en éluder les prémices criants. Ne pas en piper mot n'est que myopie intempestive que ni le civisme encore moins l'honnêteté ne le permettent quand on préside aux destinées d'une nation. Jugez-en! La médiation politique et sociale est renvoyée aux calendes grecques, alors que les multiples mouvements protestataires à Al Hoceima, à Jerada ou encore à Tinghir et à Zagora se heurtent de front aux ripostes musclés des forces de l''ordre. Le fossé des inégalités sociales s'amplifie atrocement, entraînant sans cesse pauvreté, illettrisme et précarité, en particulier dans le milieu rural. La disette des disparités spatiales va crescendo, au moment où le concept de la régionalisation, conçu pour en atténuer les incidences, a l'air de marquer le pas, chemin faisant. Les effets nocifs de la dépravation frauduleuse et corruptrice rongent de plus belle, la société marocaine, à tous les niveaux. La réforme judiciaire, clé de voûte, de tout essor, se tarde à s'ancrer dans un système où prolifèrent encore des grabuges de toutes pièces… Les agitations tumultueuses qui s'aggravent dans l'entourage régional, notamment en Algérie et au Soudan, sont peu rassurantes dans la mesure où la contamination ne tient plus qu'à un bout de fil. D'autant plus que ces insurgions populaires réclament arrêt de l'oppression et de l'asservissement des régimes en place. On n'est donc pas à l'abri d'un danger extérieur surtout qu'on ne sait pas trop des caprices ravageuses de la direction américaines dont les sorties à l'égard de notre intégrité territoriale sont de plus en plus préoccupantes. Le péril intérieur dû aux altercations sociales n'est pas non plus sécurisant. Il va alors falloir renforcer le front interne, à travers tout d'abord, favoriser l'apaisement tous azimuts, en libérant les détenus politiques dont l'état actuel ne fait que souiller l'image du pays en termes de droits de l'homme et de libertés d'expression, consolider la stabilité et la sécurité parmi les larges franges démunies, en comblant les attentes et les besoins élémentaires, dans la décence et la dignité, valoriser et fortifier le rôle et la pratique politique sérieuse, de manière à recouvrer la confiance des populations à leur adresse… Pour ce faire, il importe de mettre en avant un large débat national de toutes les forces vives autour de cette problématique qui nécessite des alternatifs clairs, concrets et pérennes, car la cause suprême de la nation l'exige, loin de toute considération sectaire et politicienne.